Verset à verset Double colonne
1 Et il se mit à leur parler en paraboles : Un homme planta une vigne, et l’entoura d’une haie et creusa une cuve et bâtit une tour, il l’afferma à des vignerons, et s’absenta.Voir, sur cette parabole, Matthieu 21.33-46, notes ; comparer : Luc 20.9-19.
Quels sont les auditeurs de Jésus désignés par ce pronom leur ?
Selon notre évangile, il n’y a pas de doute qu’il ne s’adresse aux sacrificateurs et aux scribes envoyés en députation auprès de lui (Marc 11.27), car cette parabole se rattache immédiatement à l’entretien qui eut lieu à cette occasion (Voir, du reste, verset 12).
Dans Matthieu, cette liaison du discours est encore plus évidente, car, après avoir adressé à ces mêmes hommes la similitude des deux fils, il continue en ces termes : « Écoutez une autre parabole ».
Luc (Luc 20.9) dit que Jésus s’adresse au peuple ; cela est également dans la situation, puisque le peuple que Jésus enseignait sous les portiques du temple, quand la députation vint le trouver (Marc 11.27, note), l’entourait encore et assistait à l’entretien avec les délégués du sanhédrin.
Des fruits de la vigne, c’est-à-dire une partie des fruits.
Telle est aussi l’expression de Luc ; elle signifie que le maître avait accordé avec les vignerons qu’il recevrait une certaine quantité des produits de la vigne, tandis qu’eux-mêmes garderaient le reste pour leur travail.
Il y a une légère différence dans Matthieu, qui dit d’une manière plus absolue : les fruits, ou même ses fruits. Dans ce cas, le maître aurait recueilli tous les produits et payé les vignerons pour leur labeur. Dans l’un et l’autre cas, ce que le propriétaire attend des vignerons ce n’est pas de l’argent, mais des produits de la vigne. Ce détail n’est pas sans importance pour le sens de la parabole.
Le texte reçu avec A, C, majuscules porte : « lui meurtrirent la tête en le lapidant et le renvoyèrent outragé ».
La première variante est une glose tirée de Matthieu, la seconde est formée d’après le verset 3.
L’envoi de ces serviteurs, que Matthieu raconte sommairement, est ici exposé en détail, avec une double gradation qu’il faut observer : gradation dans la longue patience du maître, qui envoie successivement trois serviteurs, puis, successivement encore, plusieurs autres.
Gradation aussi dans la nature des mauvais traitements que les vignerons infligent à ces serviteurs : battre et renvoyer à vide ; meurtrir et outrager ; enfin tuer.
Ces serviteurs représentent la longue suite de prophètes que Dieu envoya à son peuple sous l’ancienne alliance pour recueillir au milieu de lui des fruits de repentance, d’obéissance et d’amour. Elle peint d’une manière non moins fidèle l’endurcissement croissant de ce peuple, qui va mettre le comble à son inimitié contre Dieu (verset 6).
Le texte reçu porte : « Ayant donc encore un fils unique, son bien-aimé, il l’envoya, lui aussi vers eux, le dernier ».
Les mots soulignés marquent des variantes de peu d’importance.
C’est le trait solennel, émouvant du récit de Jésus.
Marc et Luc le font admirablement ressortir, chacun à sa manière. C’est le suprême effort de la tendre miséricorde de Dieu. Qui ne se rappellerait, en lisant ces mots, la grande parole de Jésus : (Jean 3.16) « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique ! »
Quelle révélation de ce qui se passait dans le cœur des adversaires, auditeurs de Jésus ! Leur but principal, en mettant à mort le Messie envoyé de Dieu, était précisément de rester en possession de la théocratie, des avantages, de l’influence, des honneurs qu’elle leur donnait et qu’ils craignaient de perdre.
Dans tous les temps, les ennemis du Sauveur ont le sentiment plus ou moins conscient qu’en se débarrassant de lui, de sa vérité, de son autorité, ils resteront en possession d’eux-mêmes, de leurs intérêts terrestres et de leur orgueilleuse indépendance vis-à-vis de Dieu.
Matthieu et Luc rangent ces deux actions dans un ordre inverse : « le jetèrent hors de la vigne et le tuèrent ».
Dans le récit de la parabole, cette différence n’a aucune importance ; seulement, l’ordre adopté par Marc serait un argument contre l’idée que Jésus fait ici allusion aux circonstances particulières de sa mort.
Sans doute, il fut crucifié hors de Jérusalem ; mais Jérusalem n’est pas la vigne qui, dans la parabole, représente le royaume de Dieu (Matthieu 21.43).
