1 Et il arriva ce jour-là que Jonathan, fils de Saül, dit au jeune homme qui portait ses armes : Viens, passons jusqu’au poste des Philistins, qui est là de l’autre côté. Et il n’en dit rien à son père.
L’exploit de Jonathan et le serment de Saül
Versets 1 à 15 — L’exploit de Jonathan
Jonathan dit… Il se trouvait probablement sur le bord opposé, du côté de Guéba, d’où il pouvait voir le poste ennemi. Son dessein est de descendre dans la vallée, puis de remonter de l’autre côté pour attaquer ce poste peu nombreux.
Il n’en dit rien à son père… : pour ne pas être arrêté par lui. Cette fin du verset 4 jusqu’au verset 5 y compris, est une parenthèse explicative.
2 Et Saül se tenait à la sortie de Guibéa, sous le grenadier de Migron, et la troupe qui était avec lui était d’environ six cents hommes.
À Guibéa : à environ 4 km au sud-ouest.
Migron. Ce mot ne peut désigner la localité dont il est parlé Ésaïe 10.28, qui était au nord de Micmas, tandis que Saül devait être campé au sud de la vallée. C’est donc ici un nom commun ; son sens le plus probable est aire. Cette aire était située à l’extrémité des champs de Guibéa du côté du nord.
Six cents hommes : 1 Samuel 13.15.
3 Et Abija, fils d’Ahitub, frère d’Icabod, fils de Phinées, fils d’Éli, sacrificateur de l’Éternel à Silo, portait l’éphod, et le peuple ne savait pas que Jonathan s’en fût allé.
Ce verset sert à préparer le verset 18.
Ahija était le petit-fils du grand sacrificateur Éli, par son père Ahitub qui était fils de Phinées, fils d’Eli.
Frère d’Icabod : comparez 1 Samuel 4.21. Ahitub est qualifié comme frère d’Icabod, parce que celui-ci a déjà figuré dans le récit.
Portait l’éphod et par conséquent aussi l’Urim et le Thummim. Il était auprès de Saül pour le diriger au besoin par ce moyen, ce qui était devenu plus nécessaire depuis l’éloignement de Samuel.
4 Et entre les passages par lesquels Jonathan cherchait à arriver au poste des Philistins, il y avait une dent de rocher d’un côté et une dent de rocher de l’autre côté, l’une nommée Botsets et l’autre Séné.
Entre les passages. Robinson dit que de chaque côté du Wadi-ès-Subeinit se trouvent dans la chaîne nord et sud des dépressions (les passages) par lesquelles on peut descendre au fond du wadi et en remonter. Ces dépressions aboutissent dans leur partie inférieure aux deux pics dont, nous avons parlé et d’où l’on a la vue sur le plateau opposé. Ce fut par cette voie naturelle que Jonathan trouva le moyen d’arriver jusqu’au poste philistin.
Botsets, brillant ; Séné, buisson.
5 L’une de ces dents se dresse au nord devant Micmas, et l’autre au midi devant Guéba. 6 Et Jonathan dit au jeune homme qui portait ses armes : Viens et passons jusqu’au poste de ces incirconcis ! Peut-être l’Éternel agira-t-il pour nous, car rien n’empêche l’Éternel de sauver, qu’on soit en grand ou en petit nombre. 7 Et son écuyer lui dit : Fais selon ton désir ; va où tu voudras, je te suivrai où ton cœur te mènera. 8 Et Jonathan dit : Nous allons passer vers ces gens et nous nous montrerons à eux ; 9 s’ils nous disent : Arrêtez, jusqu’à ce que nous venions à vous ! Nous resterons en place et nous ne monterons pas vers eux.
La pensée de Jonathan était celle-ci : S’ils descendent vers nous avec précautions, nous nous retirerons. S’ils nous défient en se moquant (verset 10), nous monterons.
10 Mais s’ils nous disent : Montez contre nous ! Nous monterons, car l’Éternel les a livrés entre nos mains. Cela nous servira de signe. 11 Et ils se montrèrent tous deux au poste des Philistins, et les Philistins dirent : Voilà les Hébreux qui sortent des trous où ils s’étaient cachés !
Voilà les Hébreux… Ironique : Ils se décident enfin à sortir de leurs trous !
