Verset à verset Double colonne
Chant de louange sur la rédemption, le dessein salutaire de Dieu réalisé en Christ
Signature, adresse et salutation apostolique (1, 2).
Actions de grâces à Dieu :
Vous aussi, appelés par la Parole de l’Évangile, vous avez reçu le sceau de l’Esprit, garant de l’héritage, jusqu’à la pleine délivrance du peuple de Dieu (13, 14).
Comparer Romains 1.1 et 1 Corinthiens 1.1, note.
Saints est la désignation du caractère des chrétiens comme membres du peuple de Dieu (1 Pierre 2.9) et de leur destination finale (Romains 1.7 ; Philippiens 1.1).
Mais ils ne sont saints que parce qu’ils sont fidèles ou croyants et que, par leur foi, ils sont en Jésus-Christ, c’est-à-dire dans une communion vivante et sanctifiante avec lui (Colossiens 1.2).
Comparez Romains 1.7 ; 1 Corinthiens 1.3 ; 2 Corinthiens 1.2 note.
Bénir Dieu, c’est le louer, le glorifier dans un sentiment d’adoration, de reconnaissance, d’amour (2 Corinthiens 1.3 ; 1 Pierre 1.3 ; comparez Romains 9.5).
Le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ, désigne Dieu à la fois comme le Dieu et le Père de Jésus-Christ.
Comme l’expression Dieu de Jésus-Christ n’est guère usitée dans le langage biblique, il serait conforme à l’esprit des auteurs sacrés de traduire : « Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur ». Notre version, toutefois, est littérale et cette désignation se retrouve sous la plume de Paul (Éphésiens 1.17 et 2 Corinthiens 11.31 ; comparez 1 Corinthiens 15.24).
Grec : « Dans les célestes », ce qui permet de suppléer, comme le font quelques traducteurs, entre autre Luther : « biens célestes » en place de « lieux célestes ». Ce dernier terme est préférable, parce qu’il a pour lui le témoignage d’autres passages de notre épître où se trouve la même expression (Éphésiens 1.20 ; Éphésiens 2.6 ; Éphésiens 3.10 ; Éphésiens 6.12).
L’apôtre indique par là l’origine de toutes ces bénédictions dont il rend grâce à Dieu : elles viennent du ciel, dont tous les trésors nous sont ouverts ; elles nous mettent en communion avec le ciel et avec tous les esprits célestes qui contemplent la face de Dieu (comparez Éphésiens 2.6) elles nous sont enfin conservées dans le ciel, où nous les posséderons un jour avec plénitude (Matthieu 6.20 ; Colossiens 1.5 ; 2 Timothée 1.12 ; 1 Pierre 1.4).
De là ce cri de reconnaissance et d’adoration par lequel Paul ouvre son épître : Béni soit Dieu !
Qu’on remarque ce contraste dans le même mot : Béni soit Dieu (passif), en paroles, c’est tout ce que peut l’homme. Qui nous a bénis (actif) par des faits, des bénédictions qui sont des grâces immenses, qui sont spirituelles, parce qu’elles émanent de son Esprit.
Dans les paroles qui suivent (Éphésiens 1.4-14), l’apôtre énumère ces bénédictions éternelles dans un véritable chant de louanges, où les pensées qui remplissent son cœur s’échappent avec une impétuosité telle, que ces dix versets forment une seule phrase qu’aucun repos n’interrompt (Remarque qui s’applique également aux versets Éphésiens 1.15-23).
Le motif de cette adoration, la grande pensée de toute cette épître, c’est que Dieu, selon le conseil éternel de sa miséricorde, a appelé les pauvres païens de leurs profondes ténèbres à sa merveilleuse lumière, à sa communion, à l’alliance de grâce, autrefois traitée avec son peuple.
D’ordinaire Paul commence ses épîtres par des actions de grâces au sujet des bénédictions accordées aux Églises particulières auxquelles il écrit ; mais ici, dans cette lettre encyclique et pastorale qu’il adresse à diverses Églises de ces vastes contrées païennes de l’Asie, son horizon s’étend et la pensée du salut éternel de Dieu en Jésus-Christ saisit son âme d’autant plus vivement.
De là, ces hauteurs célestes où il s’élève d’entrée ; de là, ce style qui, pressé de redire les immenses miséricordes de Dieu, surabonde et se précipite comme un torrent.
À la base de toutes les bénédictions spirituelles qu’il va énumérer, l’apôtre voit l’élection venant de Dieu, dès avant la fondation du monde (Matthieu 25.34).
