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Luc 16
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

Plan du commentaire biblique de Luc 16

La parabole

  1. La faute de l’économe. Sa destitution. Un homme riche a un intendant dont les malversations lui sont dénoncées. Il le somme de rendre compte et le relève de son poste (1, 2).
  2. Sa prompte résolution. L’économe examine les divers partis qu’il lui reste à prendre et reconnaît que le meilleur est de s’assurer des amis qui le reçoivent dans leurs maisons. Il fait venir les débiteurs de son maître et leur dit d’écrire de nouveaux billets, sur lesquels leurs dettes sont réduites dans des proportions diverses (3-7).
  3. La louange du maître. Le maître loue l’habileté de son intendant. Jésus propose celle-ci en exemple à ses disciples et leur fait observer qu’ils sont, pour la prudence, inférieurs aux enfants de ce siècle (8).
  4. Conseil donné aux disciples. Qu’ils emploient les richesses injustes à se faire des amis qui les reçoivent dans les tabernacles éternels (9).

Réflexions faisant suite à la parabole

La fidélité dans les petites choses est le gage de la fidélité dans les grandes. Qu’ils soient fidèles dans les richesses injustes, dans ce qui est à autrui et ils recevront les richesses véritables, qui leur appartiendront en propre. Impossibilité de servir deux maîtres (10-13).

1 Or il disait aussi à ses disciples : Il y avait un homme riche, qui avait un économe, et celui-ci lui fut dénoncé comme dissipant ses biens.

Deux paraboles sur l’usage des biens de ce monde

Versets 1 à 13 — La parabole de l’économe infidèle

Ses disciples : ce terme ne désigne point les apôtres seuls, ni exclusivement les adhérents dont Jésus était suivi dans ce voyage à Jérusalem, mais bien les divers auditeurs qui ont entendu les paraboles du chapitre précédent.

C’est ce que prouve déjà cette tournure si familière à Marc et à Luc : or il disait aussi, qui indique toujours une idée nouvelle, un enseignement nouveau, venant s’ajouter, dans le même discours, à ce qui a précédé. Jésus est donc encore entouré de ses disciples ordinaires, des pharisiens dont il a confondu les murmures (verset 14 ; comparez Luc 15.2) et des péagers qui s’approchaient de lui pour l’entendre (Luc 15.1).

C’est à tout cet auditoire que Jésus adresse deux paraboles sur l’emploi des biens de la terre. Cet enseignement était nécessaire, soit aux pharisiens, qui, à l’orgueil, joignaient l’avarice (verset 14) ; soit aux péagers dont plusieurs possédaient des richesses acquises d’une manière plus ou moins injuste ; il présentait à tous l’esprit de la vie nouvelle, qui résulte de la réconciliation avec Dieu, dans son opposition avec une des principales tendances du pharisaïsme : (verset 14) l’amour de l’argent. Les versets 14-18, qui se trouvent entre les deux paraboles, ne sont qu’une sorte d’introduction à la seconde (verset 19 et suivants).

La parabole de l’économe infidèle qui va nous occuper d’abord, est, sans contredit, la plus difficile que Jésus ait prononcée. L’application qu’en fait le Sauveur (versets 9-13) présente elle-même des pensées dont le sens n’est pas évident. Aussi, si l’on en excepte l’Apocalypse, est-il peu de parties de l’Écriture sur lesquelles les commentateurs aient émis des interprétations plus diverses. Nous nous bornerons à indiquer celles qui peuvent avoir quelque valeur et à exposer ce qui nous paraît être la pensée de la parabole.

Dans le sens littéral, le récit qui s’ouvre par ces mots est simple et clair (voir l’analyse). Mais il en est autrement, dès qu’on cherche sa signification religieuse et morale.

Ainsi, tout d’abord, que représente cet homme riche ? Selon tel interprète, il n’est là que comme personnage de la parabole et n’a pas d’équivalent dans la vie réelle (de Wette, Ebrard, Weiss) ; selon tel autre, ce serait l’empereur ou les Romains, pour le compte desquels les péagers administraient les impôts (Schleiermacher). Olshausen voit dans ce personnage le diable, Meyer en fait Mammon lui-même, dont l’économe doit quitter le service pour se donner au service de Dieu (verset 13).

Ces exemples suffisent. À quelle hauteur on s’élève immédiatement, quel sentiment de responsabilité naît aussitôt dans le cœur et quelle lumière se répand sur toute la parabole, si l’on voit, dans ce grand propriétaire, Dieu lui-même, la source et le dispensateur de tous les biens, celui à qui tout homme doit rendre compte !

Il n’y a pas alors à se demander qui est l’économe (administrateur, intendant). C’est chacun de nous, qui doit se considérer devant Dieu, non comme le possesseur, mais comme l’administrateur de tous les biens qui lui sont confiés.

Jésus ne dit pas de quelle manière l’économe de la parabole dissipait les biens de son maître ; cela importe peu ; mais ce qui n’est pas douteux, c’est que tout homme qui s’approprie les biens qui lui sont prêtés, qui les fait servir à son égoïsme, à son orgueil, à ses plaisirs, en oubliant Celui qui est le vrai propriétaire, dissipe ce qui lui a été confié dans un tout autre but.