12 Et les gens du poste répondirent à Jonathan et à son écuyer : Montez vers nous, et nous vous dirons quelque chose. Et Jonathan dit à son écuyer : Monte après moi, car l’Éternel les a livrés entre les mains d’Israël. 13 Et Jonathan monta sur ses mains et ses pieds, et son écuyer le suivait. Et ils tombèrent devant Jonathan, et son écuyer tuait après lui.
En voyant la hardiesse de ces deux hommes, ils se croient l’objet d’un coup monté par les Israélites et sont saisis de peur. Jonathan se jette sur les premiers et, à mesure qu’ils tombent, son écuyer les achève.
14 Et ce premier massacre que firent Jonathan et son écuyer fut d’environ vingt hommes dans l’espace d’un demi-sillon [de la longueur] d’un arpent de terre. 15 Et il se répandit une terreur dans le camp, dans la contrée et parmi tout le peuple ; le poste et ceux qui étaient allés ravager furent pris de terreur eux aussi ; et la terre trembla, et cela devint la terreur de Dieu.
Les fuyards répandent la terreur dans le camp.
La terre trembla. Expression hyperbolique pour dépeindre le frémissement du sol sous les pieds des fuyards et des chevaux et sous les roues des chariots.
Terreur de Dieu : la terreur la plus extrême, ou même une terreur d’origine surnaturelle.
16 Et les sentinelles de Saül à Guibéa de Benjamin virent que la multitude se dispersait et courait çà et là.
Fuite et déroute des Philistins (16-23)
Les sentinelles de Saül : postées sur le bord méridional du ravin pour observer les mouvements des Philistins.
17 Et Saül dit à la troupe qui était avec lui : Faites la revue et voyez qui s’en est allé d’avec nous ! Et ils firent la revue, et voici, Jonathan et son écuyer manquaient.
Il a compris que la cause de ce désordre chez les ennemis ne pouvait provenir que d’une attaque faite sans ses ordres.
18 Et Saül dit à Ahija : Fais approcher l’arche de Dieu ! Car l’arche de Dieu était en ce jour avec les fils d’Israël.
Ahija : le grand sacrificateur (verset 3).
Fais approcher l’arche. La présence de l’arche est ici un trait tout-à-fait inattendu et le terme fais approcher, qui s’applique ordinairement à l’éphod, dans lequel le souverain sacrificateur portait l’Urim et le Thummin, étonne également. De là la correction des Septante : Apporte l’éphod. Pour défendre le texte ordinaire, il faudrait supposer que le sacrificateur ne devait consulter l’Urim que devant l’arche, symbole de la présence divine.
19 Et pendant que Saül parlait au sacrificateur, le tumulte dans le camp des Philistins allait croissant ; et Saül dit au sacrificateur : Retire ta main !
Retire ta main. Saül suspend la consultation pour se hâter de profiter du désordre de l’armée ennemie. Ce mot jette quelque jour sur la manière dont se faisait la consultation. Il paraît que le sacrificateur mettait sa main dans la poche intérieure du pectoral (Exode 28.30, note) pour en retirer le signe de la réponse divine. L’interprétation de ce signe pouvait après cela prendre un certain temps.
20 Et Saül et tout le peuple qui était avec lui s’assemblèrent et vinrent jusqu’au lieu du combat, et voici, l’épée de l’un était contre l’autre et la confusion était très grande. 21 Et les Hébreux que les Philistins avaient auparavant avec eux se tournèrent pour se mettre, eux aussi, du côté de ceux d’Israël qui étaient avec Saül et Jonathan.
Les Hébreux : ceux que les Philistins avaient emmenés avec eux en traversant le pays et qu’ils avaient forcés de servir dans leur armée.
22 Et tous les hommes d’Israël qui s’étaient cachés dans la montagne d’Éphraïm, apprirent que les Philistins avaient pris la fuite, et ils s’acharnèrent eux aussi à les poursuivre en combattant. 23 Et l’Éternel en ce jour-là délivra Israël, et le combat se poursuivit jusqu’au-delà de Beth-Aven.
Beth-Aven : voir 1 Samuel 13.5.
24 Et les hommes d’Israël étaient à bout de forces en ce jour-là. Et Saül fit jurer le peuple, en disant : Maudit soit l’homme qui prendra de la nourriture jusqu’au soir avant que je me sois vengé de mes ennemis ! Et personne ne prit de nourriture.
Précipitation de Saül (24-31)
Cette défense devait prévenir tout ce qui aurait pu retarder la poursuite.