Ce qui a donné l’idée de rapprocher ce trait de la parabole du fait que Jésus fut crucifié hors de la ville, c’est une parole de l’épître aux Hébreux (Hébreux 13.12).
Selon Marc et Luc, c’est Jésus qui fait la question et la réponse. Dans Matthieu, ce sont les adversaires eux-mêmes qui, interrogés par le Seigneur, sont forcés de prononcer une sentence de condamnation sur les vignerons, ignorant dans leur aveuglement que cette sentence retombait directement sur leurs propres têtes.
Quelques interprètes, afin de mettre Marc et Luc en harmonie avec Matthieu, attribuent ici la réponse aux sacrificateurs et aux scribes, mais cela n’est nullement marqué dans le texte. Dans l’un et l’autre cas, la sentence reste la même et, sortant de la bouche du Seigneur, elle n’en est que plus redoutable.
Voir, sur cette citation, Matthieu 21.42, note et sur le sens général de la parabole, verset 43, note.
Pour eux, grec en vue d’eux, par rapport à eux.
Logiquement, les trois premières phrases de ce verset devraient être construites ainsi : « Ils cherchaient à le saisir ; car ils avaient compris, etc. ; mais ils craignaient la foule ».
Le car, en effet, n’est pas destiné à motiver la crainte qu’ils avaient, mais leur dessein de faire mourir Jésus.
Si telle n’était pas la vraie construction, il faudrait admettre avec Meyer que ces mots : ils avaient compris se rapportent non aux adversaires de Jésus mais aux hommes de la foule, ce qui est impossible, parce que la dernière phrase : et le laissant, ils s’en allèrent, ne peut avoir pour sujet que ces mêmes adversaires.
Ainsi, tel est l’endurcissement de ces hommes, que cette redoutable parabole, qu’ils ont très bien comprise, ne fait que les affermir dans leurs desseins meurtriers à l’égard du Sauveur.
La question du tribut
La question de la résurrection
La question du plus grand commandement
Grec : de le prendre par une parole.
Voir, sur les deux récits qui suivent, Matthieu 22.15-33, notes et comparez Luc 20.20-40.
Quel est le sujet de ce verbe : ils envoient ?
D’après Marc 11.27 ; Marc 12.12, ce sont les principaux sacrificateurs, les scribes et les anciens qui avaient été délégués par le sanhédrin.
Matthieu attribue aux pharisiens l’initiative de cette nouvelle démarche ; ceux-ci avaient en effet la majorité dans le sanhédrin.
Marc de même que Matthieu, désigne ceux qui sont ici envoyés pour surprendre Jésus par une question captieuse, comme des pharisiens et des hérodiens, deux partis ennemis qui s’unissent dans le même mauvais dessein (voir sur les pharisiens Matthieu 3.7, note et sur les hérodiens Matthieu 22.16 note).
Grec : Donnerons-nous ou ne donnerons-nous pas ?
Marc seul ajoute cette seconde question précise et personnelle, à la première qui concernait le principe. Sur le danger qu’il pouvait y avoir pour Jésus dans la solution de cette question, voir Matthieu 22.17, note.
Connaissant leur hypocrisie. Voilà bien celui qui sonde les cœurs (Jean 2.25).
Dès lors sa question : Pourquoi me tentez-vous ? devait révéler à ces hommes l’inutilité et la folie de leur dessein.
D’après une variante de Codex Sinaiticus, B, C, admise par les meilleurs critiques, l’ordre des mots est le suivant : Ce qui est de César, rendez-le à César et ce qui est de Dieu à Dieu.
Marc seul a cette construction plus frappante en ce qu’elle attire tout d’abord l’attention sur la distinction à faire entre les choses de la politique et celles de la religion, entre les devoirs du citoyen et ceux du chrétien.
Par cette parole, Jésus n’exprimait pas seulement une profonde vérité morale (voir Matthieu 22.21, note), mais il sortait victorieux du piège que lui tendaient ses adversaires et en même temps il brisait leur alliance momentanée ; car les pharisiens ne voulaient pas rendre à César le tribut qui lui appartenait et les hérodiens, mondains et frivoles, étaient tout aussi peu disposés à rendre à Dieu ce qui est à Dieu, c’est-à-dire leurs cœurs et leurs vies.
Le mot grec désigne à la fois l’étonnement et l’admiration ; mais si le peuple admirait, les adversaires reçurent sans doute une impression toute différente.
Le texte reçu dit : ils furent (aoriste) dans l’étonnement, mais il faut remarquer cet imparfait du vrai texte qui exprime la durée, la permanence de cette impression.