2 Et l’ayant appelé, il lui dit : Qu’est-ce que j’entends dire de toi ? Rends compte de ton administration ; car tu ne peux plus administrer.

Il n’est pas dit par qui l’économe fut accusé d’infidélité. Son maître sait tout, il le fait venir, lui demande (grec) le compte de son administration et lui annonce sa destitution.

Comme, pour produire ce compte, il faut à l’économe un certain temps, il va en profiter sans perdre un instant, pour se tirer d’embarras.

3 Mais l’économe dit en lui-même : Que ferai-je, puisque mon maître m’ôte l’administration ? Labourer, je ne le puis. Mendier, j’en ai honte. 4 Je sais ce que je ferai, afin que, quand je serai destitué de l’administration, ils me reçoivent dans leurs maisons.

Ce monologue est admirable de précision et de finesse. L’économe ne se laisse pas troubler, il réfléchit, se parle à lui-même, pèse et rejette les moyens dont il ne veut pas ; puis, tout à coup, il s’écrie : Je sais (grec j’ai connu).

Sa pensée est tombée sur certaines gens qu’il désigne seulement par ils, qui pourront lui être utiles et que la suite du récit va mettre en scène. Ce qui lui donne tant de savoir faire et d’énergie, c’est qu’il a pris au sérieux la destitution annoncée : quand je serai démis, ils me recevront dans leurs maisons.

5 Et ayant appelé à lui chacun des débiteurs de son maître, il dit au premier : Combien dois-tu à mon maître ?

Grec : « il fit venir un chacun des débiteurs de son propre maître ».

Ces termes signifient d’une part qu’il les fit venir tous l’un après l’autre, bien que la parabole n’en mentionne ensuite que deux comme exemples de sa manière de procéder avec eux.

D’autre part, le mot : son propre maître, fait sentir comment cet administrateur, après avoir déjà fraudé son propriétaire, sut encore se tirer d’embarras à ses dépens.

6 Et il dit : Cent mesures d’huile. Mais il lui dit : Reprends ton billet, assieds-toi, et écris promptement cinquante.

Il s’agit du bath hébreu, égal au métrète attique et qui contenait environ 40 litres. La remise de cinquante baths (2000 litres) était donc considérable.

Cette huile avait été achetée à diverses reprises par le débiteur, qui en faisait commerce et qui laissait un billet entre les mains de l’économe. Celui-ci rend son billet au débiteur en l’invitant à changer le chiffre ou plutôt à faire un nouveau billet. Tout cela se fait promptement (grec aussitôt).

7 Ensuite il dit à un autre :
Et toi, combien dois-tu ? Celui-ci répondit : Cent mesures de blé. Il lui dit : Reprends ton billet, et écris quatre-vingts.

Grec : cent cors de blé.

Le cor, mesure pour les matières sèches, équivalait à 10 baths.

L’économe diminue de vingt pour cent cette valeur, au profit du débiteur. La différence qu’il fait entre celui-ci et le premier, montre qu’il avait égard aux circonstances de fortune où pouvaient se trouver ces hommes, qu’il connaissait parfaitement. Partout se montre la même habileté (verset 8).

8 Et le maître loua l’économe injuste de ce qu’il avait prudemment agi ; car les fils de ce siècle sont plus prudents que les fils de la lumière dans leur manière d’agir envers leur propre génération.

Le maître de la parabole loue son administrateur (grec l’économe de l’injustice), avec ironie, de son habileté.

Ces dernières paroles sont une réflexion de Jésus qui nous montre comment il entend la louange qu’il met dans la bouche du maître de l’économe On pouvait admirer le savoir-faire et l’audace de l’économe, tout en haïssant l’injustice.

Voilà pourquoi le Sauveur peut proposer sa conduite à l’imitation de ses disciples. Il leur recommandait de même ailleurs d’être « prudents comme des serpents » (Matthieu 10.16), il invoquait l’exemple, par contraste d’un ami égoïste (Luc 11.8), ou d’un juge inique (Luc 18.1 et suivants). Dans tous ces cas, l’essentiel est de bien saisir le point de comparaison.

Jésus motive (car) son exhortation à la prudence par une considération que l’expérience de tous les temps confirme, hélas ! C’est que ses disciples sont bien loin de déployer en vue de leurs intérêts éternels la même prudence que les gens du monde dans leurs affaires terrestres.

Il appelle par un hébraïsme bien connu (Matthieu 8.12), fils de ce siècle, ou de l’économie présente, ou de ce monde, ceux qui y sont nés et qui se conduisent selon l’esprit et les maximes qui y règnent (Luc 20.34 ; Éphésiens 2.2) ; et fils de la lumière, ceux qui ont été éclairés, pénétrés, régénérés par la vérité divine (Jean 12.36 ; Éphésiens 5.8 ; 1 Thessaloniciens 5.5).