Que je me sois vengé de mes ennemis. Ces mots montrent combien Saül rapportait déjà tout à sa personne.
25 Et tout le monde entra dans la forêt et il y avait du miel sur la surface du sol.
Le miel découlait des arbres creux où s’étaient établies les abeilles.
26 Et lorsque le peuple entra dans la forêt, il vit du miel qui coulait, et nul ne porta la main à sa bouche, car le peuple avait crainte du serment. 27 Et Jonathan n’avait pas entendu quand son père avait fait jurer le peuple, et il avança le bout du bâton qu’il avait à la main, et il le plongea dans la masse de miel, et il ramena la main à sa bouche et ses yeux furent éclaircis. 28 Et quelqu’un du peuple, lui adressant la parole, dit : Ton père a fait jurer le peuple en disant : Maudit soit l’homme qui prendra aujourd’hui de la nourriture ! Et le peuple défaillait.
Le peuple défaillait. Cette remarque est destinée à préparer le reproche sévère de Jonathan (verset 29).
29 Et Jonathan dit : Mon père a troublé le pays ; voyez comme mes yeux sont clairs parce que j’ai goûté un peu de ce miel. 30 Ah ! Si le peuple avait mangé aujourd’hui de ce qu’il a pris chez ses ennemis ! Car maintenant la défaite des Philistins n’a pas été grande ! 31 Et ils battirent ce jour-là les Philistins depuis Micmas jusqu’à Ajalon ; et le peuple était tout défaillant ;
Résultat, de la poursuite et conséquences des mesures précipitées prises par Saül.
Ajalon : voir Josué 10.12, note.
32 et le peuple se jeta sur le butin, il prit des brebis, des bœufs et des veaux ; et on les égorgea sur la terre et le peuple en mangea avec le sang.
Avec le sang : voir Lévitique 19.26.
33 Et on le rapporta à Saül en disant : Voici, le peuple pèche contre l’Éternel en mangeant avec le sang. Et il dit : Vous avez mal agi. Roulez maintenant vers moi une grosse pierre !
Une grosse pierre : pour faciliter l’écoulement du sang et empêcher que la chair n’en fût trempée.
34 Et Saül dit : Dispersez-vous parmi le peuple et dites-leur : Amenez-moi chacun son bœuf et chacun son mouton, et égorgez-les ici ! Et vous mangerez, et vous ne pécherez pas contre l’Éternel en mangeant avec le sang. Et tout le peuple amena, pendant la nuit, le bétail qu’il avait sous la main, et on l’égorgea là. 35 Et Saül bâtit un autel à l’Éternel : ce fut le premier autel qu’il bâtit à l’Éternel.
Bâtit un autel. Cet autel était-il un simple monument de sa victoire, dans le genre de celui dont il est parlé Josué 22.10 et suivants, ou bien était-ce un véritable autel destiné à des sacrifices, tel que ceux que jusqu’ici Samuel seul avait élevés ? Dans ce dernier cas, nous voyons Saül sortir de plus en plus des limites de sa charge royale. Mais le premier sens convient mieux à 1 Samuel 15.12, où Saül accomplit un second acte de ce genre.
36 Et Saül dit : Descendons à la poursuite des Philistins pendant qu’il fait nuit et pillons-les jusqu’au matin et n’en laissons pas un de reste. Et ils dirent : Fais tout ce qui te semblera bon. Et le sacrificateur dit : Approchons-nous ici de Dieu.
Pendant qu’il fait nuit… : cette nuit même, après que le peuple aura pris son repas.
Et le sacrificateur dit. L’intervention d’Ahija provient sans doute du secret sentiment qu’il a, comme souverain sacrificateur, qu’une faute pèse sur le peuple, qui pourrait lui attirer malheur.
Approchons-nous ici : ici même, sur le champ, avant de rien entreprendre.
37 Et Saül consulta Dieu : Descendrai-je à la poursuite des Philistins ? Les livreras-tu entre les mains d’Israël ? Et il ne lui répondit pas ce jour-là.
Ne répondit pas. Le silence de Dieu est la preuve que le sentiment du grand sacrificateur était fondé. La question posée à Dieu ne devait pas être résolue avant que cette affaire eût reçu sa solution.
38 Et Saül dit : Approchez, tous les chefs du peuple ! Recherchez et voyez quel est ce péché qui a été commis aujourd’hui !