Dès le commencement (2 Thessaloniciens 2.13), bien avant la chute, Dieu avait arrêté dans sa grâce le dessein de cette élection ; mais en Lui (en Christ, Éphésiens 1.3), car Dieu n’a pu « aimer le monde » qu’en Celui qui, de tout temps, a concilié dans sa personne et dans son œuvre le contraste de la justice et de la grâce (comparer Romains 3.24-26, notes).
En lui, Dieu a élu ses enfants du sein d’un monde déchu ; car le commencement, le milieu et la fin du salut sont l’ouvrage de Christ et c’est pour cela même que la vérité de cette élection éternelle est le plus ferme fondement de l’espérance et de la consolation des croyants.
Ceux qui ne veulent point admettre cette doctrine si clairement révélée dans les Écritures (Romains 8.28-30 ; 1 Pierre 1.12) identifient l’élection avec l’action de la volonté de Dieu de sauver l’humanité et font ce terme synonyme de rédemption ou de grâce en général. Mais quelle violence faite au langage !
On ne saurait nier que élire (littéralement choisir du milieu de) suppose des hommes qui ne sont pas élus et qu’ainsi il ne soit ici question d’une prédestination des saints, mais sans qu’il y soit enseigné une réprobation des impies ou la doctrine d’une grâce irrésistible.
D’autres admettent l’idée d’une élection, mais afin d’en chercher le fondement en l’homme et non en Dieu, ils prétendent que Dieu a élu ceux en qui il a prévu la foi, la sainteté.
Mais que dit ici l’apôtre ? non que Dieu nous a élus parce que nous étions saints, mais afin que nous le devinssions. Devenir saints et irrépréhensibles devant lui (en sa présence, à ses yeux, à son jugement), tel est le but de l’élection (comparez 1 Pierre 1.1 ; 1 Pierre 1.2) ; et c’est par là même que Dieu, tout en assurant la persistance et la perfection de son œuvre en nous, lie notre responsabilité et met dans une pleine harmonie la parfaite liberté de sa grâce et l’indispensable obéissance de sa créature morale).
Les derniers mots de ce verset, dans l’amour, peuvent se lier à ce qui précède ou à ce qui suit : dans le premier cas, ils indiquent notre amour comme l’élément où s’accomplit la sanctification ; dans le second cas, ils révèlent l’amour de Dieu comme la cause de son élection : (Éphésiens 1.5) en son amour nous ayant prédestinés… Les plus fortes raisons militent en faveur de cette dernière construction.
Grec : « Nous ayant déterminés d’avance pour l’adoption en vue de soi par Jésus-Christ, selon le bon plaisir (ou la bienveillance) de sa volonté » (voir sur l’adoption Romains 8.15 ; Galates 4.5 et sur les mots prédestiner ou déterminer d’avance Romains 8.29).
Non content d’avoir cherché en Dieu seul la cause unique de notre salut, l’apôtre ajoute : par Jésus-Christ, en qui seul nous devenons enfants de Dieu ; et encore : selon le bon plaisir de sa volonté.
Ces derniers mots n’expriment pas seulement l’amour de Dieu dans cet acte, car l’apôtre a déjà indiqué cette source première du salut, mais bien la souveraineté de sa volonté (Matthieu 11.26 ; Luc 10.21), à l’exclusion de tout motif qu’il aurait trouvé en l’homme pécheur.
« Il nous a rendus agréables (ou graciés) dans le Bien-aimé » est une expression qui indique admirablement le rapport dans lequel Christ nous met avec Dieu : lui seul est le Bien-aimé du Père ; en lui Dieu nous rend sa grâce, en sorte qu’il nous voit en Christ avec le même amour qu’il a pour Christ lui-même. Et puisque tout cela vient de Dieu, il manifeste ainsi la louange de la gloire de sa grâce.
Tel est le but qu’il se propose en nous et auquel nous devons concourir par toute notre existence dans le temps et dans l’éternité (comparer 1 Pierre 2.9).
D’après une variante il faudrait traduire simplement : « Sa grâce qu’il nous a accordée en son Bien-aimé ».
Comparer Colossiens 1.14. Après avoir cherché dans le conseil éternel de la miséricorde de Dieu la cause de la grâce (Éphésiens 1.4 ; Éphésiens 1.5) et indiqué son effet et son but (Éphésiens 1.6), l’apôtre nous apprend ici, en paroles fort claires, quel en a été le moyen efficace : le sang de Christ, c’est-à-dire sa mort expiatoire, son sacrifice.