Les mots : dans leur manière d’agir envers leur propre génération, se rapportent aux fils de ce siècle et désignent leur conduite, non à l’égard de leurs contemporains en général, mais à l’égard de ceux avec lesquels ils sont en relations d’affaires et qui sont animés des mêmes sentiments qu’eux. Avec d’autres et dans une sphère supérieure, leur habileté ne saurait les servir (1 Corinthiens 2.14-15).

9 Et moi aussi je vous dis : Faites-vous des amis avec les richesses injustes, afin que lorsqu’elles vous manqueront, ils vous reçoivent dans les tabernacles éternels.

Grec : le mammon de l’injustice (voir, sur ce mot, Matthieu 6.24, note).

C’est ici proprement l’application de toute la parabole dont Jésus a déjà indiqué le sens moral par la déclaration qui précède. Il faut donc l’interpréter à ce point de vue : le vrai emploi des richesses.

Mais qu’est-ce que ces richesses injustes ? Et quels sont les amis que nous devons nous faire par leur moyen ? La raison pour laquelle Jésus appelle injustes les biens de ce monde, a été expliquée de manières fort diverses.

C’est, a-t-on dit, parce qu’il y a presque toujours, de près ou de loin, quelque injustice dans la manière dont ils ont été acquis, ou dans l’usage qu’on en fait.

D’autres ont voulu donner au mot injuste le sens de biens faux, trompeurs (comparer « la tromperie, ou la séduction, des richesses » Matthieu 13.22).

Ces interprétations sont étrangères au contexte. Le vrai sens du mot doit être demandé à la parabole elle-même. Or, le mammon de l’injustice correspond exactement à l’économe injuste (verset 8).

Comment donc cet économe a-t-il été injuste ? D’abord, en dissipant le bien de son maître (verset 1) ; puis en en disposant pour son profit personnel (versets 6 et 7).

Voilà précisément comment la plupart des hommes rendent injustes les richesses que Dieu leur confie. Au lieu de se considérer comme des administrateurs qui lui en rendront compte, ils s’en constituent les vrais possesseurs et, oubliant leur responsabilité, ils accumulent ces biens dans leur avarice, en font étalage pour nourrir leur orgueil, ou bien les dissipent pour satisfaire passions.

Quel est alors l’usage que le Seigneur leur conseille de faire de ces biens, devenus injustes dans leurs mains ? La parabole donne la réponse. Le moment approche où tout homme sera appelé à rendre compte de son administration (verset 2) ; il doit donc imiter l’économe, qui s’est empressé de profiter d’un dernier sursis pour s’assurer des amis qui le recevront dans leurs maisons. Et moi je vous dis : Faites-vous des amis.

Ici se pose notre seconde question : Quels sont ces amis ? On a répondu de manières fort diverses.

L’un dit : l’ami suprême que nous devons nous assurer, c’est Dieu lui-même en employant à son service les biens qu’il nous confie.

Un autre (Olshausen) : c’est le Seigneur Jésus, qui regarde comme fait à lui-même le bien que nous faisons au plus petit de ses frères (Matthieu 25.40).

Un troisième (Meyer) veut que ces amis soient les anges, que Jésus lui-même nous représente comme chargés d’introduire les justes dans le royaume de Dieu (Luc 16.22 ; Matthieu 24.31 ; Marc 13.27) et qui s’intéressent avec amour à ceux qui le servent (Luc 15.10 ; Matthieu 18.10).

Mais l’interprétation la plus généralement admise consiste à entendre par ces amis, les hommes : ignorants à instruire, malheureux à soulager, pauvres à secourir. Il faut se les attacher par la bienfaisance, par une vraie charité chrétienne. Leur reconnaissance subsistera jusque dans le siècle à venir (voir la note suivante).

Le texte reçu porte : lorsque vous manquerez, ou cesserez, c’est-à-dire quand vous mourrez. La variante de Codex Sinaiticus, B, A, suppose que c’est « ce mammon de l’injustice » qui manquera, disparaîtra à l’heure de la mort.

Le sens des deux leçons est donc au fond le même, mais la dernière convient mieux à la parabole, puisque ce sont les biens qu’il administrait qui tout à coup manquent à l’économe.

C’est alors, dans ce jour solennel, que les amis que vous vous serez assurés vous recevront dans les tabernacles éternels.

Ce mot de tabernacle ou tente est une allusion à la vie des patriarches qui, étrangers et voyageurs, plantaient leurs tentes pour un jour. Dans l’économie future elles seront éternelles ; ce seront les « demeures de la maison du Père » (Jean 14.2), « l’édifice qui n’a pas été fait de main d’homme, mais qui est l’ouvrage de Dieu » (2 Corinthiens 5.1).

Comme ces amis sont des pauvres et des malheureux secourus, il ne faut pas entendre ce mot recevoir comme si c’étaient eux qui faisaient entrer dans le ciel leurs bienfaiteurs ; ils se bornent à les accueillir avec reconnaissance et avec amour. Dans certains cas aussi ces pauvres assistés peuvent devenir pour ceux qui leur viennent en aide les instruments de leur salut. C’est là certainement une douce et belle pensée, capable d’augmenter la joie du ciel elle-même.

