Verset à verset Double colonne
D’après les indications très détaillées de la tradition juive, concernant la célébration du culte, dans la période qui suivit le retour de l’exil de Babylone, ce Psaume était chanté dans le temple le matin et le soir de chaque sabbat. Peut-être avait-il été composé à cet usage. Il est certain que la pensée centrale du Psaume nous transporte à ce grand sabbat, dont le repos hebdomadaire n’est que l’image, où l’humanité renouvelée célébrera la destruction complète du mal et jouira, dans la communion de son Dieu, de toute la plénitude de vie qui lui est destinée. La certitude de ce qu’il y a d’éphémère dans la prospérité des méchants, de durable dans celle des justes, est déjà exprimée, sous forme d’enseignement, dans les Psaumes 37 et 49 ; elle apparaît au Psaume 73 comme le résultat de la lutte douloureuse du croyant contre le doute. Ici c’est en pleine action de grâces et comme en plein sabbat, que nous sommes transportés dès le début. Le psaume comprend cinq strophes, de trois versets chacune.
C’est une belle chose : agréable à Dieu et salutaire à l’homme (Néhémie 8.10).
Ta bonté. Ce n’est pas sans intention que la bonté, la grâce est nommée avec le matin et la fidélité avec les nuits. L’aurore de chaque jour n’est-elle pas une image, en même temps qu’un témoignage, de la bonté de Dieu et quand la pensée de la fidélité divine se présente-t-elle mieux à l’esprit et au cœur que durant les nuits, dont elle écarte les dangers ou adoucit la souffrance ?
L’instrument à dix cordes : lyre de grandes dimensions (Psaumes 33.2), avant la forme d’un triangle renversé.
Que tes œuvres sont grandes, ô Éternel !
Car tu me réjouis… La louange n’est en réalité que la réponse de l’homme à un langage divin. Dieu parle à son peuple et le réjouit par ses œuvres, celles de la création matérielle et surtout, ainsi que cela va être développé, celles de sa miséricorde et de sa justice.
Combien profondes tes pensées ! Elles sont insondables, même pour l’homme éclairé de Dieu ; mais lui, du moins, en entrevoit la profondeur, tandis que l’insensé (verset 7) ne juge que d’après l’apparence et s’arrête à la surface, sans rien soupçonner au-delà.
L’homme stupide, hébreu : l’homme brute ; Delitzsch traduit der Thiermensch.
Il n’y connaît rien, ne voit pas que ce qu’il prend pour prospérité est une voix glissante (Psaumes 73.18) et que ce à quoi il n’attache aucun prix est la condition même de la vie.
C’est ici la strophe centrale du psaume, non seulement par la position qu’elle occupe, mais par la pensée qu’elle exprime : celle de l’abaissement de toute fausse grandeur en présence de Dieu. Tel sera en effet le dernier mot de l’histoire.
C’est pour être détruits. Tout concourt souvent au succès des méchants. Il n’y a pas là une simple apparence, mais une volonté divine, d’après laquelle le mal doit manifester sa vraie nature, pour être ensuite d’autant plus justement et complètement détruit.
Mais toi… Les événements mêmes qui ont pour résultat la manifestation, puis la destruction du mal, contribuent en définitive à mettre en pleine lumière la suprême élévation de l’Éternel.
Car voici… Ces mots expriment la surprise. Telle est en effet la puissance du mal qu’il semble indestructible. Mais le psalmiste constate, et cela, par deux fois, comme un événement encore à venir, mais certain, la destruction des ennemis de Dieu.
Cette élévation de la race sainte est la conséquence immédiate de la ruine des méchants, qui l’ont opprimée. Devançant les temps, le psalmiste voit déjà son peuple revêtu d’une force nouvelle.
Ma corne : ma force (Psaumes 75.6, Psaumes 75.11 ; Psaumes 89.18).
Celle du buffle, plus exactement : de l’oryx ; voir Job 39.12, note.
Une huile toute fraîche : symbole à la fois de la grâce divine et de la joie dont elle remplit le cœur (Psaumes 23.5 ; Psaumes 45.8).
Mon œil aime à regarder… Autrefois il n’osait pas même envisager en face ses adversaires ; maintenant il les voit déjà vaincus. Remarquer, dans ce verset, le contraste entre ce regard du fidèle sûr de la victoire et celui des méchants qui épient leur adversaire.
Comme la palme. Les Arabes appellent cet arbre : l’arbre béni, la sœur de l’homme. Sa puissance de production est telle qu’il peut donner jusqu’à 200 ou même 300 kg de fruits.
Rien n’égale la grâce et la majesté du palmier des oasis, ce roi des grandes plaines, avec son diadème haut élevé de feuillage, sa verdure permanente et sa vitalité constamment renouvelée, qui fait de lui l’image de la vie, au milieu même du royaume de la mort
Le cèdre : le roi des montagnes de Syrie, résistant aux frimas, comme le palmier à l’ardeur du soleil. La prospérité durable du juste fait contraste avec la croissance rapide, mais éphémère du méchant.
Plantés… Il s’agit ici des fidèles, qui viennent d’être comparés aux palmiers du désert et aux cèdres du Liban et qui le sont ici, semble-t-il, aux arbres qui ombrageaient les cours de la maison de l’Éternel. M. Félix Bovet, parlant du sanctuaire mahométan, le Haram, qui occupe actuellement l’emplacement du temple de Jérusalem, s’exprime en ces termes : Le fidèle musulman y passe souvent des journées entières, absorbé dans la contemplation, accroupi à l’ombre bienfaisante des grands cyprès, promenant sa vue sur les montagnes et les vallées qui déroulent devant lui leur splendide panorama et jouissant surtout du bonheur d’être là véritablement en terre sainte, sans que l’aspect importun d’un infidèle risque de souiller ses regards. Quand je rencontrais des musulmans se dirigeant vers cet antique sanctuaire des Israélites ou que je les apercevais de loin sur les pelouses du Haram, la vie religieuse des anciens âges, telle que la représente la Bible, se retraçait vivement à moi. Je songeais à la belle image sous laquelle un psalmiste nous représente les justes pareils à ces arbres toujours verts, qui, plantés dans la maison de l’Éternel, fleurissent dans les parvis de notre Dieu (Voyage en Terre Sainte, page 203).
Ils porteront des fruits… On pourrait traduire aussi : ils pousseront des jets. Même au moment où leur développement semblerait devoir être arrêté, ils progresseront en vie et en force et ils ne cesseront de porter des fruits, parce que le sol où ils plongent leurs racines est pénétré de la vie même de Dieu (Psaumes 1.3 ; Jean 15.5-8).
Pour annoncer… Cet admirable déploiement de vie n’est pas, comme la prospérité des méchants, un voile jeté sur la gloire de Dieu ; il ne se produit au contraire que pour rendre témoignage à l’inébranlable et parfaite justice de Dieu.
L’Éternel est droit… mon Rocher… point en Lui d’iniquité : autant d’expressions empruntées au cantique de Moïse, Deutéronome 32.4. Au terme de son histoire, Israël proclamera ce qu’annonçait déjà Moïse à ses pères, à peine sortis d’Égypte.