Verset à verset Double colonne
1 Ayant donc rejeté toute malice, et toute fraude, et la dissimulation, et l’envie, et toute médisance,Cette particule conclusive montre que l’apôtre veut fonder l’exhortation qui va suivre sur ce qu’il a dit précédemment.
En effet, il a insisté (1 Pierre 1.22 ; 1 Pierre 1.23) sur l’amour fraternel, fruit de la régénération par la Parole.
Il reprend ici cette double idée pour demander aux chrétiens :
Dissimulation : grec hypocrisie (B), hypocrisies (majuscules) ; l’envie : grec les envies.
Autant de vices incompatibles avec l’amour fraternel (1 Pierre 1.22), et que tous les « régénérés » ont rejetés (grec), déposés, comme un vêtement sale (Zacharie 3.3-5 ; Romains 13.12, Éphésiens 4.22 ; Colossiens 3.8 ; Jacques 1.21) par le fait même qu’ils sont nés de nouveau.
La malice, ou méchanceté, qui consiste en toute sorte de sentiments contraires à la charité (1 Corinthiens 13.5-7), pousse à la fraude ou à la fausseté dans les procédés dont nous usons envers nos frères ; nous couvrons ceux-ci du masque de la bienveillance, c’est l’hypocrisie ou les hypocrisies, le pluriel marquant les diverses occasions de dissimuler.
L’envie, excitée par la supériorité ou les avantages que possède le prochain, nous porte à proférer sur son compte toute espèce de médisance.
Nés par la régénération (1 Pierre 1.23).
Cette expression n’implique pas que tous les lecteurs fussent de nouveaux convertis, en effet, quel est le chrétien qui ne doive pas, à certains égards, se considérer toute sa vie comme un faible enfant ? L’état le plus avancé auquel nous puissions atteindre ici-bas est beaucoup moins éloigné de la première enfance spirituelle qu’il ne l’est de la perfection et de la gloire. D’ailleurs, l’image du petit enfant évoque un ensemble de dispositions qui sont l’opposé des vices indiqués au verset 1 (Matthieu 18.3). Cette image convenait admirablement à l’exhortation de rechercher l’aliment spirituel nécessaire à l’âme, puisque le nouveau-né n’a qu’un désir, qu’un instinct, qui est de prendre le lait maternel, dont la vie même lui fait un besoin toujours renaissant (voir la note suivante).
Pur signifie non falsifié (2 Corinthiens 2.17 ; 2 Corinthiens 4.2), comme le lait que le petit enfant prend au sein de sa mère.
Quant aux mots : qui se trouvent dans la Parole, ils correspondent dans l’original à un adjectif dérivé de logos, la parole. Par cette épithète, l’apôtre veut probablement indiquer la source où se puise le lait que ses lecteurs doivent désirer. Ce sens devient évident si l’on fait attention que Pierre vient d’attribuer à la Parole la régénération de ces nouveau-nés (1 Pierre 1.23 ; 1 Pierre 1.25). Or, ce qui a produit en eux la vie peut seul l’entretenir, la faire grandir.
De plus, l’apôtre continue : (verset 3) « Si vous avez goûté que le Seigneur est bon ». Jésus, le Sauveur, que leurs âmes ont trouvé dans la Parole de l’Évangile, est lui-même le lait qui les nourrit. La plupart traduisent cet adjectif par spirituel (« le lait spirituel est celui que l’on boit avec l’âme », Luther) ou par « raisonnable » (Calvin), d’après le sens du mot en Romains 12.1. Mais cette interprétation convient beaucoup moins à l’ensemble de notre passage.
Le lait ne signifie point, comme chez Paul (1 Corinthiens 3.1-2), les premiers éléments de la doctrine, destinés à ceux qui ne peuvent encore supporter une nourriture solide. La Parole est l’aliment des forts comme des faibles. Aussi est-ce d’elle que l’apôtre attend pour tous la croissance, et cela, jusqu’au dernier terme, pensée qu’il exprime par ce mot, omis à tort par le texte reçu : pour le salut (la plupart des majuscules).
