Verset à verset Double colonne
Ce chapitre est un appendice que le rédacteur du livre a ajouté au recueil des prophéties de Jérémie (voyez Jérémie 51.64). Il est difficile d’admettre que Jérémie en soit l’auteur, parce que la délivrance de Jéhojachin, racontée versets 31 à 34, a dû être postérieure à la mort du prophète. Le récit de la prise de Jérusalem, que nous fournit ce chapitre, se retrouve presque identique dans 2 Rois 24.18-25.30 (cependant les versets 28 à 30, qui indiquent le nombre des Juifs déportés à Babylone, sont remplacés dans les Rois par un bref résumé de l’histoire des Juifs demeurés à Jérusalem ; 2 Rois 25.22-36). Si l’on compare les deux textes, il semble probable que l’un n’est pas la copie de l’autre, mais qu’ils ont été puisés tous deux à une, source commune. On a quelque peine à comprendre dans quel but ce chapitre a été ajouté au livre de Jérémie ; peut-être le rédacteur voulait-il montrer par l’histoire que les menaces du prophète contre Sédécias et Jérusalem avaient été pleinement accomplies ; peut-être aussi ce chapitre formait-il une introduction historique au livre des Lamentations, qui auraient été primitivement réunies aux prophéties de Jérémie. Nous renvoyons pour le commentaire au récit parallèle du livre des Rois et nous nous bornerons à quelques remarques de détail portant surtout sur les différences des deux récits.
Au quatrième mois : la mention du mois, omise 2 Rois 25.3, est ici rétablie (comparez Jérémie 39.2).
Comparez, pour les détails, Jérémie 39.2-7.
Devant ses yeux. L’auteur semble dire par ces mots que ce fut le dernier usage qu’il lui fut donné d’en faire.
Dans la prison. Les LXX traduisent : maison de la meule ; c’était la prison où les captifs qu’on avait privés de la vue, étaient astreints à tourner une meule ; comparez Juges 16.21 (Samson).
Voir les notes de Jérémie 39.8-10.
Le dixième jour… Les Rois parlent du septième jour ; cette différence provient sans doute de la confusion des deux lettres qui en hébreu désignent ces deux nombres. On ne peut décider quelle leçon est la plus exacte.
Une partie des pauvres du peuple. Des pauvres, une partie fut emmenée en captivité (verset 15) et une partie fut laissée à Jérusalem (verset 16).
L’énumération est plus complète que dans 2 Rois 25.14-15, où sont omis les coupes (verset 18), les bassins, les chaudières, les chandeliers, les cuillers et les urnes (verset 19).
Les deux colonnes : elles étaient à l’entrée du temple (1 Rois 7.15-22).
Les supports : 1 Rois 7.27-37.
La mer : la grande cuve dans le parvis (1 Rois 7.23-26).
Les bœufs d’airain avaient été enlevés de dessous la mer par Achaz (2 Rois 16.17), mais il n’est point dit qu’ils eussent été envoyés à Tiglath-Piléser. Ils avaient probablement été dès lors remis à leurs places.
Qui étaient dessous… L’hébreu porte : qui étaient sous les supports, ce qui n’a pas de sens. Une légère correction fournit le sens que nous avons donné.
En mesurait le tour : littéralement : en faisait le tour ; pour dire que cette colonne avait 42 coudées (20 mètres à peu près) de circonférence.
De cent : 24 pour chacune des quatre faces et 4 aux quatre angles.
Séraïa, souverain sacrificateur, père de Jéhotsadak qui alla en captivité, ancêtre de Jéhosua et d’Esdras (Zacharie 6.11 ; 1 Chroniques 6.44 ; Néhémie 12.26 ; Esdras 7.1). Sophonie, déjà mentionné Jérémie 21.1 ; Jérémie 29.25 ; Jérémie 38.3.
Gardiens du seuil : voir 2 Rois 25.18, note.
Sept d’entre… Le livre des Rois dit cinq, sans que nous sachions lequel des deux chiffres est le vrai.
Qui voyaient la face du roi : les plus hauts dignitaires, qui avaient droit d’entrée chez le roi.
Ces trois versets sont remplacés dans 2 Rois 25.22-26, par un bref résumé de l’histoire des Juifs restés en Judée sous Guédalia ; ce résumé était ici superflu, puisque ces événements avaient été racontés avec beaucoup plus de détails dans les chapitres 41 à 43. Le dénombrement que présente notre texte a dû être emprunté à une autre source que celle où ont été puisés le récit qui précède et celui du livre, des Rois ; la manière de compter les années du règne de Nébucadnetsar est un peu différente.
