Verset à verset Double colonne
1 Et l’Éternel parla à Moïse en disant :L’unité de ces préceptes si variés se trouve dans l’idée de la sainteté de Dieu qui doit se refléter dans celle de son peuple. Ce recueil de prescriptions diverses a pour but d’inculquer au peuple certains commandements déjà donnés en les entremêlant de quelques adjonctions propres à les compléter.
L’idée du Dieu saint n’est pas, comme on l’a prétendu, le produit le plus excellent de la civilisation d’Israël ; elle en est le principe. Elle est, dès le début, inhérente au mosaïsme. Les derniers mots du verset 2 sont un refrain qui revient huit fois dans ce chapitre sous sa forme complète et huit fois sous une forme abrégée.
Sa mère et son père. La mère est placée la première, selon plusieurs, parce que dans les pays où règne la polygamie, le père étant en quelque sorte le chef de plusieurs familles, la mère est en rapport plus particulier avec ses propres enfants. Mais la polygamie, quoique autorisée, n’était pas régnante en Israël. Il est plus simple d’expliquer la priorité accordée à la mère, soit par l’intention de la relever dans un temps où la subordination de la femme était plus fortement accentuée que de nos jours, soit par la raison que le père inspire naturellement plus de crainte que la mère.
La réunion du quatrième et du cinquième commandement dans le même précepte provient de leur rapprochement dans le Décalogue.
Ce verset réunit également deux commandements (le premier et le deuxième).
De manière à être agréés : sans commettre aucune des irrégularités qui pourraient en faire une offense à Dieu. De telles irrégularités pouvaient facilement se produire à l’occasion du repas de famille qui terminait ces sacrifices.
La viande ne pouvait être mangée que le jour du sacrifice ou le suivant dans les cas de vœu ou d’hommage. Dès ce moment le reste devait être brûlé (Lévitique 7.15-18).
Ces préceptes se rapportaient surtout aux devoirs envers Dieu (première table). Les suivants, versets 9 à 18, se rapportent plutôt aux relations avec le prochain (deuxième table).
Cinq recommandations en faveur des indigents, aboutissant à ce refrain : Je suis l’Éternel, ton Dieu !
Quand vous ferez, cela s’adresse à tout le peuple ; tu n’iras pas : cela est dit à chaque Israélite. Le Talmud fixe l’étendue de la portion qui doit être laissée intacte à la soixantième partie du champ.
Tu ne glaneras pas. Deutéronome 24.19 parle même de poignées d’épis oubliées en moissonnant. C’est là comme un droit donné au pauvre par la loi.
Vigne. Le mot hébreu comprend vignes et vergers. Défense de compléter la première cueillette sur l’arbre ou sur le cep par une seconde et de ramasser les fruits accidentellement tombés sur le sol. Le Deutéronome (Deutéronome 24.19-22) mentionne spécialement l’olivier.
Au pauvre et à l’étranger. L’étranger, n’ayant pas d’ordinaire de possession territoriale en Palestine, est assimilé au pauvre.
On voit comment la simple dénégation conduit aisément au faux serment (en cas de dépôt, de trouvaille, etc.)
Tu ne fouleras point… Au verset 11, il s’agissait de fraude ; ici, de violence, d’abus de la force ou de la position.
Fouler : détenir ce que l’on doit à l’autre ; dépouiller : arracher à l’autre ce qu’il possède.
Du journalier. Deutéronome 24.15 développe cette recommandation ; le journalier indigent peut avoir besoin de son salaire le jour même. Il y a littéralement : Le salaire du journalier ne passera pas la nuit chez toi.
Toujours l’oppression du faible par le fort.
Un sourd. N’entendant pas le mal qu’on dit de lui, il ne peut se justifier.
Un aveugle. Ici la lâcheté va jusqu’à la perfidie.
Crainte de ton Dieu. Lui, entend et voit et il est vengeur du faible sans défense.
Vous ne commettrez point d’injustice : soit en absolvant le coupable, soit en condamnant l’innocent, qu’il appartienne aux grands ou aux petits.
Selon la justice : en faisant abstraction de l’intérêt qu’inspire le pauvre comme de la crainte qu’inspire le grand. Le vous est adressé au peuple entier dans la personne de ses magistrats,
Ne pas se porter faussement en accusateur contre le prochain, surtout quand il y va de sa vie. Le Talmud explique : Tu ne resteras pas inactif en voyant la vie de ton prochain menacée. Comparez Exode 23.1-7
Dans ton cœur : la loi va plus loin que les actes. Elle indique déjà la voie que Jésus a poursuivie jusqu’au terme, Matthieu 5.21-22
Ne pas reprendre le prochain, est un manque d’amour. On se charge soi-même du péché dont on ne le reprend pas.
Souvent, tout en renonçant à se venger, on s’en dédommage en gardant dans son cœur une sombre rancune.
Ton prochain comme toi-même : comme faisant partie, aussi bien que toi-même, du peuple aimé de Jéhova. Un tel amour pour soi-même n’est plus l’amour naturel. C’est un amour de nature supérieure qui peut s’appliquer au prochain dans le même sens qu’à nous-mêmes.
Cette idée était préparée par l’expression précédente : les enfants de ton peuple.
Au verset 34 ce précepte est étendu même aux étrangers, tant la loi visa dès l’abord à un universalisme qui dépassait la limite théocratique.
Ce précepte est le couronnement des développements relatifs à la seconde table donnés dans ce morceau.
Série de défenses qui ne se rapportent à aucun commandement du Décalogue et sont plutôt des règles en rapport avec l’ordre de la nature
Mes ordonnances : soit qu’elles aient déjà été formulées, soit qu’elles ressortent de la volonté divine manifestée par des lois de nature. Trois exemples suivent. Comparez Deutéronome 22.9-11
Il ne faut pas mêler ce que Dieu a séparé. C’est le dénaturer ! Une telle désorganisation est inconvenante chez un peuple qui adore comme son Dieu le Dieu de la nature.