Ce péché : celui que vient de signaler le silence de Dieu.
39 Car l’Éternel, qui vient de délivrer Israël, est vivant : Le péché fût-il sur Jonathan mon fils, il mourra. Et de tout le peuple personne ne lui répondit.
Qui vient de délivrer : auquel par conséquent nous devons être prêts à faire les plus grands sacrifices.
Personne ne lui répondit. Nul en Israël ne voulait donner son assentiment à la menace qu’il venait de proférer.
40 Et il dit à tout Israël : Soyez d’un côté, et moi et mon fils Jonathan nous serons de l’autre. Et le peuple dit à Saül : Fais ce qui te semblera bon !
Il est difficile de croire que Saül n’eût pas quelque idée d’une faute commise par Jonathan ; il semble qu’il fût déjà agité par la jalousie, en voyant les actes de vaillance par lesquels son fils l’éclipsait peu à peu.
41 Et Saül dit à l’Éternel : Dieu d’Israël ! Donne une certitude ! Et Jonathan et Saül furent pris, et le peuple fut libéré.
Comparez Josué 7.16-18.
Donne une certitude ! Saül demande à Dieu de rompre le silence qu’il a gardé (verset 37).
42 Et Saül dit : Jetez le sort entre moi et Jonathan mon fils ! Et Jonathan fut pris. 43 Et Saül dit à Jonathan : Déclare-moi ce que tu as fait. Et Jonathan le lui déclara et dit : J’ai goûté, avec le bout du bâton que j’avais à la main, un peu de miel ; et voilà que je mourrai !
Le serment despotique et téméraire imposé au peuple par Saül avait mis tout le peuple et Saül lui-même dans une position fausse vis-à-vis de Dieu. En vertu de ce serment Jonathan et, par lui, le peuple, se trouvent responsables d’un péché qui en réalité n’en est pas un. Ce péché exige une expiation ; si elle est offerte, ce ne peut être que par la mort de Jonathan ; mais cette mort ne peut avoir lieu ; le péché restera donc inexpié. Tout cela provient de la témérité du serment imposé par Saül.
44 Et Saül dit : Que Dieu me traite avec la dernière rigueur ! Oui, certainement, tu mourras, Jonathan ! 45 Et le peuple dit à Saül : Quoi ? Jonathan mourrait, lui qui a opéré cette grande délivrance en Israël ! Jamais ! L’Éternel est vivant ! Il ne tombera pas à terre un cheveu de sa tête, car c’est avec Dieu qu’il a agi dans cette journée. Et le peuple délivra Jonathan et il ne mourut point. 46 Et Saül revint de la poursuite des Philistins, et les Philistins regagnèrent leur pays. 47 Et Saül, ayant pris possession de la royauté sur Israël, fit la guerre contre tous ses ennemis à l’entour, contre Moab, contre les fils d’Ammon, contre Édom, contre les rois de Tsoba et contre les Philistins ; et partout où il se tournait, il l’emportait.
Coup d’œil général sur les côtés glorieux du règne de Saül (47-48)
À l’entour : Moab au sud-est ; Ammon à l’est ; Édom au sud ; Tsoba au nord-est ; les Philistins au sud-ouest.
Amalek. Voir l’histoire détaillée de cette expédition au chapitre suivant.
48 Et il fit des exploits, et il battit Amalek, et il délivra Israël de la main de ceux qui le pillaient. 49 Et les fils de Saül étaient Jonathan, Jischwi et Malkisua. Et ses deux filles s’appelaient, l’aînée Mérab, et la plus jeune Mical.
Détails sur la famille de Saül (49-51)
50 Et le nom de la femme de Saül était Ahinoam, fille d’Ahimaats, et le nom du chef de son armée était Abiner, fils de Ner, oncle de Saül. 51 Et Kis, père de Saül, et Ner, père d’Abner, étaient fils d’Abiel.
Voir 1 Samuel 9.1.
52 Et pendant toute la vie de Saül, il y eut une guerre acharnée contre les Philistins ; et quand Saül voyait un homme fort et vaillant, il se l’attachait.
Ce dernier verset se rattache à l’idée des guerres de Saül (versets 47 et 48) et en particulier à la persistance de celle qu’il eut à soutenir contre les Philistins ; il explique la création d’une armée permanente nécessitée par la force militaire de ce peuple.