Verset à verset Double colonne
Ce psaume offre une grande analogie avec les Psaumes 22, 31, 40 et 49. Comme eux, il exprime les sentiments de l’innocent persécuté, isolé en face d’ennemis nombreux, perfides, moqueurs. Telle fut évidemment la situation de David poursuivi par Saül. La note principale du Psaume 35 : Sois l’adversaire de mes adversaires (verset 1), est en quelque sorte le développement de la parole adressée par David à Saül : L’Éternel jugera entre moi et toi. Qu’il défende ma cause ! (1 Samuel 24.16).
Parmi les psaumes que nous venons d’indiquer, le 22 est le seul où l’on ne trouve aucune menace à l’adresse des persécuteurs. Le Psaume 35, comme le psaume 69 appelle sur eux les jugements de Dieu. On voit facilement que ce n’est point un désir aveugle de vengeance qui anime le psalmiste, mais bien la légitime indignation provoquée par l’injustice. De nos jours encore, qui n’a le sentiment, à la vue de l’iniquité triomphante, que, si le châtiment n’atteignait pas les coupables, la gloire de Dieu serait compromise ? À la note que nous avons déjà présentée à ce sujet (Psaumes 5.11), nous ajoutons la citation suivante du Dr. F. Delitzsch : Le devoir de l’amour pour les ennemis est si peu étranger à l’ancienne alliance, que le Nouveau Testament, pour le rappeler, se sert parfois des paroles de l’Ancien (comparez Proverbes 25.21-22 et Romains 12.20). Néanmoins l’esprit de la nouvelle alliance est autre que celui de l’ancienne économie, qui ne connaissait pas encore la révélation de l’amour divin, telle qu’elle s’est produite dans l’œuvre de la rédemption. De cette source ouverte ont jailli des flots d’amour capables d’envelopper et de subjuguer le monde entier. De plus l’éternité, le ciel et l’enfer étaient encore, avant cette révélation, recouverts d’un voile, de sorte que ceux mêmes qui appelaient sur les coupables une malédiction éternelle ne pouvaient se rendre compte de la portée infinie de la condamnation divine. Ce voile disparu, le croyant recule avec effroi devant la perspective d’un châtiment éternel, et, tant que se laisse entrevoir une possibilité de salut, l’amour cherche à retirer d’un tel abîme tout ce qui porte le nom d’homme.
Le Psaume 35 comprend trois prières ou complaintes, terminées chacune par une parole de louange, dans la prévision du secours divin. Les dix premiers versets sont une invocation adressée à l’Éternel comme au guerrier qui peut repousser l’ennemi (versets 1 à 10). Les huit versets suivants exposent l’ingratitude de cet ennemi, qui répond à l’affection par la haine (versets 11 à 18). Les dix derniers versets font appel à la justice de Dieu, pour changer en confusion la joie perfide des persécuteurs (versets 19 à 28).
Appel à l’Éternel pour arrêter l’ennemi (versets 1 à 3), changer sa poursuite en fuite (versets 4 à 6) et le précipiter dans la fosse qu’il a creusée pour l’innocent (versets 7 et 8). Ainsi la détresse de ce dernier sera changée en joie (versets 9 et 10).
Sois l’adversaire… On pourrait traduire aussi : Plaide contre ceux qui plaident, défends ma cause (1 Samuel 24.16). Ce que David demande ici, Dieu le promet aux siens dans les mêmes termes qu’emploie notre psaume (Ésaïe 49.25).
Le petit bouclier : le bouclier rond les troupes légères ; le grand bouclier était de forme oblongue et protégeait le corps presque en entier. L’Éternel est invité à parer les coups de l’ennemi par tous les moyens possibles.
Après les armes défensives, les armes offensives. On traduit aussi : Tire la lance et la hache d’armes, pour aller à la rencontre… Mais la hache ne paraît pas avoir été employée comme arme de guerre par les Israélites.
Que le triomphe sur lequel comptent les ennemis se change en honteuse défaite, sous l’épée de l’ange de l’Éternel (verset 5). Pour cette dernière expression, voir Psaumes 34.8, note. Les Psaumes 34 et 35 sont les seuls où elle se trouve.