Psaumes 34.9. Le si n’exprime pas précisément un doute, mais plutôt la condition du désir.
C’est une première expérience du salut, qui seule nous le fait désirer toujours de nouveau, comme l’allaitement réveille, chez l’enfant, le désir de la nourriture qui est sa vie.
Le vrai temple et le vrai sacerdoce en Christ
En vous approchant de Christ, pierre vivante, rejetée des hommes, choisie de Dieu, formez un édifice où vous entriez comme des pierres vivantes ; soyez un sacerdoce qui offre des sacrifices spirituels agréés de Dieu, conformément à la parole de l’Écriture (4-6).
Les incrédules et la race élue
À vous, croyants, l’honneur ; pour les incrédules, la pierre angulaire rejetée devient une pierre d’achoppement. Mais vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, un peuple que Dieu s’est acquis pour annoncer les vertus de Celui qui vous a appelés à sa lumière ; vous qui n’étiez pas un peuple, vous êtes maintenant le peuple de Dieu et vous avez obtenu miséricorde (7-10).
L’image de la nutrition et de la croissance s’appliquait à la sanctification individuelle ; une nouvelle comparaison va caractériser le développement collectif des chrétiens formant une société.
Christ est désigné comme la pierre de l’angle, supportant l’édifice (verset 6). Cette qualification était connue des lecteurs de l’Ancien Testament (Ésaïe 28.16 ; Ésaïe 8.14 ; Psaumes 118.22. Comparer Matthieu 21.42 ; Actes 4.11).
Mais l’apôtre y ajoute une idée nouvelle par l’épithète pierre vivante : Christ n’est pas seulement la pierre angulaire de son Église ; il en est la vie, comme la racine d’un arbre qui, à la fois, le fixe au sol et le nourrit (Jean 15.1 et suivants). C’est pourquoi aussi ceux qui sont édifiés sur lui sont des « pierres vivantes » (verset 5 ; comparez sur ce mot 1 Pierre 1.3, note).
Cette pierre est, dans tous les temps, réprouvée des hommes, mais devant Dieu, choisie et précieuse. Pour entrer dans l’édifice que Christ supporte, dont il est la vie, il faut s’approcher de lui, entrer avec lui dans une communion vivante (verset 5).
Notre apôtre lui-même avait été désigné comme « la pierre » sur laquelle Jésus « bâtirait son Église » (Matthieu 16.18 1re note) ; mais il ne pouvait en être le fondement vivant, capable de donner la vie aux autres pierres de l’édifice.
Le terme grec employé dans Matthieu 16.18 n’est pas le même que dans notre épître. Il a plutôt le sens de « roche », tandis qu’ici et dans les passages de l’Ancien Testament auxquels l’auteur fait allusion, c’est le mot qui signifie proprement pierre.
Soyez édifiés ; ou en donnant au verbe le sens réfléchi : édifiez-vous.
D’autres traduisent : vous êtes édifiés. Mais il est plus conforme au ton de l’exhortation, qui domine dans ce morceau, de voir dans ce verbe un impératif et non un indicatif.
L’ordre : édifiez-vous, n’est pas un non sens, puisqu’il a des pierres vivantes, capables par conséquent de s’approcher elles-mêmes de l’édifice.
Combien que un chacun de nous en son endroit soit temple de Dieu et soit ainsi appelé toutefois, il faut nécessairement que tous soient assemblés en un, afin qu’il se fasse un temple de tous. Cela se fait quand un chacun, se contentant de sa mesure, se contient dedans les limites de son office ; et néanmoins tous ne laissent de rapporter au profit public tout ce qu’ils ont reçu de grâces
Appuyées sur la pierre angulaire, les pierres du bâtiment se soutiennent aussi l’une l’autre.