Dira-t-on que ce trait de la parabole ainsi interprété, parait peu conforme à l’Évangile, que ce rôle attribué aux pauvres pourrait, d’une part, favoriser l’idée de l’intercession des saints et d’autre part, celle du mérite des œuvres pour le salut ?

À cela on peut répondre qu’une parabole n’est pas un cours de dogmatique, que ce dernier trait répond incidemment à celui du verset 4 et que, du reste, cette morale n’est pas en désaccord avec celle que Jésus enseigne ailleurs (Matthieu 25.34-46).

10 Celui qui est fidèle dans les plus petites choses, est aussi fidèle dans les grandes ; et celui qui est injuste dans les plus petites choses, est aussi injuste dans les grandes.

Cette sentence, expression proverbiale d’une vérité d’expérience, sert d’introduction au verset suivant, où nous voyons que les plus petites choses sont les biens de la terre et que les grandes sont les biens spirituels de l’âme.

Celui qui ne rapporte pas à Dieu les premiers, qui ne les fait pas valoir pour sa gloire, ne saurait administrer fidèlement les derniers (comparer Matthieu 25.21).

11 Si donc vous n’avez pas été fidèles dans les richesses injustes, qui vous confiera les véritables ?

Grec : fidèle dans le mammon injuste (verset 9, note).

Ce verset confirme et explique le précédent. Les richesses véritables (grec le bien véritable) sont mises en opposition avec les richesses injustes ; elles sont véritables, parce que c’est le don du salut et de toutes les grâces divines qui le constitue, qu’elles répondent ainsi parfaitement à tous les besoins de l’âme et sont impérissables (voir la note suivante).

12 Et si vous n’avez pas été fidèles dans ce qui est à autrui, qui vous donnera ce qui est à vous ?

On voit que dans chacune de ces sentences (versets 10-12) qui sont encore l’application de la parabole, le Seigneur a en vue l’économe infidèle, dont la position à l’égard de son maître est exactement la nôtre à l’égard de Dieu. C’est ce que rappellent ces termes : ce qui est à autrui.

Les biens qui nous sont confiés, comme ceux qu’administrait l’économe, ne sont pas à nous, mais à Dieu. Si, comme lui, nous ne sommes pas fidèles dans l’usage que nous en faisons, Dieu pourrait-il nous donner ce qui est à nous ?

Ce dernier mot correspond aux richesses véritables (verset 11), mais avec une nuance importante, exprimée par le contraste entre ce qui est à autrui et ce qui est nôtre.

Les biens de la terre sont à Dieu, qui les confie à qui il veut, pour un temps et ils restent toujours pour nous des biens extérieurs.

Le salut, au contraire, la vie éternelle, est à nous, parce qu’elle est un héritage qui nous a été légitimement acquis (Actes 20.32 ; Romains 8.17 ; Matthieu 25.34) et surtout parce qu’elle nous est assimilée de manière à devenir une partie intégrante de notre nature spirituelle et immortelle.

Cette parole remarquable nous ouvre une perspective inattendue sur la dignité que Jésus attribue à l’âme humaine et aussi sur l’état des enfants de Dieu dans le ciel, où tout ce qu’ils posséderont sera parfaitement identique à leur être et leur sera approprié pour toujours par un progrès sans fin dans la connaissance et l’amour de Dieu.

13 Nul domestique ne peut servir deux maîtres, car ou il haïra l’un et aimera l’autre, ou il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon.

Voir, sur ce dernier verset, Matthieu 6.24, note.

C’est chez Matthieu qu’il se trouve à sa véritable place. Il se peut toutefois que Jésus ait répété cette sentence, qui clôt très convenablement l’application de la parabole.

C’est une dernière réflexion sur la position de l’économe, qui prétendait pouvoir (grec) servir deux seigneurs, son maître et Mammon ou l’argent.

Or Jésus déclare que cela est moralement impossible et qu’ainsi, quiconque veut servir Mammon, s’exclut du service de Dieu.

14 Or les pharisiens, qui aimaient l’argent, écoutaient toutes ces choses, et ils se moquaient de lui.

Raillerie des pharisiens et réplique de Jésus

L’enseignement que Jésus vient de faire entendre provoque les ricanements des pharisiens amis de l’argent. Jésus déclare que la renommée dont ils jouissent parmi les hommes est en abomination à Dieu qui connaît les cœurs (14, 15).

La valeur permanente de la loi

La loi qui a dominé jusqu’à Jean n’est point abolie par la publication de ce royaume de Dieu, qui est l’objet de l’ardente poursuite d’un grand nombre. Elle subsistera autant que le ciel et la terre. Les saintes exigences ne sont pas diminuées, mais accrues : les principes de Jésus sur le divorce le prouvent (16-18).

Reproches aux pharisiens (14-18)

Les pharisiens, parce qu’ils étaient amis de l’argent, étaient bien décidés à ne pas abandonner le service de Mammon (verset 13) ; mais comme Jésus vient de déclarer que ce service les exclut de celui de Dieu, leur orgueil s’en irrite et ils se vengent en se moquant de lui (voir sur ce terme, Galates 6.7, note).