Voir, sur ce récit, Matthieu 22.23-33 notes et sur les sadducéens, parti opposé aux pharisiens, Matthieu 3.7 note.
Deutéronome 25.5-6. Ce passage renferme à la fois la prescription légale dont il s’agit et le but du législateur, qui était la conservation des familles et des tribus en Israël.
De ces deux termes, qui paraissent un pléonasme, en la résurrection, quand ils seront ressuscités, le premier exprimer l’idée d’une résurrection universelle, le second s’applique à la résurrection des sept frères et de la femme, mentionnés dans ce récit.
Comme les sadducéens ne croyaient pas que les morts revivent (verset 18), leur question se réduisait à une ironie.
Ignorer les Écritures et la puissance de Dieu, telle est la double source habituelle de l’erreur et de l’incrédulité.
Or Jésus prouve ici (verset 25) la puissance de Dieu par le fait que sa parole créatrice saura rendre aux morts un corps glorifié, digne de leur existence nouvelle ; puis il démontre la vérité profonde des Écritures par la citation qu’il en fait et la conclusion qu’il en tire (versets 25 et 27 ; comparez Matthieu 22.30-32, notes).
Exode 3.6 Grec : Au buisson, comment Dieu lui parla.
L’ordre des mots et l’analogie de Romains 11.2 recommandent la version que nous avons admise.
La traduction ordinaire est : « dans le livre de Moïse, comment Dieu lui parla dans le buisson ».
Grec : Vous donc, vous errez grandement, par la double cause indiquée au verset 24
Tischendorf omet les mots : vous donc, d’après Codex Sinaiticus, B, C.
Grec : De quelle nature est le premier commandement de tous ?
Voir, sur cette section, Matthieu 22.34-46, notes.
Selon Matthieu, ce scribe serait venu à Jésus, envoyé par les pharisiens et lui aurait proposé sa question pour le tenter ou l’éprouver.
Dans notre évangile, cette dernière idée disparaît complètement et tout l’entretien qui va suivre est plein de bienveillance de part et d’autre. Il faut reconnaître cette différence, sur laquelle pourtant comparez Matthieu 22.35, note.
Voir, sur la question du scribe et la réponse du Sauveur, Matthieu 22.36-39, notes.
Au verset 29, le texte reçu porte les mots : Le premier de tous les commandements est celui-ci.
La plupart des critiques adoptent la leçon de Codex Sinaiticus, B, qui porte simplement : Le premier est. Ensuite, le texte reçu avec A, D, majuscules ajoute au verset 30 : c’est là le premier commandement, glose inutile. Enfin, le texte reçu avec A et les majuscules, après les mots : Voici le second, dit encore qui lui est semblable, termes empruntés à Matthieu.
Quant à la citation, faite par le Sauveur, du grand commandement de l’amour, Marc seul la fait précéder de ces mots : Écoute, Israël, le Seigneur notre Dieu est un seul Seigneur.
Ces paroles, empruntées à Deutéronome 6.4-5, s’y trouvent exactement dans le même rapport avec le saint devoir d’aimer Dieu. C’est qu’un Dieu unique peut seul être l’objet de l’amour suprême de la créature, comme à son tour cet amour constitue l’unité et l’âme de tous les commandements.
Il faut observer encore qu’à ces trois termes, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta pensée, qui se trouvent dans Matthieu, Marc ajoute : de toute ta force, conformément à l’hébreu, qui, par contre, ne renferme pas le mot de pensée (comparer Matthieu 22.37, note).
Enfin, le commandement concernant l’amour du prochain est cité ici d’après Lévitique 19.18.
La réponse du scribe et l’approbation que Jésus lui donne (versets 32-34) ne se trouvent que dans Marc.
Le scribe relève tout d’abord le grand principe de l’unité de Dieu, rappelée par le Sauveur et y adhère avec conviction. Cela n’est pas étonnant chez un Israélite ; mais ce qu’il ajoute, sur l’amour pour Dieu et pour le prochain, révèle les excellentes dispositions de son cœur.
Pensée profonde et éminemment scripturaire (1 Samuel 15.22 ; Psaumes 40.7).
Dans son énumération des facultés de l’âme qui toutes doivent être pénétrées de l’amour de Dieu, le scribe remplace le mot de pensée (verset 30) par celui d’intelligence, par où il entend sans doute cette raison supérieure et morale qui pénètre et embrasse tout entier le rapport de l’homme et de Dieu, unis par l’amour. Pour bien saisir le sens de ce mot, il faut en juger par son contraire, tel qu’on le trouve dans Romains 1.21 ; Romains 1.31.
