Verset à verset Double colonne
Ce chapitre n’est pas destiné à énumérer toutes les fêtes solennelles que devaient célébrer les Israélites, mais seulement celles dans lesquelles le peuple était convoqué en sainte assemblée dans le sanctuaire (verset 3). C’est pourquoi il n’est pas parlé des nouvelles lunes ou fêtes du premier jour de chaque mois. Il est évident que l’accomplissement de plusieurs de ces prescriptions (celle de l’assemblée du peuple au jour du sabbat, par exemple) ne pouvait avoir lieu qu’à l’époque du désert où le peuple était encore groupé autour du Tabernacle. Plus tard, quand le peuple fut dispersé sur une vaste étendue de pays, il y fut pourvu d’une autre manière, comparez 2 Rois 4.23, qui montre en même temps que dans le royaume des dix tribus, l’usage d’une convocation sainte dans les jours de nouvelles lunes s’était aussi établi sous l’influence des prophètes.
Ce même sujet est traité chapitres 28 et 29 des Nombres, mais au point de vue des sacrifices à offrir. Deutéronome chapitre 16 ne relève que les trois grandes fêtes annuelles (Pâques, Pentecôte et Tabernacles), parce que l’auteur a en vue les pèlerinages (verset 16).
Sept époques de saintes assemblées :
Conclusion, versets 37 et 38.
Appendice sur la célébration de la fête des Tabernacles, versets 39 à 44.
Saintes convocations. Lorsque l’assemblée se tenait au Tabernacle, il est possible que le culte se bornât aux sacrifices. Cependant l’expression employée paraît désigner quelque chose de plus. Et lorsque, plus tard, les assemblées durent se tenir, comme celles du jour du sabbat, dans les diverses localités du pays, il faut bien qu’elles fussent consacrées à quelques exercices religieux, tels que la lecture de la loi, les chants et les prières. Ce fut sans doute là l’origine de l’institution des synagogues qui paraît avoir précédé l’exil ; comparez Psaumes 74.4-8 et 2 Rois 4.23.
Au jour du sabbat.
Repos complet, littéralement : repos du repos. Le mot schabbathon se trouve pour la première fois dans Exode 20.8 et l’expression complète : schabbath schabbathon, Exode 21.15, où nous l’avons rendue par : un jour de complet repos. Elle est appliquée au sabbat (Exode 35.2-3), au jour de l’Expiation (Lévitique 16.31 et dans notre chapitre verset 32) et à l’année sabbatique (Lévitique 25.4), qui sont les fêtes d’origine mosaïque.
Dans tous les lieux que vous habiterez, c’est-à-dire : dans tous les districts de la terre d’Israël. Cette traduction est plus exacte que celle qui a été employée Exode 35.3 : dans toutes vos demeures.
La reprise : Voici les fêtes (les fêtes annuelles), provient de ce qu’à proprement parler, le sabbat n’est point une de ces fêtes dont il doit être parlé dans ce morceau. Il a seulement été rappelé en passant, afin qu’il soit bien entendu qu’on ne l’oublie pas comme devant être aussi un jour de convocation sainte.
En leur saison : au temps marqué pour chacune d’elles dans le cours de l’année religieuse.
Le quatorzième du mois : ainsi à la première pleine lune de l’année.
Dans la soirée : voir Exode 12.6. Chez les Grecs, les Romains et les anciens Germains, on regardait les pleines lunes comme une époque portant bonheur. Les jeux olympiques s’ouvraient le lendemain de la pleine lune. On rencontre aussi chez les Germains et les Celtibères des usages analogues.
Aucune œuvre servile. Défense moins sévère que verset 3, n’interdisant que les gros travaux, comme ceux de la culture du sol, mais autorisant la cuisson des aliments, qui était défendue le jour du sabbat (Exode 35.3). Comparez Exode 12.16.
Des sacrifices. Ce sujet sera repris plus spécialement Nombres 28.
Septième jour : dernier de la fête.
Cette ordonnance comprend trois prescriptions :
Quand tous serez entrés : expression caractérisant la législation du désert.