La pauvreté de Jésus et de ses adhérents était sans doute le sujet de leurs moqueries. Ce trait nous montre quel degré d’incrédulité et de frivolité pouvait s’allier au grave caractère qu’affectaient ces hommes.

La vraie réponse à leurs sarcasmes impies sera la parabole du mauvais riche (verset 19 et suivants), l’une des plus sévères que Jésus ait prononcées ; mais il veut d’abord démasquer l’orgueilleuse propre justice de ses adversaires (verset 15) et les convaincre qu’ils vivaient dans une continuelle transgression de la loi (versets 16-18).

Les versets qui suivent ne sont que des fragments de discours, que Luc a placés ici comme transition de la première à la seconde parabole.

15 Et il leur dit : Vous, vous êtes ceux qui se justifient eux-mêmes devant les hommes, mais Dieu connaît vos cœurs ; car ce qui est élevé devant les hommes est une abomination devant Dieu.

C’était déjà pour se justifier, ou paraître justes, devant les hommes, que les pharisiens se raillaient de l’enseignement de Jésus sur l’emploi des richesses et toute leur vie avait cette même tendance (Matthieu 23.28).

Mais aux yeux de Dieu qui connaît les cœurs et qui ne voyait sous leurs faux airs de vertu et de moralité que des vices recouverts par l’hypocrisie, leur prétendue élévation était une abomination.

Il ne faut pas entendre cette sentence dans un sens absolu ni l’appliquer à toute élévation quelconque. Avec de la sincérité et de l’humilité, ce qui est grand aux yeux des hommes peut l’être aussi devant Dieu.

16 La loi et les prophètes ont été jusqu’à Jean ; dès lors, le royaume de Dieu est annoncé, et chacun use de violence pour y entrer. 17 Mais il est plus aisé que le ciel et la terre passent, qu’il ne l’est qu’un seul trait de lettre de la loi tombe.

Sur quoi se fondait Jésus pour prononcer un jugement si sévère contre les pharisiens ?

Sur la loi et les prophètes, dont ils prétendaient être les zélés observateurs et défenseurs, tandis qu’ils accusaient Jésus de les rabaisser en annonçant (gr, évangélisant) le royaume de Dieu.

Mais non ; la prédication de l’Évangile, l’ouverture d’une ère nouvelle et le zèle violent avec lequel chacun se précipite dans ce royaume (d’autres traduisent, en prenant le verbe au passif : « chacun est vivement pressé d’y entrer », mais comparez Matthieu 11.12, note) ne diminuent en rien les saintes exigences de la loi, dont il n’est pas possible qu’un seul trait de lettre soit aboli (Matthieu 5.18, note).

Cette loi dont vous vous glorifiez sera donc votre juge.

18 Quiconque répudie sa femme et en épouse une autre commet adultère ; et celui qui épouse une femme qui a été répudiée par son mari, commet adultère.

Voir, sur le sens de cette déclaration, Matthieu 5.32 ; Matthieu 19.9 ; Marc 10.11, notes.

Quant à la place que Luc lui assigne, la plupart des interprètes renoncent à trouver une connexion quelconque entre cette parole et ce qui précède.

Parmi ceux qui veulent en trouver une, les uns pensent que Jésus rappelle la prescription légale concernant le divorce et l’adultère, comme un exemple de la validité permanente de la loi et pour montrer que dans la nouvelle économie la loi sera même plus sévèrement appliquée que dans l’ancienne.

Les autres (Olshausen, Hofmann, Weiss) voient dans cette parole une allégorie semblable à celle de Romains 7.1-3 : celui qui répudie sa femme, c’est celui qui, s’autorisant du nouvel ordre de choses, rejette complètement la loi ; celui qui épouse une femme répudiée, c’est celui qui méconnaissant la nouvelle, s’attache obstinément à l’ancienne économie. Ce dernier méconnaît la sentence du verset 16 et le premier celle du verset 17.

La première explication est plus admissible ; mais il est évident que la vraie place de cette déclaration est dans le discours sur la montagne.

19 Or il y avait un homme riche qui se vêtait de pourpre et de fin lin, se traitant chaque jour magnifiquement.

Le riche et Lazare sur la terre

  1. Leur vie. Le riche jouit d’un grand luxe dans le vêtement et la nourriture. Lazare gît à la porte du riche, couvert d’ulcères, souhaitant les miettes de sa table ; les chiens accroissent ses souffrances (19-21).
  2. Leur mort. Le pauvre est porté dans le sein d’Abraham. Le riche est enseveli (22).