Par ce sacrifice nous avons la rédemption, le rachat ; il a été la rançon de nos âmes (Matthieu 20.28 ; Romains 3.24 ; 1 Corinthiens 6.20 ; Galates 3.13 ; 1 Timothée 2.6 ; Hébreux 9.12 ; 1 Pierre 2.24) Il a accompli et réalisé ce que tous les sacrifices de l’ancienne alliance ne faisaient que préfigurer (comparer Romains 3.24, note).
La rémission des péchés (Grec : « offenses, chutes »), est le premier fruit de la rédemption par le sang de Christ, appropriée personnellement à l’homme pécheur. Elle lui procure la réconciliation avec Dieu, la paix ; elle lui rend l’accès à toute la richesse de la grâce divine.
Cette rémission des péchés, accordée à celui qui se repent et qui croit en Jésus-Christ, doit se renouveler sans cesse dans le cours de la vie chrétienne, pour que les offenses involontaires de l’enfant de Dieu ne troublent pas sa communion et sa paix avec son Père céleste. Il faut ainsi que la rédemption par le sang de Christ nous soit constamment appliquée, que nul n’oublie la purification de ses anciens péchés, sans quoi il retomberait dans l’insensibilité morale, l’endurcissement ou la propre justice (2 Pierre 1.9).
Dieu, dit l’apôtre, a fait abonder envers nous la richesse de sa grâce (dont le centre est le pardon des péchés), en toute sagesse et intelligence.
Par le premier de ces mots, on doit entendre la pleine connaissance qu’il nous a donnée de lui-même, de son salut, de notre état moral, de nos rapports nouveaux avec lui (Éphésiens 1.9 ; Éphésiens 1.10) ; c’est toute une sagesse divine, remplaçant la sagesse humaine. Par le second, Paul désigne plutôt une vue claire et sûre de la vie, du monde, de la ligne de conduite que nous devons y suivre, en un mot, la sagesse pratique (comparer Colossiens 1.9).
Mais la connaissance désignée par l’un et l’autre terme n’est pas purement intellectuelle, puisqu’elle nous est communiquée par la Parole de Dieu et par son Esprit et que les objets de cette connaissance sont de nature à intéresser surtout nos facultés morales, qui doivent en être pénétrées et renouvelées (comparer Éphésiens 1.17 ; Éphésiens 1.18).
Le mystère de sa volonté (c’est-à-dire le mystère voulu de lui), le salut éternel en Jésus-Christ, qui devait commencer par « le grand mystère de piété, Dieu manifesté en chair », est développé à Éphésiens 1.10.
Nous faire connaître, ce mystère ce qui suppose toujours les moyens extérieurs de la connaissance et l’illumination intérieure par le Saint-Esprit, est aussi bien un effet du bon plaisir de Dieu, que l’accomplissement même de ce salut en Jésus-Christ (Romains 16.25, suivants ; Éphésiens 3.4 suivants ; Éphésiens 6.19 ; Colossiens 1.26).
Et cet acte de la bienveillance divine était, comme tout le reste, résolu auparavant en lui-même, sans aucun égard aux mérites de l’homme pécheur (2 Timothée 1.9).
S’il faut tant de lumière et de sagesse pour bien connaître Jésus-Christ, le grand mystère de la volonté de Dieu, doit-on s’étonner qu’il soit si peu connu, puisqu’on s’applique si peu à ces vérités et qu’on a si peu de soin d’en demander l’intelligence ?.
Grec : « Selon son bon plaisir, qu’il avait résolu auparavant en lui-même (Éphésiens 1.9), pour l’administration (économie) de la plénitude des temps, de réunir (récapituler, résumer) toutes choses en Christ, celles qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre, en lui-même ». C’est ici l’un de ces passages de Paul difficiles à entendre, parce que l’immensité de la pensée rend les termes un peu vagues, à force de les généraliser.
Il faut d’abord se rendre compte des mots mêmes, afin de mieux saisir l’idée.
« Pour l’administration… » marque le terme, le temps où Dieu devait exécuter le mystère de sa volonté, son bon plaisir, qu’il avait résolu en lui-même (Éphésiens 1.9).
Ce terme, ce but, c’est ce que l’apôtre appelle la dispensation ou l’administration de la plénitude des temps, c’est-à-dire l’administration que Dieu lui-même prendrait en main quand les temps seraient accomplis (Galates 4.4).
Maintenant que faut-il entendre par cette administration ? Originairement, ce terme (économie) signifie le gouvernement, la gestion d’une maison et des biens qui lui appartiennent (Luc 16.2).
