Verset à verset Double colonne
Arrivée des mages
Des mages arrivent à Jérusalem et s’enquièrent du roi des Juifs qui est né et dont ils ont vu l’étoile en Orient (1-2).
Hérode troublé
Hérode, troublé, convoque les sacrificateurs et les scribes et s’informe du lieu de la naissance du Messie. Ils répondent que, selon les prophéties, il doit naître à Bethléhem. Hérode demande alors aux mages depuis quand l’étoile a paru et les envoie à Bethléhem, en les chargeant de le renseigner au sujet du petit enfant (3-8).
Les mages conduits par l’étoile
Conduits par l’étoile, dont la vue les remplit de joie, les mages arrivent à Bethléhem, trouvent le petit enfant et sa mère, et, se prosternant, lui offrent des présents (9-11).
Retour des mages
Divinement avertis, ils s’en retournent sans revenir vers Hérode (12).
Beth-Lechem, « maison du pain ». Bethléhem de Judée, pour distinguer cette ville d’une autre du même nom qui se trouvait dans la tribu de Zabulon. Josué 19.15 Notre Bethléhem, nommé aussi Ephrata Genèse 35.16-19 était une très petite ville, située dans la tribu de Juda, à deux lieues au sud de Jérusalem. Cette ville porte aujourd’hui encore le même nom et renferme une population de trois ou quatre mille âmes, en grande majorité chrétienne (voir Félix Bovet, Voyage en Terre Sainte, 7e édition, p. 274 ; Philippe Bridel, La Palestine Illustrée, II).
Hérode, surnommé le Grand, fils d’Antipater. Ce fut lui qui fonda la dynastie de sa famille, iduméenne (édomite), en faisant périr les derniers rejetons de la race asmonéenne des Maccabées. Dès l’âge de quinze ans, il obtint de son père le gouvernement de la Galilée (Josèphe, Antiquités Juives, XIV, 9, 2). Plus tard, Antoine étant venu en Syrie, l’éleva à la dignité de tétrarque et lui fit obtenir du sénat le titre de roi des Juifs (Josèphe, Antiquités Juives, XIV, 14, 5). Mais ce ne fut que trois ans plus tard qu’il put prendre possession de son royaume. Il dut le reconquérir sur Antigone, fils d’Aristobule. Pour s’affermir sur son trône, il fit mettre à mort non seulement sa femme, Mariamne, mais ses deux fils, Alexandre et Aristobule, tout ce qui restait de la famille des Maccabées et une foule de Juifs de distinction qui faisaient opposition à son gouvernement.
Ces crimes, aussi bien que son penchant pour des usages et des divertissements publics empruntés au paganisme, le rendirent odieux à la nation Juive. Il mourut la trente-septième année de son règne, la soixante-dixième de son âge (Josèphe, Antiquités Juives, XVII, 8, 11), l’an 750 de Rome, par conséquent quatre ans avant le commencement de notre ère, ce qui recule d’autant l’époque de la naissance de Jésus-Christ.
Les mages étaient chez les Perses et les Mèdes une caste sacerdotale très considérée ; ils formaient le conseil secret des rois, administraient les affaires religieuses et se vouaient à l’étude de la nature, spécialement de l’astronomie. Il y avait, à la cour de Babylone, un ordre de mages, appelés aussi sages, sur lequel fut établi Daniel. Daniel 2.48 Plus tard ce nom fut donné en Orient à tous ceux qui s’occupaient d’astrologie, de l’interprétation des songes et généralement des sciences occultes.
Au temps de Jésus, il y avait chez les Grecs et chez les Romains de ces hommes qui exploitaient la crédulité populaire, dans des vues de vaine gloire ou de cupidité, comme on le voit par les exemples de Simon et d’Elymas. Actes 8.9 et suivants ; Actes 13.6-8 Évidemment les mages de notre récit appartenaient à la classe antique et honorable de ces savants.