La scène d’outre-tombe

  1. Le tourment et la supplication du riche. Dans le séjour des morts, au milieu des souffrances, il voit de loin Lazare dans le sein d’Abraham. Il supplie Abraham d’envoyer Lazare lui rafraîchir la langue du bout de son doigt trempé dans l’eau (23, 24).
  2. La réponse. Abraham refuse : le malheur du riche, de même que la félicité dont jouit Lazare, sont la juste compensation de leurs conditions respectives sur la terre ; de plus un abîme infranchissable les sépare (25, 26).
  3. La seconde requête du riche. Qu’il plaise au moins à Abraham d’envoyer Lazare rendre témoignage à ses cinq frères. Abraham répond qu’il leur suffit d’écouter Moïse et les prophètes (27-29).
  4. L’insistance du riche. Il affirme que la réapparition d’un mort amènera leur conversion. Abraham le conteste (30, 31).

La parabole du riche et de Lazare (19-31)

Un homme riche ; ce mot est assez fréquemment employé en un sens défavorable dans l’Écriture. L’histoire de celui-ci va justifier d’une manière saisissante les sérieux avertissements que Jésus vient de donner aux pharisiens avares qui se moquaient de lui (versets 14-18) et compléter l’application de la parabole précédente (versets 9-13).

La pourpre dont se revêtait somptueusement ce riche, était la robe de dessus, le manteau, tandis que le fin lin, étoffe précieuse qui se fabriquait en Égypte, composait la tunique. Un seul trait peint sa manière de vivre : grec il faisait joyeuse chère chaque jour magnifiquement.

Vivre dans le luxe, se livrer aux jouissances des sens, tout en restant égoïstement indifférent aux besoins et aux maux du pauvre (verset 21), telle était la conduite de ce riche. Il n’est pas mis d’autre péché à sa charge, il n’est pas dit qu’il menât une vie immorale. Sa fin est un avertissement d’autant plus universel et d’autant plus terrible pour les égoïstes honorables qui se trouvent par milliers dans la société de tous les temps (Matthieu 25.41-45).

20 Et un pauvre, nommé Lazare, avait été jeté à sa porte, couvert d’ulcères,

Lazare est l’abréviation d’Eleazare, qui signifie Dieu est le secours.

Si le Sauveur donne un nom à ce pauvre tandis qu’il n’a point nommé le riche, c’est sans doute avec intention ; il voulait indiquer par là que ce Lazare cherchait et trouvait son secours en Dieu et qu’au sein de sa misère il était un pieux Israélite.

C’est la seule fois que Jésus donne un nom à un personnage de parabole. Des Pères de l’Église et Calvin en ont conclu qu’il racontait une histoire véritable. Cela n’est pas impossible, mais c’est peu probable. En tout cas, il ne parle pas du frère de Marthe et de Marie, qui possédait une demeure (Luc 10.38).

21 et désireux de se rassasier des miettes qui tombaient de la table du riche ; mais encore les chiens venaient lécher ses ulcères.

À l’indigence se joignaient, chez ce malheureux, la maladie, la souffrance.

La porte du riche désigne, selon le terme original, la porte d’entrée, le portail, qui, dans les grandes maisons, conduisait à la cour intérieure. On y avait jeté le pauvre ; cette expression trahit l’insouciance des gens qui, après l’avoir déposé là, l’abandonnaient ainsi dans sa misère.

L’ambition du pauvre était bien modeste ; elle se bornait aux miettes qui tombaient de la table somptueuse du riche. Les lui donnait-on ? C’est ce que le texte ne dit pas, mais la phrase qui suit fait supposer le contraire ; non seulement on ne les lui donnait pas, mais même les chiens, etc.

Ce dernier trait achève de peindre la misérable situation de cet homme. Il indique que ses plaies n’étaient pas même bandées et que ces animaux immondes (dans les idées de l’Orient), en venant les lécher, ajoutaient à ses douleurs.

Tel est bien le sens du contexte et c’est par pure imagination qu’on a voulu attribuer à ces chiens plus d’humanité que n’en montraient les hommes.

Une variante de Codex Sinaiticus et B, admise par Tischendorf et d’autres critiques, supprime les miettes ; on suppose que ces mots ont été empruntés à Matthieu 15.27 et que le texte original portait : désirant de se rassasier de ce qui tombait de la table du riche ; mais les témoignages en faveur de leur authenticité sont nombreux et importants.

22 Or il arriva que le pauvre mourut et qu’il fut porté par les anges dans le sein d’Abraham. Et le riche mourut aussi et fut enterré.

Dans le sein d’Abraham ; le sens de l’expression dans le sein, est le même que dans Jean 13.23.

Le Sauveur représente ici, comme souvent ailleurs (Matthieu 8.11 ; Matthieu 26.29 ; Luc 13.28), le bonheur du ciel sous l’image d’un banquet célébré avec les patriarches, dans une communion pleine de joie.

Or, comme on se mettait à table à demi couché sur un divan, on se penchait sur le sein de son voisin. L’ami le plus intime du père de famille, celui à qui il voulait faire le plus d’honneur, occupait cette place tout près de lui.

Chez les Juifs, Abraham étant considéré comme le personnage le plus vénéré et le plus élevé de leur histoire, on conçoit quel honneur et quel bonheur ce trait de la parabole confère à Lazare. Quel contraste avec sa misère profonde sur la terre !

Il faut remarquer encore l’office assigné aux anges de Dieu (comparer verset 9, première note).