Le texte reçu avec A, D, majuscules, ajoute, après intelligence : et de toute son âme.
Le terme que nous traduisons ainsi est composé d’un mot qui a toujours dans l’Écriture un sens à la fois intellectuel et moral.
C’est l’entendement appliqué aux vérités divines (comparer Luc 24.45 ; 1 Corinthiens 14.14-15 ; 1 Corinthiens 14.19).
Jésus, qui lisait dans le cœur de ce scribe et connaissait la sincérité et le sérieux des paroles qu’il venait de prononcer, pouvait, afin de l’encourager, lui rendre ce beau témoignage et il le lui rendit sans doute avec d’autant plus de joie et d’amour que son interlocuteur appartenait à une classe d’hommes généralement opposés à son enseignement.
N’être pas éloigné du royaume de Dieu, c’est en être proche, mais n’y être pas entré encore. Pour bien comprendre cette parole, il est évident qu’il ne faut pas entendre le royaume de Dieu dans son accomplissement futur et glorieux, mais dans sa signification actuelle, intime : on est ou l’on n’est pas dans ce royaume selon les dispositions du cœur (Luc 17.21 ; Jean 3.5).
Matthieu (Matthieu 22.46) fait cette même observation à la suite de la question sur l’origine du Christ (verset 37).
Marc la place à la suite de l’entretien sur le plus grand commandement. Cet entretien dut faire une vive impression sur les adversaires, puisque l’un des leurs venait de se déclarer d’accord avec Jésus sur le point central de la vraie religion.
De qui le Christ est-il fils ?
Jésus, après avoir réduit ses adversaires au silence, continue à enseigner dans le temple et demande à la foule comment les scribes peuvent dire que le Christ est fils de David, puisque David, dans un psaume que Jésus cite, l’appelle son Seigneur (35-37).
Les scribes censurés
Jésus met le peuple en garde contre les scribes, dont il stigmatise la vanité, la rapacité et l’hypocrisie (38-40).
Grec : Jésus répondant…(Matthieu 11.25, note). Ce mot rattache étroitement la question de Jésus à la remarque précédente. Jésus répond au silence par lequel ses adversaires avouaient leur défaite, en prenant l’offensive contre eux.
Matthieu (Matthieu 22.41, voir les notes) introduit cette question en nous montrant Jésus entouré de pharisiens auxquels il l’adresse. Mais il y avait là d’autres auditeurs, très nombreux, qui paraissent avoir profité de cet enseignement plus que les adversaires (verset 37).
Jésus attribue aux scribes l’opinion régnante que le Christ ou le Messie devait être fils de David. Ces scribes, ou docteurs de la loi, étant les théologiens du temps (comparer : Matthieu 23.2, note), ce qu’ils enseignaient à cet égard devait avoir de l’importance aux yeux du peuple. Jésus approuve leur opinion et s’en sert pour proposer à ses auditeurs une grave question concernant sa personne.
Par l’Esprit-Saint, ou (grec) dans l’Esprit-Saint.
Matthieu dit : en esprit, c’est-à-dire éclairé, animé par l’Esprit de Dieu, comme l’étaient tous les prophètes, quand ils recevaient une révélation divine qu’ils devaient transmettre à leur peuple (2 Pierre 1.21).
Il faut remarquer ce mot : David lui-même, répété au verset 37, avec une intention marquée, afin de mettre le terme qu’emploie David : mon Seigneur, en parallèle avec le titre que donne à Jésus l’opinion courante : son fils (verset 37).
Psaumes 110.1. Voir, sur cette citation, Matthieu 22.44, note.
Grec : et d’où est-il son fils ? par quelle cause, puisqu’il l’appelle Seigneur ?
Matthieu et Luc disent : Comment est-il son fils ? Voir sur cette question, Matthieu 22.45, note.
À la question du Sauveur, personne ne répond ; (Matthieu 22.46) il se fait un silence significatif. La foule l’écoutait avec plaisir, jouissait de voir les scribes pris au dépourvu. Cette disposition la rendait propre à recevoir le sévère avertissement que Jésus fait entendre (verset 38 et suivants).
Matthieu (Matthieu 23) a conservé un long discours dans lequel Jésus censure les scribes et les pharisiens, en les apostrophant directement, Marc (versets 38-40) et Luc (Luc 20.45-47) n’en reproduisent que quelques paroles adressées au peuple que Jésus met en garde contre l’esprit de ses conducteurs.
Grec : qui veulent se promener en longue robe et ce verbe a aussi pour objet tout ce qui suit : les salutations, les premiers sièges, les premières places.
Ce terme a son importance :
vouloir rend souvent mauvaise une chose indifférente.