Ils venaient d’Orient, expression vague qui a laissé libre cours aux conjectures sur leur patrie. Vu la nature des dons qu’ils offrent à l’enfant nouveau-né (verset 11), les uns ont pensé à l’Arabie, d’autres à la Perse, d’autres encore à l’Égypte. Les suppositions ne sont pas moins diverses sur leur nombre, fixé à trois par la tradition, à cause des trois offrandes. Même incertitude sur leur rang : l’imagination populaire en a fait des rois, soit pour voir en eux l’accomplissement de passages prophétiques de l’Ancien Testament Psaumes 72.10 ; Ésaïe 49.7 ; Ésaïe 60.3 ; Ésaïe 60.6 ; Ésaïe 60.10 soit à cause de la sensation que fit, jusque dans le palais d’Hérode, leur arrivée à Jérusalem. Ce dernier fait preuve au moins que c’étaient des hommes d’une position considérable. La tradition, qui veut tout savoir, nous a même transmis leurs noms et les appelle : Gaspar, Melchior et Balthasar ! Enfin, de leur question : Où est le roi des JUIFS ? on a conclu avec raison qu’ils étaient païens et l’Église ancienne, les considérant comme les prémices du paganisme amenées aux pieds de Jésus, célébra leur mémoire à la fête de l’Epiphanie, dont elle fit la fête de l’apparition du Sauveur aux gentils, tandis qu’à l’origine elle avait été instituée en commémoration du baptême de Jésus-Christ.
Grec : « Nous prosterner devant lui », lui rendre hommage comme à un grand personnage. Matthieu 20.20 ; Actes 10.25 Ce mot signifie aussi rendre des honneurs religieux, adorer. Voir Matthieu 4.10 ; Actes 7.43.
Au lieu de « son étoile en Orient » plusieurs traduisent : « son étoile à son lever, ou se levant ». Toutes les conjectures faites sur la nature de cette étoile (ou astre) par laquelle les mages furent amenés à Jérusalem, sont de peu de valeur.
Plusieurs interprètes s’arrêtent à l’idée d’une conjonction extraordinaire d’astres qui, selon les calculs du célèbre astronome Kepler, aurait eu lieu vers le temps de la naissance de Jésus ; d’autres pensent à une comète ; d’autres encore à une étoile telle que celle qui fut observée par le même astronome en 1604 et qui disparut en 1605 ; Les termes du récit (son étoile) et surtout le verset 9 prouvent avec évidence que l’écrivain se représente, non un astre céleste ordinaire, non le résultat d’observations astrologiques, mais l’apparition d’un luminaire spécial, qui détermine le départ des mages de leur pays, qui leur réapparaît sur le chemin de Bethléhem et qui vient s’arrêter sur le lieu où était le petit enfant (verset 9). Telle est aussi l’opinion de Calvin.
À la naissance du Sauveur, une vive lumière resplendit aux yeux d’humbles bergers Luc 2.9 les savants mages sont conduits vers lui par une étoile. Furent-ils, en outre, comme les bergers, avertis par une révélation divine ? On l’a supposé, et cela, est possible, puisque bientôt ils reçoivent d’en haut une direction semblable (verset 12) ; mais nous l’ignorons ; ils ne le disent pas, ils ne parlent à leur arrivée à Jérusalem que de l’étoile qu’ils ont vue. Ou bien furent-ils préparés au grand événement qui les préoccupe par l’attente vague, mais universellement répandue en Orient, d’un grand personnage religieux qui devait apparaître à cette époque ?
Autre supposition possible, mais simple supposition. Pouvaient-ils enfin avoir connu et partagé les espérances messianiques du peuple de Dieu par le moyen des Juifs qui habitaient leur pays ? Cela aussi est très admissible. Toutefois renonçant, par un principe exégétique, à la tentative d’aplanir les difficultés d’un récit par des hypothèses qui ne sont ni des explications ni des raisons nous nous bornerons à propos de celui qui nous occupe aux deux remarques suivantes :
Si notre premier chapitre montre que « le salut vient des Juifs », celui-ci déjà indique que les gentils y auront part. Les mages continuent la lignée de ces nobles âmes appelées par la grâce prévenante du sein du paganisme et à laquelle appartiennent Melchisédec, Jéthro, Ruth, Job, Naaman, etc. et, dans les premiers temps de la nouvelle alliance, la Cananéenne, le centenier de Capernaüm et tant de prosélytes craignant Dieu. Les limites du règne de la grâce ne sont pas si étroites qu’elles le paraissent souvent à nos vues bornées (comparer verset 1, note 2).