Une femme, même en état d’esclavage, ne peut être dégradée à l’état de chose. Celui qui abuse d’elle, doit être puni avec elle, non de mort, comme les adultères, mais d’un châtiment qui est sans doute celui du fouet. Puis, comme il y a eu atteinte à la propriété du prochain, un sacrifice de réparation doit être offert par le coupable.
Unie à un autre homme : comme sa concubine ou comme étant à son service.
Ordonnance donnée, comme déjà plusieurs autres (Lévitique 14.34 ; Lévitique 18.27, 20.22), en prévision de l’établissement en Canaan.
La traduction littérale du verset 23 serait : Vous traiterez comme prépuce (chose impure) le prépuce de chacun de ces arbres (en ne mangeant pas le fruit de ces premières années) pendant trois années il sera pour vous incirconcis. Les fruits des premières années sont en général de moindre qualité et ne peuvent par conséquent être offerts à Dieu. Ceux de la quatrième seulement sont dignes de lui être consacrés (et de revenir par là aux sacrificateurs).
Consacrés avec reconnaissance. L’expression signifie littéralement : il vous sera sainteté de louanges à l’Éternel. C’est-à-dire : Vous en jouirez saintement en l’offrant à l’Éternel.
De telle sorte que Dieu puisse bénir votre fidélité en continuant à multiplier les fruits de vos vergers.
Avec le sang. Cette traduction ne fait dire à notre verset que ce qui a déjà été dit Lévitique 7.26 ; Lévitique 17.10 ; Genèse 9.4. Comparez 1 Samuel 14.33 et suivants. Mais la traduction littérale serait : près du sang et l’on pourrait voir ici une allusion à la coutume de certains païens (les Zabiens) qui, pour fraterniser avec les esprits auxquels la victime était consacrée, mangeaient sa chair en se groupant autour d’un vase renfermant son sang.
Aucune sorte de divination ou de magie. Ne pas chercher à deviner l’avenir par l’évocation des morts (1 Samuel 28) ou par quelque espèce de présage (Genèse 44.5 ; Ésaïe 2.6 ; Ésaïe 57.3).
Vous… tu… La loi s’adresse tour à tour à tous et à chacun.
Vous ne tondrez pas en rond. Jérémie 9.26 ; Jérémie 25.23. Plusieurs peuples anciens, certaines tribus arabes en particulier, pratiquaient cette coutume en l’honneur d’une divinité.
Tu n’enlèveras pas… Niebuhr rapporte que les Arabes se coupent la moustache. Mais ne s’agit-il pas ici plutôt des favoris ?
Pour un mort, littéralement pour une âme, une personne. Lévitique 21.11. Les Nombres et le Deutéronome présentent l’expression plus complète : une âme morte (Nombres 6.6 ; Deutéronome 14.4).
L’usage en question était répandu chez les anciens, Philistins, Babyloniens, Arméniens, Scythes, Romains ; il l’est encore chez les Persans et les Arabes ; il l’était même chez les Juifs au temps de Jérémie, malgré la loi (Jérémie 16.6 ; Jérémie 41.5). Le deuil chez le peuple de Dieu ne doit avoir rien de désordonné.
Point de figures, littéralement : d’écriture par piqûre. Ce n’est plus ici un signe de deuil ; il s’agit de la coutume du tatouage qui existe encore en Égypte, en Arabie et chez plusieurs peuples sauvages. Un membre du peuple de Dieu doit respecter son corps et ne pas le défigurer de la sorte.
Autre mode de dégradation plus grave, dont la conséquence serait l’accroissement de la corruption des mœurs dans la terre consacrée à Dieu.
L’observation du sabbat et la fréquentation du sanctuaire sont les moyens les plus efficaces de prévenir l’invasion des coutumes païennes dont il vient d’être parlé et de maintenir en Israël une vie digne de sa relation particulière avec l’Éternel.
Le peuple qui respecte le sabbat et fréquente le sanctuaire du Dieu vivant, ne recourra pas à l’évocation des morts et à la consultation des devins pour diriger sa conduite. Comparez 1 Samuel 28.7.
Sur les deux termes évocateurs et devins, comparez Ésaïe 8.19, note. Dans ce passage, Ésaïe adresse les Israélites à la loi et au témoignage, comme le législateur les renvoie ici au sabbat et au sanctuaire.
Le respect de la vieillesse fait partie du respect pour tout ce qui est saint, pour Dieu lui-même ; comparez Job 29.8. Cette vertu, en honneur déjà chez plusieurs peuples anciens (Égyptiens, Athéniens, Romains), l’est encore aujourd’hui en Orient.
Comparez Exode 22.21 ; Exode 23.9. Ici le précepte dépasse de beaucoup ce qui avait été dit jusqu’alors. Il ne suffit pas de ne pas opprimer, il faut aimer. Il fallait la parole du verset 18 pour servir de base à une recommandation qui distingue si profondément Israël des usages régnant chez les peuples anciens. On sait que le dédain et la haine des étrangers étaient l’un des fléaux du monde antique ; c’est une des gloires de la loi mosaïque d’avoir ainsi brisé les cadres étroits du patriotisme.
Poids, proprement pierres. On employait et on emploie encore aujourd’hui en Orient des cailloux en guise de poids.
Epha et hin : mesures de contenance, l’une pour les solides, l’autre pour les liquides ; voir à Exode 29.40.
Comparez les reproches des prophètes à ce sujet : Amos 8.5 ; Michée 6.10. Voir aussi Proverbes 16.11 ; Proverbes 20.10 ; Proverbes 20.23.