Une gerbe : d’après Josèphe et Philon, une gerbe d’orge. Dans les parties les plus chaudes de la Palestine l’orge est déjà mûre au milieu d’avril ou au commencement de mai, tandis que le froment ne mûrit que trois semaines plus tard.
Les Romains ouvraient la moisson en offrant des sacrifices, spécialement à Cérès. Cet hommage de reconnaissance et de dépendance ne pouvait manquer chez le peuple de Dieu. Le texte n’indique pas ce qu’on faisait de la gerbe après l’avoir balancée devant l’autel ; il est probable que, comme les autres offrandes balancées, elle appartenait aux sacrificateurs.
Le lendemain du sabbat. De quel sabbat ? On a répondu de diverses manières : du sabbat hebdomadaire qui tombait dans la semaine pascale ; ou bien du premier sabbat rentrant dans l’époque de la moisson. Il est plus naturel de penser au jour sabbatique dont il vient d’être parlé, verset 7, le 15 nisan, premier et grand jour de la fête pascale. C’est ainsi que les Juifs l’ont compris, puisqu’il est de fait qu’ils offraient la gerbe sacrée le 16 nisan. Cela s’accorde avec Josué 5.11 où les Israélites commencent depuis ce jour à manger des pains faits avec le grain de Canaan. Cela s’accorde enfin avec le verset 15 qui établit un intervalle de 49 jours jusqu’à la Pentecôte (cinquantième jour). Le point de départ naturel de ces cinquante jours est le jour de la Pâque.
À la gerbe des prémices devait s’ajouter un holocauste comme sacrifice de consécration, avec oblation et libation, et cela, en sus des holocaustes que Nombres 28.19 prescrira pour chaque jour de fête.
Agneau d’un an : Exode 12.6.
Deux dixièmes : Nombres 15.4-5 ne prescrit, en cas d’holocauste, qu’un dixième par agneau. Mais ici, où il s’agit d’une fête de moisson, il convient que l’oblation de farine soit plus abondante que dans les autres solennités.
Le quart d’un hin : voir à Exode 29.40.
Jusqu’à ce que Dieu, le vrai propriétaire du sol, eût reçu sa part de la récolte, il ne convenait pas que personne en mangeât. Chez les Égyptiens, les Grecs et les Romains, on ne mangeait des fruits nouveaux qu’après en avoir rendu grâces aux dieux et en avoir offert les prémices aux prêtres. Ces prémices offertes au nom de toute la nation sont différentes de celles qu’offraient les simples particuliers (voir Nombres 18.12).
Sept semaines. Le cinquantième jour en comptant depuis l’offrande de la première gerbe ; de là le nom de Pentecôte qui ne se trouve pas dans l’Ancien Testament mais seulement dans les Apocryphes et dans le Nouveau Testament. Dans l’Ancien Testament cette fête est appelée Exode 34.22 la fête des Semaines ; Exode 23.16 la fête de la moisson et Nombres 28.26 le jour des prémices.
Il y avait un rapport si étroit entre cette fête qui marquait la clôture de la moisson et celle qui en marquait le commencement, qu’elle n’est distinguée de la précédente par aucune formule d’introduction. L’idée de faire de la fête de Pentecôte une commémoration du don de la loi (d’après Exode 19) ne date chez les Juifs que du moyen-âge.
Une oblation nouvelle : de froment nouveau. En Palestine, la moisson du froment se fait quelques semaines après celle de l’orge, en général dans la seconde moitié de mai et au commencement de juin.
L’offrande consistait non en froment, mais en pain, ce qui était naturel puisque la moisson était à sa fin. C’étaient des pains levés, car ils représentaient la nourriture habituelle du peuple.
Des lieux où vous habiterez. Ces mots ne peuvent pas signifier que les deux pains devaient être offerts par chaque famille israélite. Qu’auraient fait les sacrificateurs d’une telle quantité de pain ? Il en est de ces pains comme de la gerbe, qui était une offrande nationale et par conséquent unique. Seulement ils devaient être donnés, non par le sacrificateur, mais par la communauté israélite elle-même et pris de pains fabriqués à la maison, comme ceux que mangeaient les simples particuliers.