La maison spirituelle ainsi appelée par opposition au sanctuaire temporaire de l’ancienne Alliance (Marc 13.1), c’est l’Église que l’Esprit de Dieu bâtit, pénètre et sanctifie et dont tous les membres sont nécessaires les uns aux autres. Cette désignation de l’Église, fréquente dans les épîtres de Paul (1 Corinthiens 3.10 et suivants ; Éphésiens 2.22 ; 1 Timothée 3.15), était déjà dans la pensée de Jésus (Matthieu 16.18 ; Matthieu 16.19).
Grec : Pour une sacrificature sainte.
Le temple de Jérusalem symbolisait l’édifice spirituel de l’Église. Entrant par la pensée dans ce temple, l’apôtre y trouve une sacrificature exercée par ceux-là seuls qui étaient aptes à remplir cette charge.
Cette sacrificature doit prendre fin. Celui qu’elle prophétisait a accompli le seul vrai sacrifice pour les péchés. Et par là même, il a fait de tous ses rachetés autant de sacrificateurs qui ont le droit de s’approcher de Dieu pour offrir des sacrifices spirituels. Ces sacrifices sont spirituels, comme l’édifice dont vient de parler l’apôtre ; ils sont de nature morale et offerts par ceux qu’anime l’Esprit de Dieu.
Le premier sacrifice que ces nouveaux sacrificateurs présentent au Seigneur, c’est eux-mêmes (comparer sur toute cette pensée Romains 12.1, 3e note). S’ils font ce sacrifice réellement et le renouvellent chaque jour, ils remplissent toutes les fonctions du sacrificateur de l’ancienne Alliance dans leur vraie signification.
Tout revient à prêcher l’Évangile. Qui prêche, saigne le veau et égorge le vieil Adam. Tout ce que nous avons de lui doit être déposé ; c’est le seul sacrifice agréable à Dieu.
Bien plus, leur être entier étant voué à Dieu, l’accomplissement de leurs devoirs temporels, même des moindres, devient une partie vivante et réelle de ce service de Dieu, de ce culte en esprit qui ne saurait plus être séparé de la vie ordinaire, puisqu’il s’étend à tout, selon ce principe profond : « Soit que vous mangiez, ou que vous buviez, ou que vous fassiez quelque autre chose, faites tout pour la gloire de Dieu » (comparer verset 9).
À plus forte raison ne saurait-il y avoir dans l’Église des fonctions quelconques dont cette sacrificature soit exclue. Elle est l’Église même, tout y relève d’elle, comme l’Église relève de Jésus-Christ seul. Si, pour le bon ordre et pour le bien de tous, elle délègue quelques-unes de ses fonctions à tels de ses membres qui ont sa confiance, en qui elle a reconnu les dons de la grâce pour cela, elle n’y renonce point elle-même : elle ne saurait y renoncer sans abdiquer le caractère que lui a donné son Chef, sans cesser d’être ce qu’elle est. Il n’y a plus d’autre sacrificature sur la terre. Quand le catholicisme en a rétabli une, c’est qu’il était retourné à l’Ancien Testament, c’est que déjà il avait accusé le sacrifice de Christ d’insuffisance, et cela, pour élever une caste au-dessus de la vraie sacrificature.
Mais l’apôtre ne veut pas qu’on puisse l’oublier : ces sacrifices spirituels ne sauraient être offerts à Dieu que par Jésus-Christ (Hébreux 13.15), ou, comme d’autres traduisent, ne peuvent être agréables à Dieu (agréés de lui) que par Jésus-Christ.
Les interprètes diffèrent sur ces deux constructions possibles de la phrase, mais le sens reste le même au fond. Nous ne sommes rendus agréables à Dieu « qu’en son Bien-Aimé » et rien de ce qui vient de nous ne saurait être assez pur pour être accepté de lui autrement qu’en Celui qui justifie et sanctifie notre vie entière avec chacune de nos œuvres (1 Pierre 4.11 ; Romains 1.8 ; Romains 7.25 ; Romains 15.30 ; 2 Corinthiens 1.5 ; 2 Corinthiens 3.4 ; Colossiens 3.17, etc.).