Paul emploie quelquefois ce mot en parlant de son propre ministère, de l’administration spirituelle qui lui a été confiée (Éphésiens 3.2 ; 1 Corinthiens 9.17 ; Colossiens 1.25). Il est l’économe, l’administrateur des mystères de Dieu (1 Corinthiens 4.1 ; comparez 1.7 ; 1 Pierre 4.10). Ici, c’est à Dieu lui-même qu’est attribuée l’administration, parce qu’il s’agit des grands faits de la rédemption et de tous ses résultats jusqu’à la fin des siècles.
Pour cette raison, les Pères de l’Église grecque entendent par ce terme l’incarnation, le grand « mystère de piété », évidemment désigné ci-dessus (Éphésiens 1.9), il faut compléter cette interprétation en y ajoutant toute l’œuvre de Christ. C’est par cette œuvre entière, en effet, que Dieu devait réunir toutes choses en Christ. Le verbe ici employé signifie récapituler, ou résumer sous un seul chef.
Un passage tout à fait parallèle de l’épître aux Colossiens (Colossiens 1.20) jette beaucoup de lumière sur la pensée de l’apôtre : « Et de réconcilier toutes choses avec lui, ayant fait la paix par le sang de la croix ». Tels sont le but et le moyen. Mais il reste la question la plus controversée à laquelle ces paroles aient donné lieu : Qu’est-ce que ces toutes choses, tant celles qui sont au ciel, que celles qui sont sur la terre et qui doivent être réunies en Christ ?
Ces termes sont tellement universels, qu’ils font d’abord penser à la création tout entière (le neutre pluriel, ta panta, ne pouvant pas même se restreindre aux créatures intelligentes). Cette idée n’est point étrangère aux enseignements de l’Écriture (Romains 8.19, suivants ; Apocalypse 21.1). Tout doit être renouvelé et restauré en Christ et ce sens se retrouve même dans le verbe composé que nous traduisons ici par réunir ou récapituler.
Ensuite, comme il est évident que ce qui est sur la terre comprend avant tout les hommes pécheurs, de même ce qui est dans les cieux doit comprendre aussi en premier lieu, soit « les esprits des justes parvenus à la perfection », soit les intelligences célestes, les anges de Dieu.
Mais quelle part les anges ont-ils en Christ ? D’abord, il est leur Chef aussi bien que celui de ses rachetés (Éphésiens 1.20 ; Éphésiens 1.21) ; puis, quoiqu’ils n’eussent pas besoin de la rédemption qu’il a accomplie, ils y participent dans ce sens que, toute la famille de Dieu au ciel et sur la terre (Éphésiens 3.15) formant un ensemble plein d’harmonie et d’amour, tous les membres du corps souffrent lorsque quelques-uns souffrent et tous prennent part à la guérison de ceux qui étaient malades, au recouvrement de ceux qui étaient perdus (Éphésiens 3.10 ; Luc 15.7 ; Luc 15.10 ; 1 Pierre 1.12 ; Hébreux 2.14 ; Hébreux 12.22 ; Apocalypse 19.10).
Aussi les chants de l’armée céleste furent-ils les premiers à célébrer la naissance du Sauveur (Luc 2.13 ; Luc 2.14). La rédemption en Christ embrasse donc le ciel et la terre, rapprochés, réconciliés par le rétablissement d’une vie nouvelle, d’un royaume spirituel et éternel. C’est ainsi que, dans un royaume troublé par la révolte d’une province, tout le pays participe à la réconciliation des rebelles, puisqu’il en recueille le repos, la prospérité et que tous s’unissent dès lors par le lien d’une même fidélité et d’un même amour pour leur prince.
La pensée de Paul nous conduit-elle plus loin encore ? Faut-il suivre ceux qui voient dans ces paroles le rétablissement universel, le salut final, non seulement de tous les hommes, mais des anges déchus et de Satan lui-même, qui seraient compris dans les choses qui sont dans les cieux ? (comparer Éphésiens 6.12). À la rigueur, il faut le reconnaître, les termes dont Paul se sert ici peuvent s’étendre jusque-là ; mais le passage parallèle déjà cité (Colossiens 1.20) nous ramène au grand moyen de l’œuvre de Christ, au sang de la croix et l’Écriture nous autorise-t-elle à en étendre l’efficace jusqu’aux anges déchus et à affirmer que tous les hommes voudront ou pourront se repentir un jour pour venir y puiser la réconciliation ? Certaines déclarations de la Parole de Dieu semblent témoigner, hélas ! Du contraire.