Hérode tremble pour son autorité pour son trône, peut-être à cause de ses crimes. Et comme le moindre de ses soupçons avait souvent coûté la vie à plusieurs, la peur qu’éprouva un tel tyran pouvait bien troubler ceux qui dépendaient de lui, tout Jérusalem.
Les principaux sacrificateurs étaient, outre le souverain sacrificateur, les chefs des vingt-quatre classes de prêtres. 1 Chroniques 24.1 ; 2 Chroniques 36.14 les scribes, proprement écrivains (hébreu sopherim, les hommes des livres), étaient les savants interprètes de la loi et des Écritures, les juristes et les théologiens du temps. Esdras 7.6, Néhémie 8.1 ; Jérémie 8.8 ; Luc 11.53 comparez Matthieu 23.2, note. Ils appartenaient le plus souvent au parti des pharisiens et la plupart siégeaient au sanhédrin. Il ne parait pourtant pas que ce soit une séance de ce corps qu’Hérode convoque ici, car il y manque les anciens. C’était une consultation de théologiens auxquels il voulait proposer la grave question qui suit.
Grec : Où le Christ naît, selon les Écritures. Le tyran croit donc la prophétie. Foi effrayante ! Jacques 2.19
Bethléhem voir verset 6
Michée 5.1 Cette prophétie est librement traduite par l’évangéliste, qui ne s’astreint ni au texte hébreu ni à la version des Septante, mais emprunte à l’un et à l’autre le sens général qui seul lui importe. L’hébreu dit : « Et toi Bethléhem Ephrata, trop petite pour être dans les milliers de Juda, de toi me sortira celui qui sera dominateur en Israël ; et ses issues sont d’auparavant dès les jours d’éternité ». La version grecque des Septante rend ainsi les premiers mots : « Et toi, Bethléhem, maison d’Ephrata, tu es trop petite pour être dans les milliers de Juda », il y a donc dans cette citation quatre différences à constater :
Ou plutôt paraissait ; depuis combien de temps était-elle en vue (comparer verset 16, note).
Le soupçonneux Hérode, craignant que les mages ne reviennent pas à lui, veut avoir au moins une indication pour le diriger dans ses projets. Mais pourquoi secrètement ? Trait caractéristique chez un tyran qui se défie de tous et craint d’agir au grand jour, surtout lorsqu’il médite un crime.
Hérode ajoute l’hypocrisie et la ruse à son dessein criminel. Mais voyez Job 5.13
Partis le soir ou dans la nuit, selon l’habitude des voyageurs en Orient, les mages revoient soudain l’étoile qu’ils avaient vue en Orient. Son apparition raffermit leur foi, peut-être ébranlée par tout ce qu’ils avaient observé dans cette Jérusalem où ils n’ont trouvé qu’indifférence ou inimitié à l’égard du grand événement qui remplit leur cœur. C’est là ce qui est indiqué au verset suivant par la mention de la grande joie qu’ils éprouvent.
L’étoile allait devant eux, ou les précédait. Ne serait-ce là qu’une illusion d’optique comme le pensent ceux qui admettent l’idée d’un astre ordinaire ou d’une constellation ? Comment s’expliquer que cet astre vient s’arrêter au-dessus du lieu où était le petit enfant ? Si, comme on le prétend, cela signifie que l’astre se trouvait à son zénith, cela aurait-il été une indication pour les voyageurs ? Non, chaque terme de ce récit montre clairement que l’auteur a voulu parler d’une lumière extraordinaire, conduite par la main de Dieu qui se révèle ainsi à ces pieux étrangers (verset 2, note 3).
