Verset à verset Double colonne
1 Et il y eut une famine au pays, outre la première famine qui avait eu lieu du temps d’Abraham. Et Isaac alla à Guérar, vers Abimélek, roi des Philistins.Au pays. Ce ne peut être que le pays de Canaan. Isaac y est donc rentré après son séjour à Lachaï-Roï (Genèse 25.14).
Outre la première famine. Comparez Genèse 12.10 et suivants.
Guérar. Voir Genèse 20.1, note.
Abimélek. C’est avec un roi du même nom qu’Abraham avait été en relation dans cette même contrée (chapitre 20). Le temps considérable qui s’est écoulé entre les deux faits ne permet pas de supposer que nous ayons affaire au même personnage. Si l’on compare Psaumes 34.1, on peut supposer qu’Abimélek (père du roi, ou : le roi est mon père) était le nom héréditaire des rois des Philistins, comme Pharaon celui des rois d’Égypte.
L’Éternel lui apparut. C’est la première apparition de l’Éternel à Isaac. Abraham venait probablement de mourir (Genèse 25.7) et les promesses devaient être confirmées à son héritier.
Ne descends point en Égypte : où l’on allait toujours en cas de famine (Genèse 12.10 ; Genèse 41.57).
Que je te dis : dans les paroles suivantes.
Tous ces pays-ci : le pays de chaque tribu cananéenne (Genèse 15.19-21).
Le serment. Comparez 22.16
Ce verset renferme les trois éléments que nous avons constatés dans la bénédiction patriarcale depuis le commencement de l’histoire d’Abraham.
Se béniront. Comparez Genèse 22.18, note.
Parce qu’Abraham a obéi… Si la bénédiction promise à Abraham est devenue sa propriété et, par lui, celle de ses descendants, c’est parce qu’il a marché dans la voie de l’obéissance.
Commandements, statuts, lois. Accumulation fréquente dans les autres livres du Pentateuque, pour désigner la totalité des prescriptions divines.
C’est ma sœur. Même crainte que chez Abraham et même subterfuge, mais plus mensonger encore, puisque Rébecca n’est que la parente éloignée d’Isaac (nièce à la mode de Bretagne).
On ne peut qu’admirer l’élévation morale dont fait preuve Abimélek, qui pourtant est un païen.
La ressemblance de ce récit avec ceux des chapitres 12 et 20 a conduit certains commentateurs à supposer que cette tradition d’un subterfuge coupable, employé par un patriarche pour échapper à la mort, avait été reproduite ici pour la troisième fois, après l’avoir été déjà deux fois dans le récit de la vie d’Abraham. Nous aurions ainsi trois recensions diverses d’un seuil et même fait.
Nous avons déjà vu ce qui empêche d’identifier dans le cas d’Abraham la scène chez Pharaon avec celle chez Abimélek (Genèse 20.8, note). Nous en dirons autant pour notre récit. Les différences sont manifestes : Rébecca n’est point conduite dans le palais du roi ; elle est exposée à être prise en mariage non par Abimélek lui-même, mais par ses sujets ; Abraham reçoit des présents considérables, qui ne sont point offerts à Isaac ; et enfin il n’est pas question dans l’histoire d’Abraham de l’édit de mort qu’Abimélek rend contre quiconque touchera Isaac et sa femme. Nous en concluons que notre récit est bien authentique et qu’Isaac a eu recours à son tour à la même ruse que son père dans des circonstances analogues.
Fit des semailles. C’est la première fois que nous voyons la famille patriarcale joindre la culture du sol au soin des troupeaux. Jacob continuera (Genèse 37.7). C’est une transition de la vie nomade à la vie sédentaire.
Cette année : non pas celle de son arrivée à Guérar (verset 8), mais celle où il sema pour la première fois.
Le centuple. Encore aujourd’hui, cette contrée est très fertile et des récoltes semblables à celle que fit Isaac ne sont pas rares. Pendant ce temps, la famine régnait peut-être encore en Canaan, puisqu’Isaac n’y retourne pas.
Les bouchèrent : pour obliger Isaac à quitter le pays. Les Arabes font quelque chose de semblable encore aujourd’hui ; quand une caravane refuse de leur payer le droit de passage, ils bouchent l’orifice des puits qui se trouvent sur sa route et les recouvrent de terre, afin qu’on ne sache, plus où ils sont.
Vallée de Guérar : aujourd’hui Wadi-Djérâr, au sud-est de l’ancienne Guérar. Ce vallon présente de nombreuses traces d’anciens puits.
Tant qu’Abraham avait vécu, on avait respecté ces puits, creusés par lui lors de son séjour raconté chapitre 20.
Après avoir remis en état les puits anciens, Isaac en creuse encore d’autres.
Puits d’eau vive : puits alimenté par une vraie source souterraine, par opposition aux puits où l’eau se rassemble par une lente infiltration à travers les terrains avoisinants.
Eseh signifie débat.
Sitna signifie opposition, noise (même racine que Satan). Un vallon avec quelques ruines, à environ trois quarts de lieue de Ruhaibeh (voir au verset suivant), porte encore le nom de Wadi-Schutein.