Il y a ici une opposition marquée à dessein entre le pauvre et le riche : Il arriva que le pauvre mourut ; et le riche aussi mourut ; sa richesse et son luxe ne retinrent pas la mort, qui, pour lui, fut d’autant plus terrible.

Puis vient ce dernier acte de son existence terrestre : il fut enterré, sans doute avec grande pompe. Jésus ne parle pas de l’ensevelissement de Lazare : Il passa inaperçu comme le convoi des pauvres.

23 Et dans le séjour des morts, levant les yeux, tandis qu’il est dans les tourments, il voit de loin Abraham, et Lazare dans son sein.

Après les scènes de la terre, les scènes du monde invisible. Quel réveil pour ces deux âmes, l’une dans le sein d’Abraham, l’autre dans les tourments !

Le mot grec hadès, que nous traduisons par séjour des morts, signifie littéralement le lieu invisible, sans forme, sans apparence, parce qu’il échappe aux regards des hommes.

C’est par ce terme que la version des Septante rend le mot hébreu schéol, qui indique aussi le lieu où se rendent indistinctement toutes les âmes, à l’heure de la mort.

Nos versions ordinaires rendent ces deux termes, d’une manière également fausse, tantôt par « enfer », tantôt par « sépulcre », parce que le vrai mot n’existe pas dans notre langue.

Ces deux expressions (hadès et schéol) n’indiquent nullement par elles-mêmes s’il s’agit d’un séjour de bonheur ou de souffrance, car chaque âme porte en elle les conditions de l’un ou de l’autre (comparer Actes 2.27-31, en grec).

Ainsi, dans notre verset, c’est le mot de tourments qui seul indique l’état où se trouvait le mauvais riche. Pour lui, voir Lazare (le présent, il voit) dans le sein d’Abraham, tandis que lui-même était tourmenté, fut toute une révélation du monde invisible.

Le commencement de la parabole, qui nous montre Lazare souffrant et mourant à la porte du riche, sans que celui-ci se soucie de lui, et, plus encore, l’application de la parabole de l’économe injuste (verset 9), ne laissent pas le moindre doute sur la question : pourquoi le mauvais riche est-il dans les tourments, tandis que Lazare est parmi les bienheureux ? (comparer verset 19, note).

C’est donc sans fondement que l’exégèse rationaliste prétend que, d’après cette parabole, le riche est puni comme riche et Lazare récompensé comme pauvre, attribuant à l’évangéliste l’hérésie ébionite, contraire à toute l’Écriture. Pour qui sait lire, cette opinion se réfute d’elle-même.

24 Et s’écriant, il dit : Père Abraham, aie pitié de moi et envoie Lazare, afin qu’il trempe dans l’eau le bout de son doigt, et qu’il rafraîchisse ma langue ; parce que je suis tourmenté dans cette flamme.

L’entretien qui va suivre rappelle les dialogues des morts chez les anciens. Tout y est image, mais ces images représentent des réalités.

Le riche reconnaît Abraham et Lazare. Ce trait montre que la personnalité subsiste dans le monde invisible et que les âmes ont des rapports entre elles. Du reste, le but de ce verset est de faire ressortir la transformation totale qui s’est opérée dans la situation des deux hommes : le riche est devenu un mendiant et c’est Lazare qu’il implore.

Il faut se garder de matérialiser, comme on l’a fait trop souvent, ces flammes, qui ne sont que l’image de la souffrance morale. Les convoitises et les passions, jusque-là pleinement satisfaites, se changent en tourments, dès que tout aliment leur est ôté ; et tandis que le cœur est vide, le feu des regrets et des remords brûle dans la conscience.

25 Mais Abraham dit : Mon enfant, souviens-toi que tu as reçu tes biens pendant ta vie, et de même Lazare les maux ; or maintenant, ici, il est consolé, et toi, tu es tourmenté.

Le malheureux avait dit : Père Abraham (verset 24), se faisant peut-être encore de ce beau nom un titre illusoire ; le patriarche lui répond : Mon enfant, parce qu’en effet il était un descendant d’Abraham selon la chair. Il veut peut-être aussi lui donner à entendre qu’il aurait l’être selon l’esprit. Il y a, en tout cas, dans ce terme la bienveillance de la charité, qui subsiste même envers un réprouvé.

Le souviens-toi est le mot central de la parabole ; il forme le lien entre les deux scènes, celle de la terre et celle de l’hadès.
— Godet

La mémoire est, dans le monde invisible, une cause de tourments pour les uns, pour les autres, une source de consolation et de joie. Ce dont le riche doit se souvenir, c’est qu’il a eu pendant la vie ses biens, ceux qu’il s’est appropriés, dont il a joui en égoïste, les seuls qu’il ait désirés et recherchés ; il en a fait son idole, son dieu ; c’est la cause de son tourment. Lazare a eu les maux, qu’il a supportés comme un pieux Israélite ; ils ont été son épreuve et le riche n’a pas songé a les lui adoucir. Or maintenant, ici (vrai texte) il est consolé.