On ne se présentait devant de grands personnages qu’en leur offrant des présents. Genèse 43.11 ; 1 Rois 10.2 comparer : 1 Samuel 10.27 Le fait que les mages observent cet usage et qu’ils se prosternent devant le petit enfant (verset 2, note 3), montre qu’ils avaient une très haute idée de sa grandeur, sans toutefois qu’on puisse dire jusqu’où allaient leurs lumières à son sujet.
Les objets précieux qu’ils offrent sont des productions qui abondaient dans l’Arabie heureuse, mais qu’on tirait aussi d’autres pays et qui étaient partout en usage : on ne saurait en conclure quelle était la patrie des mages.
On a voulu trouver à ces dons : l’or, l’encens, la myrrhe, un sens symbolique, religieux, ou y voir un secours providentiel qui devint précieux pour la famille pauvre de Jésus dans son voyage et son séjour en Égypte : ce sont là des suppositions plausibles, mais dont l’exégèse n’a pas à s’occuper.
Le but de cette direction divine, qui ne permit pas aux mages de retourner vers Hérode, était d’empêcher l’exécution immédiate des desseins meurtriers du tyran et de sauver ainsi le petit enfant.
Tous les interprètes reconnaissent la profonde signification religieuse de cette histoire des mages d’Orient, laquelle a été signalée déjà dans les notes qui précèdent. Mais plusieurs ont révoqué en doute la réalité historique du fait. À ceux qui rejettent les événements rapportés dans tout ce chapitre, à cause de l’intervention divine qui s’y produit fréquemment, l’exégèse n’a rien à répondre, par la simple raison que la foi au miracle, inséparable de la foi au Dieu vivant et personnel, ne se démontre pas.
Pour ceux dont le doute provient de la difficulté qu’ils trouvent à concilier le récit de Matthieu et celui de Luc, il est juste que la question soit examinée avec soin (voir Luc 2.39, note). Quant aux objections tirées de ce qu’on appelle la niaiserie d’Hérode, qui se laisse jouer par les mages, voir verset 16, note 3.
Fuite en Égypte
Joseph averti par un ange, s’enfuit en Égypte avec Marie et l’enfant Jésus et y séjourne jusqu’à la mort d’Hérode. Son retour accomplira une parole de l’Écriture (13-18).
Massacre des petits enfants
Hérode se voyant trompé, fait mettre à mort les petits enfants de Bethléhem. Les lamentations que provoque ce massacre accomplissent une parole symbolique de Jérémie (16-18).
Retour d’Égypte
Hérode étant mort, Joseph, averti par un ange, retourne avec le petit enfant et sa mère au pays d’Israël. Mais craignant d’aller en Judée où régnait Archélaüs, il se retire en Galilée et s’établit à Nazareth, accomplissant ainsi les déclarations des prophètes (19-23).
Ce nouvel avertissement divin, si important, puisqu’il s’agissait de sauver la vie de l’enfant, eut lieu immédiatement après le départ des mages. Joseph doit fuir en Égypte, parce que ce pays, qui n’était pas sous la domination d’Hérode, pouvait lui offrir un asile sûr. La tradition assigne pour séjour à la sainte famille Mataréa, près d’Héliopolis. Le dessein meurtrier d’Hérode, qui se manifesta bientôt après (verset 16), est clairement révélé à Joseph : le tyran veut faire périr le petit enfant (grec : le perdre, le détruire). À peine né, Celui qui donnera sa vie pour le salut du monde, doit la conserver par la fuite ! Mais son heure n’est pas encore venue et Dieu veille !
On lit dans Osée 11.1 « Quand Israël était un jeune enfant, je l’aimai et j’appelai mon fils hors d’Égypte ». Cette touchante parole de l’Éternel est remise en mémoire à l’évangéliste par son récit actuel et il l’applique au vrai fils de Dieu.
Il n’ignorait pas que cette parole concernait Israël, que Dieu, par amour, appelle son Fils comparez Exode 4.22 ; Jérémie 31.9 aussi n’est-ce la qu’une application symbolique et non l’accomplissement d’une prophétie directe (voir Matthieu 1.22, note).