Il faudrait traduire, pour rendre la préposition grecque : qui croit en s’appuyant sur elle (Ésaïe 28.16).
Le texte hébreu porte : « n’aura point hâte de fuir ».
La citation dans Romains 9.33 présente la même divergence de traduction, qui provient des Septante.
L’honneur d’être édifiés sur cette pierre précieuse et de posséder les privilèges énumérés verset 9.
Psaumes 118.22 et Ésaïe 8.14 pour les derniers mots : « et une pierre… » Comparer Matthieu 21.42 ; Actes 4.8-11.
La pierre de l’angle est destinée à porter et à protéger l’édifice ; mais ceux qui la rejettent la réprouvent, se heurtent contre elle et tombent. De sorte que la pierre qui devait les porter devient pour eux une pierre d’achoppement et de scandale, c’est-à-dire une occasion de chute et de ruine (comparer Luc 2.34 ; Luc 20.17 ; Luc 20.18).
On peut traduire aussi : ils heurtent contre la Parole étant rebelles, c’est-à-dire qu’ils heurtent contre la Parole parce qu’ils sont rebelles ou incrédules (Ésaïe 28.13 ; Matthieu 13.21 ; Matthieu 15.12).
Ils sont destinés à se heurter à la pierre angulaire, parce qu’ils désobéissent à la Parole.
C’est le juste jugement de Dieu sur eux. Mais ce jugement a été précédé de l’offre du salut par la Parole de l’Évangile. Ils ont méprisé ce salut. Alors le jugement de Dieu sur leur incrédulité se manifeste en ce qu’ils deviennent toujours plus incrédules, plus endurcis, pour finir par la condamnation. Ce jugement est donc à la fois leur œuvre et l’œuvre de Dieu, comme la conversion et le salut le sont en ceux qui croient (comparer Romains 9.22).
L’Écriture enseigne partout de la manière la plus claire l’élection de grâce ; ce passage est le seul peut-être qui paraisse enseigner une élection de réprobation. Mais il est évident, d’après l’ensemble de la pensée apostolique, que cette destination à « se heurter contre la pierre de l’angle », ne repose pas sur le dessein éternel de Dieu, puisqu’il a fait annoncer l’Évangile à ceux-là mêmes qui le repoussent, il ne date au contraire que du moment où ils ont commencé à « ne pas obéir à la Parole ».
Le but de l’apôtre est de leur faire entendre le plus sérieux avertissement en constatant ce fait, que la révolte contre Dieu attire le jugement effrayant d’une révolte nouvelle, dont la fin est la condamnation.
Grec : Un peuple pour acquisition (Malachie 3.17).
On peut traduire aussi : « destiné à être acquis » complètement par Dieu. L’expression présenterait l’entière prise de possession comme étant encore à venir.
D’autres pensent que c’est le peuple qui est appelé à acquérir : « un peuple appelé à l’héritage » (Oltramare révisé).
Toutes ces épithètes qui ne trouvent leur entière réalisation que dans la nouvelle Alliance, ou plutôt qui élèvent nos espérances vers la gloire et la perfection, étaient déjà appliquées au peuple de Dieu sous l’ancienne (Ésaïe 43.20 ; Ésaïe 43.21 ; Exode 19.6 ; Deutéronome 7.6).
Alors déjà Dieu avait montré que son peuple était une race élue, choisie librement par lui du sein des nations, un peuple sanctifié, mis à part, acquis par sa volonté expresse et dont la destination est indiquée dans les paroles qui suivent.
Mais la plus grande grâce de Dieu envers son peuple a été d’en faire une sacrificature royale, ou, selon l’expression de l’Ancien Testament, « un royaume de sacrificateurs » (Exode 19.6 ; comparez verset 5, note).