La rétribution, en bien ou en mal, ne sera que la conséquence rigoureuse de la vie de tout homme. Ce qu’il sème, il le moissonnera aussi (Galates 6.7).

26 Et outre tout cela, un grand abîme est établi entre nous et vous ; afin que ceux qui veulent passer d’ici vers vous ne le puissent, et que ceux qui sont de là, ne traversent non plus vers nous.

Grec : « un grand abîme est affermi entre vous et nous ».

Ce terme, peu naturel dans une telle image, a été choisi à dessein ; il signifie que les bords de cet abîme ne peuvent se rapprocher et que l’abîme ne peut être comblé.

Abraham a allégué d’abord, pour refuser au riche sa demande, un motif de justice ; il montre ensuite l’impossibilité de l’exaucer.

27 Mais il dit : Je te prie donc, père, de l’envoyer dans la maison de mon père,

Le riche insiste et présente à Abraham une nouvelle demande.

Cette seconde partie du dialogue n’est, comme l’observe très justement M. Godet (1re édition) :

que l’application pratique de la parabole qui, au lieu d’être présentée aux auditeurs sous forme de leçon abstraite, l’est comme continuation de la scène elle-même. Il en est exactement ainsi dans la parabole de l’enfant prodigue, où le tableau du fils aîné met en scène les pharisiens avec leurs murmures et la réponse divine.

En plaçant cette application dans la bouche du riche, Jésus ne la rend que plus frappante et il complète la parabole par le trait le plus sérieux et le plus profond qu’elle renferme : la nécessite de la repentance et de la foi pour échapper a la condamnation.

28 car j’ai cinq frères, afin qu’il leur rende témoignage, pour qu’ils ne viennent pas, eux aussi, dans ce lieu de tourments.

Le riche, on le voit par ses paroles, a fait une découverte terrible : c’est qu’une vie telle que la sienne sur la terre conduit nécessairement là où il se trouve ; et comme il ne peut plus rien demander pour lui-même, il se souvient de ses frères, qui vivent comme il avait vécu ; il prie donc que Lazare leur soit envoyé pour leur rendre témoignage des réalités du monde invisible et du danger où il se trouvent d’arriver, eux aussi, dans ce lieu de tourments.

En parlant ainsi, il part d’un préjugé qui, s’il était fondé, serait son excuse : c’est qu’il faut à l’homme, outre les révélations divines, des avertissements extraordinaires, miraculeux (verset 30), pour l’amener à la foi. Il n’ose pas dire qu’il en a été privé et que son malheur vient de là ; mais il sous-entend cette pensée dans sa requête pour ses frères, qui sont dans la même condition où il était sur la terre. C’est ce qui explique la réponse qui lui est faite (versets 29 et 31)

29 Mais Abraham lui dit : Ils ont Moïse et les prophètes ; qu’ils les écoutent !

Éclatant témoignage rendu par le Sauveur à cette vérité que la révélation, même de l’Ancien Testament, suffit pour amener les hommes à la foi : Ils ont Moïse et les prophètes ; qu’ils les écoutent !

Ce verbe, dans la langue que parlait le Sauveur, ne signifie pas seulement entendre, mais obéir. Tel est le discours que Jésus tenait à des Juifs ; son raisonnement n’est-il pas bien plus probant pour des chrétiens qui, non seulement ont Moïse et les prophètes, mais Jésus-Christ et les apôtres !

30 Mais il dit : Non, père Abraham ; mais si quelqu’un des morts va vers eux, ils se repentiront.

Se repentir, changer complètement les dispositions les plus intimes de la conscience et du cœur (comparez Matthieu 3.2, note), voilà enfin la grande parole que Jésus met dans la bouche de ce malheureux, pour faire sentir à ses auditeurs que c’est ce qui lui avait manqué et que telle avait été la cause de sa vie mondaine et de sa ruine.

Mais le riche, tout éclairé qu’il est, persiste dans son erreur, en s’imaginant que si la vérité était annoncée à ses frères par un mort revenu à la vie, elle produirait en eux la repentance et la foi. Le Sauveur le nie.

31 Mais il lui dit : S’ils n’écoutent pas Moïse et les prophètes, ils ne seront pas non plus persuadés, si quelqu’un ressuscite d’entre les morts.

Être persuadé, c’est croire à la vérité, à la justice, en d’autres termes, être convaincu de péché, se repentir (verset 30).

Or l’incrédulité et l’amour du monde, qui empêchent cette conviction de se produire, ont leur siège dans le cœur ; de là vient que les preuves les plus évidentes pour l’esprit ne persuadent nullement, aussi longtemps que le cœur n’est pas disposé à s’humilier et à croire.

L’Évangile montre par des faits nombreux que des miracles éclatants ne peuvent vaincre l’incrédulité (Luc 6.10-11 ; Jean 9.13 et suivants ; Jean 11.46-53 ; Jean 12.9-10).

Nous-mêmes, nous avons le témoignage que demandait ici le mauvais riche pour ses frères ; Jésus-Christ est ressuscité des morts et a mis en évidence les réalités du monde invisible ; et cependant, combien de ceux qui le savent ne sont point persuadés !