Ou qu’il avait été trompé dans sa ruse. Le terme est choisi au point de vue d’Hérode, il désigne son impression et non l’intention des mages. On a tiré de ce détail un argument contre la vérité historique de tout le récit relatif aux mages. Comment, a-t-on demandé, ce prince rusé se serait-il fié à la parole de ces étrangers et aurait-il bénévolement attendu leur retour pour exécuter ses projets ? L’objection nous parait peu psychologique. Ignorant ce qu’il y avait de réel ou d’imaginaire dans la naissance d’un enfant dont on lui parle, ne devait-il pas s’en informer, puis découvrir cet enfant, s’il existait ? Or quel moyen plus sûr pour cela, que de faire des mages ses espions involontaires ? Pouvait-il envoyer à l’aventure, avec eux ou avant eux, ses vicaires ? Ne devait-il pas cacher à eux et à son entourage ses desseins ? N’est-ce pas pour cela qu’il les avait interrogés secrètement, avec une profonde dissimulation (verset 8) ? Enfin, le crime est aveugle et même un Hérode peut se tromper dans ses calculs.
Hérode, pour ne pas manquer son but, étend à deux ans le laps de temps qui d’après le récit des mages a pu s’écouler depuis l’apparition de l’étoile.
On a révoqué en doute ce meurtre des enfants de Bethléhem, parce que l’historien Josèphe n’en parle pas. On peut en effet, s’étonner de son silence, mais la conclusion qu’on en tire est arbitraire. Dans le petit bourg de Bethléhem et ses environs, par où il faut entendre quelques maisons isolées autour de ce lieu, il pouvait, selon le calcul de Winer, se trouver dix ou douze enfants mâles au-dessous de deux ans. Or le meurtre de ces enfants, quelque horrible qu’il soit, se perd dans le nombre des crimes de cet Hérode qui, après avoir sacrifié à sa haine soupçonneuse sa femme et deux de ses fils (verset 1, note 1), en fit périr un troisième, Antipater, peu avant de mourir ; qui faisait conduire au supplice des conjurés avec toute leur famille, qui atteint de sa dernière maladie, possédé de fureur contre le peuple de Jérusalem parce qu’il allait se réjouir de sa mort, ordonnait de rassembler dans le cirque de Jéricho tous les principaux de la ville et de les y faire périr dès qu’il aurait expiré, ainsi, disait-il :
qu’il y ait au moins des larmes répandues après ma mort.
Il faut remarquer seulement que le terme de deux ans fixé par Hérode suppose que les mages lui avaient dit que l’étoile leur était apparue depuis plus d’un an déjà (verset 7). Si cette apparition avait coïncidé avec la naissance de Jésus, un intervalle de plus d’une année se serait écoulé entre cette naissance et la visite des mages, mais cela n’est pas probable : les versets 1 et 2 de notre chapitre semblent indiquer que Jésus était né depuis peu quand arrivèrent les mages, Luc nous dit que le domicile habituel de Joseph et Marie était Nazareth et qu’ils ne furent à Bethléhem qu’en passant. Luc 1.26 ; Luc 2.4-39 enfin l’on sait qu’Hérode est mort avant la Pâque de 750 et l’on estime généralement que Jésus est né dans l’année qui précéda la mort de ce prince.
Le massacre de Bethléhem exécuté quelques semaines après la naissance du Sauveur, a été l’un des tout derniers actes du règne d’Hérode. Il faut donc admettre que l’étoile apparut aux mages un an ou deux avant l’événement qu’elle devait leur signaler, de manière à leur permettre d’arriver de leur lointain pays en Judée vers le temps de son accomplissement.
Le texte de l’Ancien Testament Jérémie 31.15 au lieu de gémissements, dit amertume et ajoute lamentations avant pleurs. Les meilleurs manuscrits du Nouveau Testament omettent le mot lamentations.
Encore ici la formule : Alors fut accompli n’indique point une prophétie directe, mais l’application de la pensée de Jérémie au tragique événement de Bethléhem.