Et ce terme de royal s’est revêtu, par la rédemption, de toute sa glorieuse signification. Christ est, dans toute la plénitude du mot, Sacrificateur et Roi ; et en devenant un avec ses rachetés, il leur communique tout ce qu’il est. Il leur confère la puissance spirituelle de sa royauté et les privilèges de sa sacrificature auprès de Dieu (Apocalypse 1.6 ; Apocalypse 2.26-27 ; Apocalypse 20.6 ; comparez Romains 8.17 ; 1 Corinthiens 3.21 ; 1 Corinthiens 6.2 ; 2 Timothée 2.12).
Telle est, selon l’intention de Dieu l’Église de Jésus-Christ. Dans la pratique, hélas ! C’est à peine, dirait-on, si elle se doute de ses privilèges et de sa haute destination !
Le fait que Dieu, par une grâce immense, a appelé ses enfants des ténèbres (Éphésiens 5.8-14 ; Colossiens 1.12) de l’ignorance, du péché, de la condamnation, à une lumière que l’apôtre appelle merveilleuse, étonnante, doit leur inspirer l’ardent désir de publier ce qu’il a fait pour eux, afin que d’autres aussi y aient part comme eux.
Cette lumière merveilleuse, c’est Dieu lui-même (1 Jean 1.5), et c’est pour amener à lui ceux qui sont encore dans les ténèbres que les enfants de Dieu doivent annoncer ses vertus, c’est-à-dire ses perfections, sa justice, sa sainteté, son amour. C’est par leurs œuvres (Matthieu 5.16), par toute leur vie, aussi bien que par le témoignage de leur parole qu’ils sont appelés à le faire.
Afin d’engager par la reconnaissance les chrétiens à tendre vers cette haute destination, Pierre, en citant librement une parole du prophète Osée (Osée 1.6 ; Osée 1.9 ; comparez Romains 9.25), leur rappelle encore que ce qu’ils sont, ils le doivent à la pure miséricorde de Dieu, sans aucun mérite de leur part.
La parole même du prophète, à laquelle Pierre fait allusion, est tout ce ou il y a de plus propre à produire cette impression : « Je ferai miséricorde à Lo-Rouhama (qui n’a point obtenu miséricorde) ; et Je dirai à Lo-Ami (qui n’est pas mon peuple) : Tu es mon peuple. Et il me dira : Mon Dieu » !
La sainteté opposée aux calomnies
Étrangers sur la terre, ne vous livrez pas aux passions de la chair, mais ayez, au milieu des païens qui vous calomnient, une conduite telle que, frappés de vos bonnes œuvres, ils glorifient Dieu (11, 12).
La soumission aux autorités, qui réduit au silence les détracteurs, est la manifestation de la vraie liberté des serviteurs de Dieu
À cause du Seigneur, soyez soumis à tous ceux qui sont élevés en dignité pour punir et récompenser. Dieu veut que vous fassiez taire ainsi les ignorants et que vous vous conduisiez, non en hommes qui font de leur liberté un prétexte pour mal agir, mais en serviteurs de Dieu. Témoignez du respect à tous, de l’amour aux frères, de la crainte à Dieu, de l’honneur au roi (13-17).
Vous êtes étrangers et voyageurs (comparez 1 Pierre 1.1) ici-bas sur la terre ; puisque votre patrie est dans les cieux, vos affections et vos désirs doivent y être aussi (Psaumes 119.19 ; Philippiens 3.20 ; Hébreux 11.14 et suivants ; Hébreux 13.14).
Les convoitises charnelles sont tous les désirs terrestres qu’éprouve le vieil homme et qui se manifestent encore chez le régénéré (Éphésiens 2.3 ; Galates 5.19).
Un puissant motif pour s’en abstenir, c’est que, comme tous peuvent en faire l’expérience, ces convoitises charnelles font la guerre à l’âme. Ce qui ne veut pas dire seulement qu’en tant que charnelles, elles sont opposées à la raison ou à l’entendement, car, dans ce cas, l’apôtre aurait choisi ce terme (comme Paul, Romains 7.23 ; Romains 7.25) ; mais elles s’attaquent à l’âme, siège de la vie ; elles sont les ennemies de son repos, de sa paix, de son salut et travaillent à sa ruine (Matthieu 16.26 ; Romains 8.5-8).