Il partit de là. Il sortit probablement du territoire sur lequel les bergers de Guérar élevaient des prétentions ; c’est pourquoi il n’y eut plus de querelles.
Rehoboth signifie largeur, aise : l’Éternel l’a maintenant mis au large en le délivrant de ces contestations qui pèsent tant à un homme paisible comme lui.
Rehoboth est probablement le Wadi-Ruhaibeh actuel, où se trouvent les ruines d’une ancienne ville, avec un vaste puits, à huit lieues au sud-ouest de Béerséba. C’est en ce point que la route de Guérar rejoint celle qui conduit d’Hébron en Égypte en passant par Béerséba et la fontaine d’Hagar.
Et il monta. Jusqu’à Rehoboth, il était descendu vers le désert. Il se tourne maintenant vers le nord-est pour rentrer dans le pays de Canaan.
Cette nuit-là : la première nuit qu’il passe en dedans des frontières de la Terre promise. En lui apparaissant, Dieu sanctionne son retour dans ce pays.
À cause d’Abraham. Voir verset 5, note.
Mon serviteur. Abraham est le premier homme qui soit honoré de ce titre.
L’arrivée d’Abimélek coïncide avec le moment où Isaac fait creuser un puits nouveau. Comparez versets 32 et 33.
Son ami : son conseiller intime. David et Salomon avaient des fonctionnaires semblables (2 Samuel 15.37 ; 1 Rois 4.5).
Picol. Le nom du général et celui du roi sont les mêmes que dans Genèse 21.22-34. Mais comme le mot Abimélek peut être un titre donné à tous les rois des Philistins, il est possible que le mot Picol soit de même un titre donné au général en chef de l’armée, car il signifie bouche de tous.
Renvoyé de chez vous. Voir verset 16
Nous avons vu… De la prospérité qu’ils voient naître partout sous ses pas ils ont conclu que c’est un homme qu’il vaut mieux avoir pour allié que pour ennemi.
La citation de ce qu’ils ont dit se termine avec les mots entre nous.
Entre nous et toi est une explication qu’ils ajoutent en ce moment.
Fait que du bien. Ils estiment qu’ils se sont montrés très généreux en laissant Isaac quitter sain et sauf leur pays.
Tu es maintenant… En terminant leur discours, ils reviennent à leur impression dominante.
Du puits. Celui mentionné verset 5
Sibéa, sept. Sur le rapport entre le nombre sept et le serment, ainsi que sur Béerséba, voir Genèse 21.31, note.
Il y a des analogies frappantes entre ce récit et celui de Genèse 21.22-34. Abraham, comme Isaac, traite alliance avec Abimélek et Picol et l’origine du nom de la ville de Béerséba est rapportée à chaque fois au serment prononcé dans cette circonstance. Il y a cependant des différences marquées entre les deux faits.
Les caractères d’Abraham et d’Isaac sont nettement distingués : Abraham, qui n’a été lésé que sur un point de détail (Genèse 21.25), a une tenue ferme et énergique, tandis qu’Isaac, provoqué de toutes manières, se montre, comme toujours, faible et débonnaire et ne fait aucune observation (versets 30 et 31).
Quant au nom de Béerséba, ni l’un ni l’autre des deux récits n’en fait remonter l’origine à Abraham ou à Isaac ; Isaac donne même un autre nom à son puits, celui de Sibéa. Le nom de Béerséba lui-même n’a été donné à cet endroit que plus tard, au moment où on y construisit une ville, et cela, en souvenir des deux alliances qui y avaient été contractées. On comprend facilement qu’un traité puisse se renouveler à différentes époques en un même lieu entre deux tribus voisines.
Dans ce morceau, le rédacteur a combiné les deux documents élohiste et jéhoviste. Chacun d’eux présentait à sa manière la raison du départ de Jacob pour la Mésopotamie. D’après l’élohiste, il est envoyé là par son père pour y chercher une femme dans sa parenté ; d’après le jéhoviste, il est obligé de partir pour échapper à la colère de son frère aîné, qu’il a supplanté. Loin de s’exclure, ces deux récits se complètent l’un l’autre, comme nous le verrons plus tard.
Au document élohiste appartiennent Genèse 26.34-35 ; Genèse 27.46 à 28.9. Tout le reste (Genèse 27.1-45) provient du jéhoviste.
Quarante ans. Isaac avait donc cent ans (Genèse 25.26).
Sur les noms des femmes d’Ésaü, voir à Genèse 36.2. Dans le choix que fait Ésaü, on voit percer de nouveau cet esprit profane dont il avait déjà fait preuve en vendant son droit d’aînesse (Genèse 25.29-34). Il se montre de plus en plus incapable d’être l’héritier de la promesse.
Sujet d’amertume. Isaac et Rébecca blâment cette alliance avec les habitants du pays, qui sont voués à la destruction et ils souffrent en voyant Ésaü se rendre indigne de la bénédiction ; mais Isaac n’a pas l’énergie d’Abraham pour s’y opposer (Genèse 24.3). Il faudra l’intervention de Rébecca pour amener Isaac à suivre envers Jacob la même ligne de conduite qu’Abraham avait suivie envers lui.