Le prophète, pour donner une émouvante expression aux douleurs de son peuple emmené en captivité à Babylone, rappelle que la voix de ses gémissements a retenti vers le septentrion jusqu’à Rama, ville de la tribu de Benjamin Josué 18.25, sur les montagnes d’Éphraïm. Juges 4.5 Par un symbolisme plein de poésie et de vérité, il personnifie toutes les mères israélites dans la mère de la tribu, toutes leurs douleurs dans ses douleurs, mais c’est pour les consoler en ajoutant « Ainsi a dit l’Éternel : Retiens ta voix de pleurer et tes yeux de verser des larmes, car ton travail aura son salaire et on reviendra du pays de l’ennemi ». Jérémie 31.16 Telle est la belle pensée que l’évangéliste rappelle en faisant à son tour de Rachel le type des mères bethléhémites qui pleurent leurs enfants égorgés par le tyran. Ces enfants étaient réellement ceux de Rachel, mère de toute la tribu de Benjamin et morte à Bethléhem où elle fut enterrée Genèse 35.16-19 Aucune prophétie ne s’accomplit, hélas ! Plus rigoureusement que la voix de nos douleurs qui retentit de siècle en siècle.
Il mourut peu après le meurtre ici raconté, d’une maladie horrible, objet de dégoût pour tous ceux qui l’approchaient, le désespoir dans l’âme et le cœur rempli d’affreux projets de vengeance (voir, sur cette fin du tyran, Josèphe, Antiquités Juives, XVII, 8 et 9 et Guerre des Juifs, 1, 33).
Comparer verset 13.
Sont morts : Ce pluriel se rapporte probablement à Hérode seul, ainsi vaguement désigné sans être nommé. L’ange passe sous silence le triste nom de celui qui n’est plus. Cette manière de parler se retrouve dans le livre de l’Exode 4.19. L’allusion à cet événement de la vie de Moïse est frappante. Si les parents de Jésus la comprirent, ils y trouvèrent une grande consolation, en constatant à l’égard de leur enfant une dispensation divine toute semblable à celle qui conserva la vie du grand législateur de leur peuple.
Après la mort d’Hérode, Auguste partagea son royaume entre les trois fils survivants du tyran : Archélaüs eut pour sa part la Judée, l’Idumée et la Samarie et le titre d’ethnarque, avec promesse de la royauté, s’il satisfaisait l’empereur par son administration (Josèphe, Antiquités Juives, XVII, 8, 1 et XVII, 11, 4). Mais après neuf ans de règne, il fut exilé pour ses cruautés à Vienne, dans les Gaules, où il mourut (Josèphe, Antiquités Juives, XVII 13, 2 ; Guerre des Juifs, II, 7, 3). La crainte qu’eut Joseph de venir vivre dans ses états n’était donc pas sans fondement. Dieu mit un terme à ses hésitations en lui montrant la nouvelle résolution qu’il devait prendre.
C’est la quatrième révélation que Joseph reçoit en songe, durant le cours, d’ailleurs assez prolongé, de ses douloureuses expériences. Matthieu 1.20 ; Matthieu 2.13-19 Grande pierre d’achoppement pour ceux qui ne peuvent concilier l’intervention de Dieu dans la vie humaine avec les idées préconçues de leurs systèmes philosophiques. Quant à ceux qui croient au Dieu vivant et vrai, « qui fait ce qu’il lui plaît au ciel et sur la terre », ils considéreront, d’une part les vives sollicitudes de Joseph pour le dépôt sacré confié à ses soins, sollicitudes qui le pressaient, ainsi que sa pieuse compagne, à rechercher sans cesse, par d’ardentes prières, le secours et les directions d’en haut ; d’autre part, la souveraine importance attachée à la conservation de la vie de Jésus. C’est à cause de lui que Dieu se révèle ainsi à son père adoptif. Le vrai miracle ici, c’est la présence, sur notre terre, de Celui qui s’appellera le Fils de Dieu et le Fils de l’homme ; tout le reste n’est plus que le rayonnement de son apparition au sein de notre humanité.
Quant à la nature de ces révélations en songe, qui trois fois ont lieu aussi par le moyen d’un « ange du Seigneur » et qui paraissent appartenir à l’économie de l’Ancien Testament Nombres 12.6-8 plutôt qu’à celle du Nouveau, il serait oiseux de chercher à s’en rendre compte par des analogies psychologiques. En toute manifestation de Dieu à l’homme, le comment nous échappe.