N’oublions pas cependant que toute domination doit enfin appartenir au Roi de gloire ; et que le jour doit venir où « Dieu sera tout en tous » (1 Corinthiens 15.28).
En lui complète la grande pensée de Éphésiens 1.10 : en Christ aura lieu la récapitulation de toutes choses. Puis Paul ajoute une pensée nouvelle qui explique la participation des croyants à cette grande œuvre de Dieu.
Les termes de cette pensée peuvent s’entendre de deux manières : « En qui nous sommes devenus son lot, son héritage », ou bien : « En qui nous avons obtenu le lot, l’héritage ». Dans le dernier cas, ces mots font allusion au lot que reçurent les Israélites, par le sort, dans le partage du pays de Canaan, image de l’héritage céleste du racheté de Christ ; dans le premier sens, au contraire, c’est le peuple de Dieu lui-même qui est considéré comme l’héritage, la propriété de l’Éternel (Deutéronome 9.26-29 ; Deutéronome 32.9).
Les versets Éphésiens 1.14 ; Éphésiens 1.18 ci-dessous et surtout Colossiens 1.12, où revient la même pensée, doivent faire préférer le second sens, c’est-à-dire l’idée de la part échue au croyant (Une variante, appuyée par de très fortes autorités, mais non préférable pourtant au texte reçu, porte : « En qui nous avons été appelés »).
Dans le reste du verset, l’apôtre insiste encore sur la pensée que le chrétien n’a part à l’héritage que par un effet de la libre grâce de Dieu. Et cette participation est expliquée par une double action divine et souveraine : l’une qui s’accomplit en Dieu même et par laquelle nous sommes prédestinés selon le dessein arrêté de Dieu ; l’autre qui s’accomplit dans les croyants, dans lesquels c’est Dieu encore qui opère avec efficace (Grec :) la foi, la conversion, toutes les choses qui concernent le salut et la vie chrétienne, selon le conseil de sa volonté (Éphésiens 1.4-5 ; Éphésiens 1.7-8).
L’apôtre revient pour la seconde fois (comparez Éphésiens 1.6) à l’importante pensée que le but de l’élection des croyants est qu’ils servent à manifester la gloire de Dieu, ses perfections, sa miséricorde, sa sainteté, son amour.
On ne saurait trop souvent remettre cette sainte obligation sur la conscience des chrétiens.
Dans les derniers mots du verset, Paul désigne les Juifs (nous), qui ont déjà espéré en Christ auparavant, d’après les promesses de Dieu ; puis, à Éphésiens 1.13, il s’adresse aux païens convertis (vous), qui ont reçu aussi en leur temps « l’Esprit de la promesse » ; les uns et les autres ont part à l’héritage (Éphésiens 1.11) afin qu’ils glorifient Dieu. Il revient souvent dans cette épître à ce parallèle entre ces deux catégories de croyants (Éphésiens 2.1-3 suivants ; Éphésiens 1.17 suivants).
D’autres interprètes refusent de voir dans ces mots (nous, vous) un contraste établi entre les Juifs et les païens et ils traduisent : « Nous qui avons espéré d’avance en Christ », c’est-à-dire pour le jour de sa venue, où nous le glorifierons. Cette opinion peut se soutenir, mais elle est moins conforme à l’ensemble du texte.
Telle est la part des païens convertis (vous aussi). Ils y ont été amenés par la Parole de la vérité. Parole divine, vérité divine, moyen tout-puissant de l’action de Dieu sur les âmes. Et l’apôtre identifie cette parole avec l’Évangile du salut, cette bonne nouvelle qui renferme toutes les bénédictions spirituelles, tous les dons de la grâce gratuite de Dieu, dont l’apôtre a parlé jusqu’ici.
Grec : « En qui aussi ayant cru » ; les uns rapportent ce relatif à Christ, les autres à l’Évangile. Par la foi le chrétien reçoit l’Esprit (l’Esprit de la promesse, c’est-à-dire qui avait été promis), qui régénère et qui est le sceau de Dieu posé sur cette âme devenue sa propriété (2 Corinthiens 1.22).
On peut voir dans ce verset quels sont, pour le croyant, les deux fondements divins et inébranlables de son assurance du salut, les signes de son élection.
D’une part, la PAROLE DE LA VÉRITÉ, l’Évangile du salut, le témoignage de Dieu ; d’autre part, LE SCEAU INTERIEUR DE L’ESPRIT DE DIEU , « rendant témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu » (Romains 8.16).