L’ennemi en fuite tombera dans le piège qu’il a tendu lui-même. Comparez Psaumes 7.15-17.
Sans cause : gratuitement, sans que j’aie rien fait pour mériter cela. Voir verset 19, note.
La fosse et le filet, littéralement : la fosse de leur filet. On peut se représenter une fosse recouverte d’un filet où se prend la victime. Mais plusieurs interprètes admettent qu’une transposition de mots s’est produite par une faute de copiste et traduisent : Ils ont caché sans cause sous mes pas leur filet ; sans cause ils ont creusé la fosse pour m’ôter la vie.
Tous mes os… De même qu’ailleurs la détresse, l’envie ou le remords sont dépeints comme attaquant la moelle des os (Psaumes 6.3 ; Psaumes 23.3 ; Proverbes 14.30, etc.), ici c’est la joie qui renouvelle et vivifie l’être tout entier. Comparez Psaumes 51.10 ; Proverbes 3.8.
La prière est interrompue jusqu’au verset 17 par l’exposé indigné de l’ingratitude des persécuteurs.
Par des questions adroites on cherche à obtenir de l’accusé des paroles qui le compromettent.
Ils me rendent le mal pour le bien. C’est ce que Saül lui-même avoue, 1 Samuel 24.18.
Dans l’abandon. Les amis fidèles, comme Jonathan, ne peuvent suivre David ; d’autres, liés jadis avec lui, l’épient et le trahissent.
Je prenais le sac, en signe de deuil. Comparez Psaumes 30.12 ; Genèse 37.34, note.
La tête penchée sur mon sein, littéralement : ma prière revenait (ou reviendra) sur mon sein. De nombreuses explications ont été données de cette parole. Elle nous semble indiquer l’attitude du suppliant et la concentration de son esprit dans la prière.
Dans le deuil, littéralement : sombre, négligé (dans ma tenue et mes vêtements). Dans une grande douleur l’on négligait de se laver le visage et d’oindre sa chevelure (2 Samuel 19.24), on se couvrait même parfois de poussière (Job 2.12).
À l’affection de David, on répond par des bouffonneries et des sarcasmes.
Mon unique : mon âme, ma vie ; on n’en a qu’une seule. Voir Psaumes 22.21, note.
Dans une grande assemblée. Comparez Psaumes 22.23. La ressemblance entre les deux psaumes apparaît dans les expressions, aussi bien que dans le mouvement général de la pensée, dans l’assurance, en particulier, que la délivrance du persécuté sera un sujet de joie pour un grand nombre de gens.
La description de la méchanceté des ennemis reprend à nouveau, mais cette fois sous forme de prière ; et peu à peu, à partir du verset 22, la certitude se fait jour que le triomphe des méchants aboutira a leur confusion.
Qui m’ont haï sans cause. Ce qui est dit ici de l’innocent persécuté a trouvé son plein accomplissement dans le sort du juste parfait (Jean 15.25).
Ne clignent pas de l’œil, en signe d’entente maligne et méchante.
Car… Ce verset justifie, par un trait nouveau de l’attitude des ennemis, la prière du verset 19.
La paix : au lieu de la rechercher, ils manœuvrent contre les gens paisibles.
Ils ouvrent toute grande leur bouche… grande par les menaces qui en sortent et l’accent de triomphe qui les accompagne.
Nos yeux ont vu… ta détresse ou les preuves de ton crime.
Tu as vu. Le psalmiste s’empare de ce mot des méchants, pour l’appliquer à l’Éternel, qui a tout vu, mais autrement qu’eux.
Selon ta justice. Cette justice serait violée, si l’ennemi pouvait dire : Nous l’avons englouti !
À la confusion des méchants correspond la joie des gens de bien. Comme en de nombreux psaumes, le psalmiste, au terme de sa prière, ressent déjà cette joie à l’avance.
Exalté soit l’Éternel, littéralement : Qu’il soit reconnu grand. Cette parole forme antithèse avec les derniers mots du verset 26, dont la traduction littérale est : Qu’ils soient confus, ceux qui se font grands contre moi.