Luc écrit aussi : « qui veulent se promener, etc. », puis « qui aiment les salutations, etc ». La volonté est toujours du parti des affections, bonnes ou mauvaises.
Ces longues robes auxquelles tenaient tant les scribes, ces salutations qu’ils recherchaient dans les places publiques, étaient chez eux le signe certain de la vanité qu’ils tiraient de leur rang, de leur profession, de leur secte. Le fait qu’ils prétendaient aux premiers sièges dans les synagogues, aussi bien qu’aux premières places dans les festins, dénotait cet orgueil qui veut briller et dominer dans les cérémonies religieuses comme dans la vie civile.
Reste encore à dévoiler un autre de leurs vices, l’avarice (verset 40).
Grec : dévorant les maisons des veuves et, par prétexte, priant longuement.
On peut expliquer de deux manières les spoliations indiquées par le terme : manger les maisons des veuves : ou bien, ils extorquaient à des femmes pieuses, sous prétexte d’intercéder pour elles, des présents considérables ; ou bien, ce qui est plus naturel et plus piquant, en raison de l’amphibologie qui s’attacherait par là au terme de manger, Jésus fait allusion aux repas somptueux qu’ils se faisaient servir chez ces femmes, en remplissant auprès d’elles l’office de directeurs de conscience. Dans les deux cas, c’étaient les Tartufes de l’époque.
Le jugement que méritent ceux qui joignent l’hypocrisie à tous leurs autres péchés.
Jésus, assis vis-à-vis du trésor, observe ce que les gens y mettent. Il voit une pauvre veuve qui donne deux pites. Il appelle à lui ses disciples et leur déclare que cette femme, qui a mis dans le tronc tout ce qu’elle avait pour vivre, â plus donné que les autres qui y ont mis leur superflu.
Luc 21.1-4. Grec : jetait du cuivre, c’est-à-dire des pièces de monnaie de peu de valeur.
Le trésor du temple se trouvait dans le parvis des femmes et consistait, selon les rabbins, en treize coffres ou troncs, auxquels on donnait le nom de trompettes à cause de leur forme semblable à cet instrument.
Le premier établissement de ce trésor est mentionné dans 2 Rois 12.9.
C’est là qu’on déposait les offrandes volontaires pour le temple et le culte.
Jésus, assis dans cette dépendance du temple, regardait avec attention, contemplait. Ce regard ne s’arrêtait pas à la main qui donnait, mais pénétrait jusqu’au cœur (verset 43).
Grec : deux lepta qui font un quadrant (Matthieu 5.26, note).
Le quadrant était une monnaie romaine et ce mot que Marc met ici comme une explication ou une traduction de la valeur indiquée, montre à quels lecteurs son Évangile était destiné (voir l’Introduction).
Deux pites,… la veuve aurait pu en garder une.
Il y a quelque chose de solennel dans cette action d’appeler à lui ses disciples ; il avait à leur parler
d’une grande chose.
Ce dernier verset explique le précédent.
La pauvre veuve avait réellement mis dans le trésor plus que tous les autres, toutes proportions gardées ; car leur offrande, à eux, était prise dans le surplus ou superflu, tandis que la sienne provenait d’une pauvreté que l’évangéliste s’efforce de faire sentir par trois expressions différentes : de son indigence (grec, de son déficit, de son manque), tout ce qu’elle avait, toute sa subsistance (grec toute sa vie).
Mais ce qui constituait surtout l’immense supériorité de son offrande sur celles des autres, c’étaient ses motifs, dont Jésus pénétrait la valeur morale. Elle ne faisait point une aumône, mais un don pour le culte divin, inspiré uniquement par l’amour pour Dieu, à qui elle donnait ainsi son cœur et sa vie. Et ce qui n’est pas moins touchant que son amour, c’est sa confiance sans bornes en Dieu, à qui elle remet le soin d’un avenir absolument destitué de tout.
Marc et Luc nous ont seuls conservé cette perle entre les récits évangéliques. Comment se fait-il que Matthieu ne l’ait pas recueillie ? Cette question s’adresse à la critique qui prétend que Matthieu a copié Marc ou du moins un proto-Marc.
Quoi ! Matthieu aurait eu sous les yeux un document où se trouvait ce trait si instructif et si touchant et il l’aurait volontairement omis ? Dire, comme on l’a fait, qu’entre les sévères censures prononcées contre les scribes et les pharisiens (Matthieu 23) et le grand discours prophétique sur l’avenir (Matthieu 24), il n’y avait plus de place pour l’histoire de la veuve, c’est une défaite.