Toute assurance qui ne repose pas sur ces deux témoignages divins inséparables, n’est qu’une trompeuse illusion.
On peut relever de même quelle est l’œuvre entière du salut d’une âme : l’élection éternelle de Dieu le Père (Éphésiens 1.4 ; Éphésiens 1.11) ; le rachat par le sang de Christ (Éphésiens 1.7) ; le sceau et la sanctification de l’Esprit (Éphésiens 1.13). Toute l’Écriture est remplie de cette profonde révélation du Dieu trois fois saint ; mais ceux-là seuls la reçoivent qui font de ce salut une expérience vivante ; car ce mystère est inaccessible à la spéculation.
Grec : « La rédemption (ou délivrance) de la propriété acquise », c’est-à-dire le peuple de Dieu qui lui appartient en propre, parce que Christ l’a racheté (Ésaïe 43.21 ; Ésaïe 2.14 ; 1 Pierre 2.9).
Jusqu’à l’entière délivrance de ce peuple acquis, jusqu’à ce qu’il parvienne à la perfection, il a pour arrhes, pour gage assuré, l’Esprit Saint (comparer 2 Corinthiens 1.22, note).
C’est cet Esprit Saint qui met Dieu en possession de l’homme en cette vie et qui doit mettre l’homme en possession de Dieu dans la vie future ; qui ébauche ici-bas les traits par lesquels les enfants sont rendus semblables à leur Père céleste et qui finira ce portrait dans sa gloire ; qui commence ici leur délivrance de l’amour servile des créatures et qui l’achèvera en les consommant dans l’amour et dans l’unité du Créateur. Ce n’est pas sans raison que saint Paul nous annonce pour la troisième fois (Éphésiens 1.6 ; Éphésiens 1.12 ; Éphésiens 1.14) que Dieu est jaloux de sa gloire. Gardons-nous bien de la lui disputer, ou de ne la lui pas donner tout entière.
Ayant appris votre foi et votre charité, j’en bénis Dieu constamment et je prie pour vous avec amour (15, 16).
Objet de ces prières : Que notre Père en Jésus-Christ vous donne une connaissance toujours plus complète de la vérité ; que pour cela il illumine les yeux de votre cœur, afin que vous connaissiez toujours mieux, d’une part, l’espérance du glorieux héritage auquel il vous appelle, d’autre part, la puissance infime par laquelle il opère en vous (17-19).
C’est cette même puissance qu’il a déployée en Christ, en sa résurrection et son exaltation au-dessus des plus excellentes créatures, en sorte que, dominateur de toutes choses, il est aussi le Chef de l’Église, qui est son corps, sa plénitude (20-23).
Comme dans la plupart de ses lettres, l’apôtre commence par assurer à ses lecteurs qu’ils sont les objets de ses actions de grâce et de ses prières : le sujet de sa vive reconnaissance pour eux, c’est, d’une part (c’est pourquoi), les immenses bienfaits de la grâce de Dieu qu’il vient d’énumérer avec effusion de cœur (Éphésiens 1.3-12), et dont ses lecteurs aussi ont été enrichis (Éphésiens 1.13 ; Éphésiens 1.14) ; d’autre part, ce qu’il a appris spécialement de leur foi et de leur charité (Éphésiens 1.15), les deux éléments constitutifs de la vie chrétienne (Galates 5.6) L’objet de sa prière, c’est qu’ils soient toujours plus éclairés pour voir la grandeur de leur vocation (Éphésiens 1.17-19) dans la grandeur de la gloire de Jésus-Christ (Éphésiens 1.20-23).
Cette expression vague de Éphésiens 1.15 : ayant entendu, ou appris (comparez Colossiens 1.4), montre que cette épître ne saurait être adressée aux Éphésiens seuls, que l’apôtre connaissait si intimement par son séjour de plusieurs années au milieu d’eux (voir l’introduction).
Le Dieu de notre Seigneur Jésus-Christ, le Dieu qui l’a envoyé, ressuscité, glorifié et qui reste éternellement son Dieu (1 Corinthiens 3.23 ; 1 Corinthiens 15.28 ; comparez ci-dessus Éphésiens 1.3), est le seul vrai Dieu, le seul qui puisse être notre Dieu (Jean 20.17 note) ; il est en même temps le Père de gloire, Celui qui possède la plénitude de toutes les perfections infinies (Actes 7.2) et qui est pourtant uni à nous par le lien le plus intime ; nous, ses enfants, nous pouvons tout lui demander dans nos prières, comme le fait ici l’apôtre.