Le témoignage d’une vie chrétienne excite d’abord les préjugés et les faux jugements des hommes ignorants ; mais pour celui qui persiste dans ce témoignage, le jour vient où ces mêmes hommes reconnaissent dans sa vie sanctifiée la puissance et l’action de Dieu.
Ce jour, c’est celui de leur visitation (Luc 19.44), c’est-à-dire le temps où Dieu les visite par des épreuves et par sa grâce. Alors se produira leur conversion, ils loueront ceux qu’ils avaient calomniés et la gloire en reviendra, non aux chrétiens eux-mêmes, mais à Dieu.
Cette exhortation est la même que celle du Sauveur (Matthieu 5.16). On peut traduire, en pressant le pronom relatif (grec) en quoi : « dans les choses où ils calomnient,…ils glorifient ».
En vous observant : participe sans régime en grec. Même mot dans 1 Pierre 3.2.
Les calomnies dont les chrétiens étaient l’objet les représentaient comme des ennemis de l’État, c’est pourquoi l’apôtre leur recommande, en premier lieu, la soumission aux autorités. Comparer Romains 13.1 et suivants, notes.
Pierre désigne par un seul mot, l’ordre humain (grec « création humaine », institution, établissement), les autorités auxquelles le chrétien doit obéissance et soumission.
L’expression : ordre humain n’est pas en contradiction avec l’idée de Paul, que toute autorité est instituée par Dieu lui-même. Seulement, tout en reconnaissant dans les autorités l’ordre établi de Dieu, Pierre marque une différence entre ces institutions humaines et la volonté directe de Dieu exprimée par sa Parole (Actes 4.19 ; Actes 5.29).
Et c’est précisément pour cela qu’il requiert l’obéissance des chrétiens, parce que, sous des autorités païennes, ils pouvaient être tentés de méconnaître la soumission qui leur était due. Aussi l’apôtre les exhorte-t-il à cause du Seigneur, parce que Dieu le demande et que sa gloire l’exige (verset 12) ; quelques commentateurs modernes pensent que, par le Seigneur, Pierre désigne Jésus-Christ. Il voudrait dire soit : pour ne pas nuire à la cause de Christ et de son Évangile ; soit : pour suivre le précepte (Matthieu 22.21) et l’exemple (Jean 18.23 ; Jean 19.11) de Jésus.
Comparer verset 12, note.
Grec : comme libres et non comme ayant la liberté comme couverture de la méchanceté.
C’est à nous que cela est dit, à nous qui connaissons la liberté chrétienne, afin que nous ne courions pas dans une voie où nous abuserions de notre liberté pour faire tout ce qui nous plaît sous ce nom. Si par la grâce de Dieu nous connaissons la vérité, si notre conscience a été affranchie des ordonnances humaines, prenons garde de faire de notre liberté le prétexte de ce qui serait notre honte.
Le chrétien est esclave de Dieu mais « servir Dieu est la suprême liberté », Augustin (Romains 6.17-18 ; Romains 6.22).
On ne distingue pas, au premier abord, l’ordre et la liaison de ces quatre préceptes. L’apôtre a voulu résumer brièvement les dispositions par lesquelles le chrétien se montrera soumis à « tout ordre humain » (verset 13).
Il doit respect à tous les hommes, amour spécial aux frères (grec aimez la fraternité), crainte à Dieu et honneur au souverain qui est son représentant sur la terre pour rendre la justice.
Soumission des esclaves à leurs maîtres
Qu’ils obéissent même à ceux qui sont méchants. S’il n’y a nulle gloire à être puni pour une faute, souffrir injustement, quand on fait le bien, nous rend agréables à Dieu (18-20).