La septième année… S’il s’agit de la déportation sous Jéhojachin, cette septième année correspondrait à la huitième mentionnée 2 Rois 24.12 ; dans ce dernier récit (versets 14 à 16) le nombre des déportés s’élève à environ dix-huit mille. On a supposé dès lors qu’il fallait plutôt lire la dix-septième année, soit l’année du siège de Jérusalem ; c’est ce qui explique pourquoi les déportés sont des hommes de Juda, c’est-à-dire des habitants de la campagne, plutôt que de la ville (verset 29), qui était encore assiégée.
Juifs : hommes de Juda, en opposition aux habitants de Jérusalem.
La dix-huitième année… D’après le verset 12 et d’après 2 Rois 25.8, Jérusalem fut prise la dix-neuvième année de Nébucadnetsar ; cette différence s’explique par la divergence dans la fixation de la première année de son règne.
La vingt-troisième année. Nous n’avons aucun autre détail sur cette dernière déportation, qui eut lieu cinq ans après la prise de Jérusalem et qui fut, sans doute provoquée par de nouvelles révoltes des Juifs restés en Palestine.
En tout quatre mille six cents. On s’est étonné de la petitesse de ce nombre ; mais il ne s’agit sans doute que des chefs de famille et si nous évaluons chaque famille à six personnes en moyenne, nous arriverions à un total de 27 600 âmes. Ce chiffre correspondrait bien à celui de 27 300 que les annales assyriennes nous donnent pour le nombre des captifs que le roi d’Assyrie emmena de Samarie.
Evil-Mérodac fait sortir de prison Jéhojachin (comparez 2 Rois 25.27-30).
Le vingt-cinquième jour… Les Rois portent le vingt-septième. Evil-Mérodac monta sur la trône en 561 avant Jésus-Christ, soit 68 ans après le commencement du ministère de Jérémie (comparez Jérémie 25.3) ; ce seul détail prouverait que ce chapitre ne peut avoir été écrit par Jérémie, qui aurait eu au moment de la mort de Jéhojachin (verset 34) près de cent ans.
Fit grâce à… Littéralement : releva la tête de ; même image Psaumes 3.4.
L’expression entretien perpétuel est expliquée ensuite par les deux idées : pour tous les jours et pour toujours. Ce fait a certainement paru d’une haute importance à l’écrivain sacré. Il y a vu sans doute un premier signe du retour de la faveur divine envers Israël captif et un gage de l’approche du rétablissement promis.
En terminant le livre d’Ésaïe, nous avons résumé les traits principaux du tableau que ce prophète a tracé de l’avenir d’Israël et de l’humanité. Les perspectives du livre de Jérémie sont moins vastes peut-être, mais non moins élevées. Le regard de ce prophète est comme attaché à un point noir, centre de son horizon prophétique ; c’est le châtiment imminent du peuple de Dieu, qui va être livré aux païens et emmené en captivité.
Mais par delà ce prochain et sombre avenir, deux points lumineux brillent à ses yeux : l’un plus rapproché, le retour de Juda après deux générations écoulées (soixante-dix ans) ; l’autre plus éloigné, l’établissement d’une alliance nouvelle que Jéhova conclura avec son peuple, alliance dans laquelle Israël ne sera plus soumis à une loi imposée du dehors, mais accomplira la volonté de Dieu, conduit par la loi intérieure du Saint-Esprit.
Dans cette promesse de Jérémie s’exprime la vue la plus sublime à laquelle se soit élevée la prophétie israélite. Par cette attente, l’ancienne alliance se dépasse, pour ainsi dire, elle-même.
En échange, la personne du Messie est ici moins en relief que dans Ésaïe. Il est bien dit qu’un autre David s’élèvera et qu’il fera régner la justice et le droit sur la terre ; mais ce côté du tableau prophétique reste dans l’ombre. On peut dire que si Ésaïe a été le prophète du Fils, Jérémie et Ézéchiel ont été les prophètes de l’Esprit et de l’ordre de choses nouveau que l’Esprit doit fonder. L’État théocratique croulait sous les yeux de Jérémie. C’est un état de choses nouveau qu’il voit surgir.
Un écrivain moderne a dit : Les quatre principales époques de la vie d’Israël se résument dans quatre noms : Abraham, Moïse, David, Jérémie. Abraham est la racine ; Moïse, le tronc ; David, la fleur ; Jérémie, le fruit. L’accord parfait de la volonté humaine avec la volonté divine par le Saint-Esprit est, en effet, le but suprême, le fruit mûr du salut que Dieu a préparé pour l’homme par l’ancienne alliance.