L’apôtre sait que ceux à qui il parle sont déjà « scellés du Saint-Esprit » (Éphésiens 1.13), et il demande que Dieu leur donne aussi un esprit qui pouvait manquer encore à plusieurs d’entre eux et dans lequel tout chrétien doit faire de continuels progrès : un esprit de sagesse et de révélation.
Plusieurs interprètes pensent que l’apôtre désigne par ces mots le Saint-Esprit lui-même en le nommant d’après la nature de ses opérations et de ses dons (Jean 14.16-17 ; Jean 15.26 ; Jean 16.13 ; Romains 8.2 ; Romains 8.15 ; 1 Pierre 4.14).
Ici il serait appelé l’Esprit de sagesse (expression à peu près synonyme de « l’Esprit de vérité »), parce qu’il est la plénitude de la lumière divine. Et, en tant qu’il manifeste dans le cœur des fidèles ces trésors de vérité, l’apôtre le nommerait l’Esprit de révélation produisant la connaissance de Dieu, de ses perfections, de ses œuvres (Colossiens 1.9).
On peut objecter à cette explication :
Ces premiers mots doivent être intimement liés avec ce qui précède, car ils sont encore l’objet du verbe « qu’il vous donne » (Éphésiens 1.17), en sorte que la construction et le sens littéral peuvent se rendre ainsi : « Qu’il vous donne un esprit de sagesse et de révélation, les yeux de votre cœur éclairés pour que vous sachiez… »
Il faut, en effet, que Dieu nous donne des yeux éclairés (Grec : « illuminés ») pour voir sa sagesse et pour connaître « l’espérance de notre vocation » ; car nos yeux sont par nature « obscurcis de ténèbres » (Éphésiens 4.18).
Au lieu du mot esprit (ou entendement ou pensée) du texte reçu, il faut rétablir ici la variante qui porte votre cœur : « que les yeux de votre cœur soient éclairés ».
Le cœur, d’après l’Écriture, est le siège des affections morales : de lui « procèdent les sources de la vie » dans tous les sens du mot (Proverbes 4.23) ; c’est pourquoi on le trouve souvent placé dans des rapports où, selon nos idées reçues, on aurait plutôt attendu une expression qui désignât nos facultés intellectuelles.
Ainsi Matthieu 13.15 ; Romains 1.21 ; 2 Corinthiens 4.6 et fréquemment ailleurs.
Deux choses également merveilleuses s’offrent à la vue de ceux qui ont les yeux de leur cœur éclairés par le Saint-Esprit :
Cette puissance est telle, que l’apôtre la compare à celle qu’il a fallu pour ramener le Sauveur d’entre les morts et le faire asseoir à la droite de la majesté divine (Éphésiens 1.20).
Ou plutôt, ce n’est point là une comparaison, mais une profonde réalité : la puissance divine de résurrection et de vie par laquelle Jésus-Christ est sorti du tombeau, est la même qui tire un pécheur de la mort spirituelle en le faisant demeurer dans une communion vivante avec Jésus et qui, au dernier jour, lui assurera la vie et la perfection éternelles. Dans tous ces sens, Christ est pour nous la résurrection et la vie (comparer Romains 8.11, note.)
Cette profonde vérité est pour l’apôtre tellement évidente, qu’en parlant en termes accumulés de cette puissance infinie de Dieu envers nous, dont nous sommes les objets, pour nous amener à croire (Éphésiens 1.19), il passe sans transition au déploiement de cette même puissance dans la résurrection de Christ.
Ces deux actes de la puissance divine, ces deux grandes manifestations de la vie divine sont identiques dans l’expérience du chrétien (comparer Éphésiens 2.6). Ceux donc qui ne voient dans la résurrection de Jésus-Christ que le garant extérieur de la nôtre, restent à la superficie du sujet ; et ceux qui n’y voient qu’un fait historique sans importance, n’ont absolument rien compris du christianisme.
Fait asseoir à sa droite, expression figurée, empruntée aux usages des rois de la terre et qui indique la toute-puissance divine donnée au Fils de Dieu après son triomphe (Matthieu 28.18 ; comparez Psaumes 110.1 ; Matthieu 20.21).