L’exemple de Christ
Telle est votre vocation, car Christ, en souffrant pour vous, vous a laissé un exemple à suivre ; lui qui, étant sans péché, n’a pas répondu aux outrages, mais a remis sa cause au juste juge ; lui qui a subi la peine de vos péchés, afin de vous faire mourir au péché et vivre selon la justice ; lui dont les plaies vous ont guéris ; car, après avoir été des brebis errantes, vous êtes revenus au berger et gardien de vos âmes (21-25).
Domestiques, traduction littérale, ceux qui appartiennent à la maison, à la famille ; désignation plus douce et plus honorable que le terme « d’esclave », qui se lit dans des exhortations analogues (Éphésiens 6.5 ; Colossiens 3.22)
En toute crainte de Dieu, comme verset 19 le montre.
Mauvais, grec courbés, obliques, qui ne sont pas droits ; au sens moral : pervers, méchants. Le même mot se trouve Actes 2.40 ; Philippiens 2.15.
La traduction courante : d’un caractère difficile, ne se justifie pas d’après l’usage des écrivains grecs.
Dans ses rapports avec les hommes, le chrétien ne mesure pas l’accomplissement de ses devoirs à la manière dont les autres s’acquittent des leurs envers lui. Il agit par des motifs infiniment supérieurs à cette réciprocité, par des motifs invariables de leur nature (versets 13, 16 et 19 ; voir surtout Colossiens 3.23).
Souffrir injustement et pourtant l’endurer avec patience, par motif de conscience envers Dieu (grec : à cause de conscience de Dieu, ce que quelques-uns rendent ainsi : parce que Dieu en a conscience, qu’il le sait et vous approuve ; mais Dieu est plutôt l’objet que le sujet de ce savoir ; celui qui souffre regarde à Dieu et agit par obéissance envers lui), c’est là une grâce devant Dieu.
Dans versets 19 et 20, la patience qui endure l’injustice n’est pas désignée par le mot grâce comme un don de Dieu, comme une œuvre de sa grâce en nous. Ce terme correspond à celui de gloire, au verset 20.
Une grâce devant Dieu signifie donc : un moyen de nous rendre agréables à Dieu. Comme telle, l’injustice patiemment endurée porte avec elle sa récompense. Comparer Luc 6.32.
Appelés à souffrir injustement, à souffrir en faisant le bien, c’est la condition naturelle du chrétien dans ce monde, sans quoi il ne serait pas semblable au grand Modèle que l’apôtre nous remet ici sous les yeux (versets 21-24).
Pierre parle à de pauvres esclaves (verset 18), c’est à eux surtout qu’il aime à retracer l’image des humiliations et des souffrances du Sauveur de ces souffrances que Jésus a endurées injustement avec patience et en faisant le bien, puisqu’il les a endurées non pour lui-même, mais pour ceux qu’il voulait racheter.
Quand l’apôtre propose ce modèle aux esclaves, sa pensée s’étend à tous les croyants. Et il ne leur présente pas seulement l’exemple de Jésus souffrant ; il leur rappelle ce qui rend cet exemple si consolant et si encourageant : Christ a souffert pour vous (Codex Sinaiticus, B. A, C ; d’autres manuscrits portent nous), leur dit-il à votre place et pour votre réconciliation avec Dieu.
Par là seulement l’exemple de Christ se revêt de toute son efficace, parce que son œuvre nous met en communion avec lui, nous rend capables de suivre ses traces, nous transforme à sa ressemblance. Aussi après avoir décrit plus complètement ce Modèle parfait de douceur et de charité, en énumérant les outrages que Jésus endura (versets 22 et 23), l’apôtre revient à la valeur expiatoire des souffrances de Christ (verset 24).
Ésaïe 53.9. Le Christ devait être parfaitement saint à la fois pour pouvoir servir de modèle aux hommes et pour accomplir par sa mort leur salut (1 Pierre 1.19 ; 2 Corinthiens 5.21 ; Hébreux 4.15 ; Hébreux 7.26 ; Hébreux 9.14).