À cet hommage national de reconnaissance doit s’ajouter, comme dans le cas de la gerbe, un holocauste national en signe de consécration. Les victimes sont dans ce cas particulièrement abondantes, comme il convient à un peuple qui vient de remplir ses greniers des dons de Dieu.
Le sacrifice pour le péché devait rappeler à Israël les péchés qu’il avait commis fréquemment dans l’usage des dons de Dieu et le mettre en garde contre de nouveaux abus dans la jouissance des dons nouveaux qui venaient de lui être accordés.
En sacrifice d’actions de grâces. C’est ici le seul cas où un sacrifice de ce genre soit prescrit par la loi pour la nation tout entière. Ordinairement les victimes d’actions de grâces étaient mangées par l’Israélite qui les avait offerts mais, comme c’est ici le peuple qui les donne, elles peuvent revenir au sacrificateur.
Par cet ensemble de rites, toute la moisson, depuis les premiers épis d’orge jusqu’aux derniers de froment, se trouve placée sous la bénédiction du Seigneur et le pain quotidien de chaque famille israélite devient un pain qu’elle reçoit de son Dieu et qu’elle partage avec lui.
Recommandation déjà faite, mais rappelée en passant, de sanctifier la moisson non seulement par le sacrifice, mais aussi par la bienfaisance (Lévitique 19.9).
Nous avons dit que dans l’ordonnance du chapitre 23 il n’est pas parlé de la fête mensuelle des nouvelles lunes à chaque premier jour du mois (comparez Nombres 10.10 ; Nombres 28.11-15. Cependant il est une nouvelle lune d’un caractère tout particulier et qui se trouve faire ici l’objet d’une prescription importante.
Le repos et la sainte convocation n’avaient pas lieu dans les autres fêtes de nouvelles lunes qui n’étaient signalées que par le son des trompettes et un double holocauste. La raison de cette différence est que cette nouvelle lune ouvrait le 7e mois dans le cours duquel se célébraient le grand jour des Expiations et la fête des Tabernacles. Cette double circonstance donnait au septième mois tout entier un caractère très solennel et en quelque sorte très sabbatique. De là la solennité spéciale qui s’attache au premier jour de ce mois. Après l’exil et surtout depuis l’époque des Séleucides, les Juifs célébrèrent ce premier jour du septième mois comme leur nouvel an, le commencement de l’année civile ; mais ici rien de pareil n’est indiqué et Exode 12.2 s’oppose à une telle supputation.
Fanfare : il s’agit d’un cor en forme de corne de bélier et non des trompettes d’argent, avec lesquelles on donnait divers signaux (Nombres 10.2-9) et qui annonçaient les nouvelles lunes ordinaires (Nombres 10.10).
Un rappel : rappelant au peuple le commencement de la fête. Il est remarquable que Nombres 28.11 indique pour les nouvelles lunes ordinaires un sacrifice plus grand (deux veaux) que Nombres 29.2 ne le fait pour la nouvelle lune si solennelle du septième mois. Mais il faut admettre que ce sacrifice d’un veau est en sus du sacrifice régulier de deux veaux, comme celui-ci était en sus de l’holocauste journalier d’un agneau.
Voir sur les cérémonies de ce jour Lévitique 16. Les deux points relevés ici avec insistance sont le repos absolu et le jeûne ou mortification. Les violateurs de ces deux prescriptions sont menacés de mort.
Or : en hébreu ak : seulement. Cette conjonction signale l’ordonnance suivante comme particulièrement importante.
Vous vous mortifierez : par le jeûne. C’était là le seul jeûne imposé par la loi de Moïse.
D’un soir jusqu’à l’autre : un jour civil complet et non pas seulement le jour naturel, allant du matin au soir.
Votre repos : ce repos qui vous est imposé et qui est pour vous un bienfait.
Cette fête des Tabernacles porte Exode 23.16 et Exode 34.22 le nom de fête de la récolte. Chacun des sept jours (du 15 au 21 Tischri) était solennisé par des sacrifices (Nombres 29.13) ; comparez à la fin du chapitre, versets 39 à 43.
À la fête de clôture.