Joseph pouvait désirer, pour des motifs divers, de retourner en Judée, à Bethléhem, où l’avait amené momentanément une circonstance particulière Luc 2.4, où l’enfant était né et où pouvaient l’attirer tant de choses merveilleuses qui s’y étaient accomplies. Il y renonce par la raison indiquée dans ce verset, se retire en Galilée, où le Sauveur devait être élevé dans la plus profonde obscurité et retourne à Nazareth, où il habitait auparavant, ainsi que Marie. Luc 2.39
Faut-il conclure de ce récit et surtout de la manière dont l’évangéliste parle de l’établissement de la sainte famille à Nazareth (verset 23), qu’il fait de Bethléhem la demeure habituelle de Joseph, tandis que Luc le fait résider à Nazareth. On peut s’étonner en effet que Matthieu, en nommant ici pour la première fois Nazareth, ne nous dise pas que cette ville était la résidence précédente de Joseph et de Marie.
Petite ville de la Galilée Matthieu 21.11 ; Luc 1.26 ; Luc 2.4, située sur une colline dans la tribu de Zabulon, au sud de Cana, non loin du Thabor, dans une riante contrée où convergent deux gorges de montagnes (voir, sur ces lieux où s’écoula l’enfance et la jeunesse de Jésus, les belles pages du Voyage en Terre Sainte de Félix Bovet. Comparer Philippe Bridel, La Palestine illustrée).
Il n’y a point de passage dans les prophètes qui appelle le Messie Nazaréen. De là l’embarras des interprètes, qui ont eu recours aux moyens les plus divers pour expliquer ces paroles. Il faut écarter d’abord l’idée que Matthieu cite un prophète perdu ou un livre apocryphe, ou qu’il fait allusion aux vœux du naziréat. Nombres 6.13 Cette dernière opinion, généralement admise au temps de Calvin et qu’il partageait (voir son Commentaire), est grammaticalement fausse et elle ne convient point au caractère du Sauveur (comparer 11.18-19). Un passage d’Ésaïe Ésaïe 11.1 a mis l’exégèse sur la voie d’une interprétation plus admissible : là le Messie est annoncé comme un rejeton, en hébreu netzer, sortant du tronc d’Isaï, expression qui indique l’humiliation du Sauveur, son peu d’apparence aux yeux des hommes. La même désignation se trouve chez les prophètes dans le terme de tsemach, germe. Jérémie 23.5 ; Jérémie 33.15 ; Zacharie 3.8 ; Zacharie 6.12 comparez Ésaïe 53.2 Or le mot netzer est l’étymologie du nom de Nazareth, ou plutôt était son nom même parmi les habitants du pays et l’évangéliste, retrouvant l’idée des prophètes dans ce nom et dans le mépris qu’avaient les Juifs pour cette ville obscure et pauvre de la Galilée Jean 1.46-47 ; Jean 7.52, y voit un accomplissement à double sens des Écritures. Jésus fut en effet appelé avec mépris Nazaréen Jean 19.19 c’est ainsi que le désignent encore aujourd’hui les Juifs, ses adversaires. Ce nom passa même du Maître aux disciples.
On ne saurait nier que cette explication n’ait quelque chose de recherché, d’arbitraire et qui prête à l’évangéliste une interprétation assez rabbinique de l’Ancien Testament. C’est ce qui a porté d’autres exégètes à penser qu’il voulait dire simplement ceci : Le nom méprisé de Nazareth où le Sauveur vient habiter s’attachera à lui ; or les prophètes ont annoncé qu’il serait le méprisé du peuple. Ésaïe 53, Psaumes 22, etc. De là cette allusion tout à fait vague, qui n’est point une citation.
Ce qui est plus important que ces interprétations, c’est l’exemple que nous donne Celui qui « méprisa l’ignominie » Hébreux 12.2 et qui :
nous apprend à nous cacher et à garder le silence, quand le temps d’agir et de parler n’est pas venu.