Jésus remit sa cause à Dieu, à son jugement. Il ne rendit pas outrage pour outrage et ne répondit pas par des menaces aux affreux tourments qu’on lui infligeait (comparer Romains 12.17-21 ; 2 Thessaloniciens 3.5 ; Hébreux 12.2).
Comparer 1 Pierre 1.19, note ; Hébreux 9.28 note.
Il a pris lui-même, spontanément, nos péchés et les a portés en son corps sur le bois, sur la croix, instrument de supplice des esclaves. Il les a (grec) portés en haut comme sur un autel (Jacques 2.21).
Luther traduit : « Il les a offerts en sacrifice ».
Dans les sacrifices de l’ancienne Alliance, les péchés étaient mis sur la victime ; ici la victime, c’est lui-même ; et pour rendre l’idée plus personnelle encore, l’apôtre ajoute : en son corps.
Dans tout ce passage, Pierre s’inspire de Ésaïe 53, surtout de Ésaïe 53.4-6. Dans l’indication de la valeur expiatoire des souffrances du Christ (verset 24), il complète les paroles du prophète en y ajoutant : en son corps sur le bois, deux traits empruntés à la pratique des sacrifices (comparer Hébreux 10.10).
D’autres relèvent plutôt dans l’élévation de Christ sur le bois, l’idée de l’opprobre (Actes 5.30), du supplice infamant (Actes 10.39), de la malédiction (Galates 3.13).
Ces deux notions ne s’excluent pas, puisque la victime chargée des péchés du peuple était réputée impure (Lévitique 16). L’auteur de l’épître aux Hébreux aussi, tout en présentant la mort de Christ comme un sacrifice, fait ressortir son caractère ignominieux (Hébreux 11.26 ; Hébreux 13.10-13, notes). Pierre de même rappellera (1 Pierre 4.14) ce caractère pour encourager ses lecteurs à supporter les injures.
La mort de Jésus-Christ atteint dans les croyants un double but. D’une part, l’expiation de leurs péchés et leur réconciliation avec Dieu ; d’autre part et comme un effet naturel et nécessaire de cette grâce, leur affranchissement personnel de l’esclavage de la chair, la mort au péché, la liberté de vivre à la justice.
Cette dernière œuvre est accomplie par la première : rentrés en communion avec Dieu, source de toute vie, de toute sainteté, de toute justice, les chrétiens puisent en lui cette vie nouvelle qui les délivre de la servitude intérieure et fait mourir par degrés en eux le vieil homme, l’homme du péché. C’est cette vue profonde de la mort et de la résurrection de Jésus-Christ, dans son rapport vivant avec la mort et la résurrection spirituelles de ses disciples, que l’apôtre Paul développe dans Romains 6.1-11.
Par un dernier mot, emprunté à Ésaïe 53.5, l’apôtre exprime tout ce que les croyants reçoivent de la mort de Christ : Vous avez été guéris. La guérison implique la cessation de la maladie et le rétablissement de la santé, ou, sans figure, la « mort au péché » et la « vie pour la justice ».
Ésaïe 53.6.
Leçon de Codex Sinaiticus, B. À ; les autres majuscules portent : vous étiez comme des brebis errantes.
Des brebis abandonnées à elles-mêmes sont les plus faibles, les plus misérables créatures, exposées à tous les dangers.
Tel est l’homme (Matthieu 9.36 ; Luc 15.4 ; Jean 10.10-16), tant qu’il n’a pas été ramené à Celui que Pierre nomme ici le berger ou pasteur et gardien (il emploie le mot qui a désigné plus tard l’évêque) des âmes, à celui qui les paît et les garde comme ses brebis. Ce sont là des titres bien choisis pour exprimer les tendres soins que le Sauveur prend de ses rachetés.
Vous êtes retournés (grec), vous vous êtes retournés, convertis (1 Thessaloniciens 1.9). Cette conversion est la raison subjective (car) de la guérison que les croyants ont obtenue par la mort du Rédempteur (verset 24).