La fête des Tabernacles ne durait que sept jours, comme celle de Pâques. Mais elle était suivie d’un huitième jour férié qui se nommait la clôture, parce qu’il fermait non seulement cette semaine de fête, mais encore tout le cycle des fêtes annuelles. Comme ce jour n’appartenait plus à la fête proprement dite, le nombre des victimes offertes était inférieur, à celui des jours précédents (Nombres 29.36).
Conclusion des ordonnances du chapitre 23 relatives aux fêtes qui doivent être marquées par une sainte convocation.
Voir les versets 3, 4, 8, 21, 24, 27, 35 et 36. Le sabbat, comme nous l’avons constaté par la forme même du texte, n’y est rappelé qu’en passant (verset 38), parce qu’il ne fait pas partie des fêtes annuelles (mohadim).
Sacrifices faits par le feu. Le sacrifice pour le péché, n’étant indiqué que pour un seul cas (verset 19), n’est pas spécialement relevé dans cette récapitulation.
Holocaustes, oblations, victimes (d’actions de grâces) : ce sont les trois formes des sacrifices faits par le feu (ischsché).
Libation : l’accompagnement ordinaire des ischsché.
Appendice sur la fête des Tabernacles.
Or : voyez verset 27. La liste des convocations saintes est terminée ; le législateur ajoute exceptionnellement quelques détails sur la manière de célébrer la fête des Tabernacles et sur le souvenir qu’elle doit perpétuer. Cette adjonction se justifie aisément. Cette fête importante n’avait point encore été réglementée comme celle de Pâques dans Exode 12, celle de Pentecôte dans Exode 34.22 et celle du jour des Expiations dans Lévitique 16. Cette lacune devait être remplie.
Quand vous récolterez. Il faut plutôt traduire ainsi : Quand vous aurez récolté. Car la récolte des olives, des grenades et même du raisin ne se fait guère, du moins au nord de la Palestine, qu’en octobre. Aussi Jéroboam déplaça-t-il cette fête en la retardant d’un mois entier (1 Rois 12.32-33).
Les produits de la terre, ou, comme il est dit Deutéronome 16.13, de l’aire et de la cuve : les graines de l’été et les fruits de l’automne (raisins. olives, dattes, grenades).
De beaux fruits d’arbres : des branches d’arbres chargées de beaux fruits (oranges, citrons).
Touffus : avec un riche feuillage pour ombrager.
Saules de rivières : formant la charpente des cabanes. Plus tard (2 Maccabées 10.6), on se servit de ces branchages pour les porter en joyeuses processions. Mais ce n’était certainement pas leur destination première. Comparez Néhémie 8.15.
Les cabanes étaient dressées dans les cours des maisons, sur les places publiques ou dans les rues. Tout le pays prenait ainsi un air de fête.
Vous vous réjouirez. Le caractère de cette fête devait être la joie, en face des celliers et des greniers remplis par la bonté de l’Éternel. Les mots devant l’Éternel suffisent pour faire sentir le caractère saint de cette joie.
Vous demeurerez dans des cabanes… Chez plusieurs peuples anciens (chez les Syriens en mai, chez les Hindous en août, chez les Romains en mars), on célébrait, durant quelques jours, une fête des tentes. Le fait que dans certaines localités, comme à Hébron, au moment de la vendange, les habitants demeurent dans les vignes pour accélérer le travail, ne peut expliquer une fête nationale telle que celle-ci.
Cette habitation sous des tentes devait rappeler plus tard au peuple le voyage de ses pères à travers le désert sans autre abri contre l’ardeur du soleil et les intempéries de la mauvaise saison que de simples tentes mais en même temps elle faisait ressortir très vivement le contraste de cette situation pénible avec l’établissement qui lui était échu dans une terre enrichie de toutes les bénédictions divines.
Pour vos descendants : cette signification nationale de la fête explique pourquoi l’indigène seul était astreint à la célébrer : tout ce qui est né en Israël, (verset 42).
On comprend par là aussi pourquoi les Juifs postérieurs y introduisirent, plus tard des rites, tels que celui de la libation d’eau puisée à la source de Siloé (en souvenir du manque d’eau et du don de l’eau du rocher) et l’illumination des parvis par les deux grands candélabres (en souvenir du feu qui resplendissait la nuit dans la nuée).