Que tous ces titres de dignité empruntés aux pouvoirs d’ici-bas désignent des ordres divers parmi les intelligences célestes ; que nous devions entendre par là seulement les anges restés purs, ou les anges déchus, également assujettis à la puissance du Christ ; que ces noms puissent s’appliquer à des pouvoirs de la terre ou uniquement à des êtres célestes (Philippiens 2.9-11 et surtout Colossiens 1.16-20, notes), quelque idée qu’on se fasse sur ces questions, la grande pensée de l’apôtre doit ici arrêter toute l’attention et cette pensée, c’est que Christ est élevé au-dessus de tout ce qui est créé, de quelque nom qu’on le nomme (Philippiens 2.9), soit dans le temps, soit dans l’éternité : Dieu a mis toutes choses sous ses pieds ! (Psaumes 8.7 ; 1 Corinthiens 15.27)
Tel est l’objet de la contemplation du chrétien, le fondement de son espérance, la source de sa force ; car ce vainqueur tout-puissant est son Sauveur.
Grec : « Et il l’a donné pour Chef sur toutes choses à l’Église ».
Donné signifie, par hébraïsme, établi, institué (Éphésiens 4.11 ; comparez avec 1 Corinthiens 12.28) ; mais ce mot peut très bien aussi retenir son sens ordinaire (Jean 3.16).
Dominateur sur tout l’univers (Éphésiens 1.21 ; Éphésiens 1.22), Christ est, dans un sens spécial, donné pour Chef suprême à l’Église (voir la note suivante).
Ce même Jésus-Christ, ainsi élevé au-dessus de la création tout entière, ayant toute-puissance au ciel et sur la terre, est spécialement le Chef de l’Église : (Colossiens 1.16-18) il en est la tête (Grec :), « elle est son corps »
Cette image, si admirable de justesse et de profondeur, à la fois si facile à saisir et mystérieuse revient souvent sous la plume de Paul (Romains 12.5 ; 1 Corinthiens 6.15 ; 1 Corinthiens 10.16-17 ; 1 Corinthiens 12.12 ; 1 Corinthiens 12.13 ; 1 Corinthiens 12.27 ; Colossiens 1.18 ; Colossiens 1.22 ; Colossiens 1.24). Elle nous fait pénétrer dans le rapport intime, vivant, réel, qui existe entre Christ et son Église. La volonté, la pensée, la vie, tout dépend de la tête, le reste du corps n’est rien sans elle, ne subsiste que par elle. Tel est Christ à l’égard de l’Église.
Cette Église, corps de Christ, est encore appelée ici la plénitude de Celui qui accomplit (ou remplit) tout en tous, c’est-à-dire la plénitude de Christ lui-même.
Comment exposer la pensée profonde de l’apôtre, rendue plus difficile encore par les termes mêmes de l’original et qui tous ont été expliqués de tant de manières différentes ?
L’Église est la plénitude de Christ, dans un sens passif, c’est-à-dire que ce n’est pas elle qui remplit ou complète Christ, comme étant son corps (idée de Calvin et d’autres) ; mais, au contraire, c’est Christ qui la remplit de sa présence, de sa gloire, de toutes ses grâces, de sa vie, en un mot, de lui-même. C’est en elle qu’il manifeste sa gloire, ses perfections, aux yeux de l’univers entier et ainsi il remplit et accomplit tout en tous.
Non seulement il accomplit toute l’œuvre divine en chacun des membres de son corps, jusqu’à ce qu’ils parviennent « à la stature de sa plénitude » (Éphésiens 4.13), mais il remplit la création tout entière (Éphésiens 1.10) et la conduit aux fins voulues par le conseil et la sagesse de Dieu (Éphésiens 1.21 ; Éphésiens 1.22 ; Colossiens 1.16-18).
D’autres entendent par « Celui qui remplit tout en tous » Dieu le Père, dont la plénitude de la divinité habite en Christ et en son Église (Colossiens 2.9 ; Éphésiens 3.19). Cette pensée est vraie au fond et dans les résultats définitifs de la rédemption ; mais l’ensemble de notre passage, son sens immédiat conduit plutôt à l’interprétation indiquée d’abord, car évidemment l’apôtre y décrit les rapports profonds, l’unité vivante de Christ et de l’Église, qui est son corps et sa plénitude.
Jésus-Christ retrace (reproduit) sa vie et accomplit de nouveau ses mystères dans son corps mystique ; c’est lui qui souffre dans les martyrs, les malades, les pauvres, etc., qui prie et gémit, qui est humble, doux, obéissant et charitable dans ses membres et qui s’accomplit en eux selon qu’il l’est dans son corps naturel. Ô accomplissement parfait du Christ entier ! quand sera-ce que nous vous verrons ?