Fort connue des Égyptiens, comme on peut s’en convaincre par l’histoire de Joseph chez Potiphar, la prison était inconnue des anciens Hébreux ; il n’en est pas parlé dans toute la législation de Moïse, et ce n’est que plus tard qu’elle devint un châtiment assez ordinaire (cf. Esdras 7.26). Quelques passages du livre de Job ne peuvent rien prouver, malgré son ancienneté, parce qu’il décrit des mœurs étrangères à la Palestine. Deux exemples d’arrestations préventives, celui d’un Israélite lapidé pour avoir ramassé du bois le jour du sabbat (Nombres 15.32-36), et celui du fils de l’Égyptien, lapidé aussi pour avoir blasphémé (Lévitique 24.10-12), non seulement ne prouvent rien, puisque le mot de prison, employé par quelques traducteurs, signifie proprement garde, ainsi que l’ont rendu nos versions, et que rien n’indique qu’il soit question du dépôt dans un lieu spécial, plutôt que d’un simple état de surveillance et d’arrêt ; mais encore, ils ne peuvent rien prouver si l’on se rappelle que ces deux scènes se passent dans les campements du désert, où certes on ne supposera pas que les Israélites traînassent une prison après eux. Lors donc que M. Pastoret (dans son Moïse considéré comme législateur, p. 342), dit que dès qu’un homme était soupçonné ou accusé d’un forfait, on s’assurait de lui par l’emprisonnement, et que l’Écriture en offre plusieurs exemples, il parle d’une manière un peu hasardée, et M. Cellérier (Espr. de la Lég. Mos. II, 325) n’a fait que justice en lui reprochant un esprit superficiel. La prison préventive peut toujours être remplacée par un cautionnement, et la prison, comme peine, par une amende. Or, au milieu d’un peuple agriculteur, où chacun possédait un bien de terre, chacun pouvait être puni par une amende ; la prison n’était pas indispensable, et, d’un autre côté, elle eût pu être nuisible en arrachant aux travaux de la terre les hommes qui devaient la travailler ; elle eût été pour eux tout à la fois une privation de la liberté, et une amende souvent considérable, en occasionnant un temps plus ou moins long de jachère, et une diminution dans le revenu.
Sous les rois, alors que par l’accumulation des richesses entre certaines mains, la pauvreté, qui devait être inconnue dans le pays, avait fini par se montrer, la prison put être aussi substituée à l’amende, mais ce ne fut pas législativement ; ce fut plutôt arbitrairement, sous de méchants rois, et contre des hommes de Dieu trop libres dans leurs censures (2 Chroniques 16.10 ; Jérémie 20.2 ; 32.2 ; 33.1 ; 37.15). Après l’exil, elle devint beaucoup plus habituelle, notamment sous la domination étrangère (Matthieu 11.2 ; Luc 3.20), et on l’appliqua soit à ce que les Juifs appelaient des délits religieux, la prédication de l’Évangile (Actes 5.18-21 ; 8.3 ; 12.4 ; 22.4 ; 26.10), soit à l’insolvabilité des débiteurs (Matthieu 18.30).
Les plus anciennes prisons consistaient simplement parmi les Juifs en des citernes sans eau, dont la profondeur et l’étroite ouverture suffisaient pour empêcher les détenus de s’échapper sans un secours du dehors (Genèse 37.20-22) ; quelquefois une vase épaisse, comme celle dans laquelle Jérémie enfonça (38.6), rendait l’emprisonnement une peine beaucoup plus grave et plus douloureuse. Il y avait des espèces de prisons d’état souterraines comme celle de Jérémie 37.16, d’autres aux portes des villes, ou au-dessus de ces portes (Jérémie 20.2), comme on en trouve de nos jours encore dans plusieurs de nos villes fortifiées, et qui servent à détenir préventivement pendant la nuit ceux qui ne justifient pas suffisamment de leurs personnes ou de leurs intentions ; il y en avait d’autres attachées aux palais des rois (Jérémie 32.2), dans les loges des gardes royaux ; d’autres enfin dans la maison du chef des gardes du roi, qui servait en même temps d’exécuteur des hautes œuvres (Genèse 39.20 ; 40.4 ; Jérémie 37.15-21).
Les prisonniers étaient serrés de chaînes (Juges 16.21 ; 2 Samuel 3.34 ; Jérémie 40.1), et sous la domination romaine ils étaient attachés par une ou par les deux mains, aux soldats chargés de les garder (Actes 12.4 ; 21.33) ; quelquefois leurs pieds étaient enfermés dans des ceps de bois, quelquefois aussi les pieds et le cou (Job 13.27 ; 33.11 ; Actes 16.24), quelquefois encore les pieds et les mains ; ils étaient traités comme le sont les esclaves dans les colonies où l’émancipation n’a pas encore eu lieu ; Jérémie fut mis aux ceps (20.2). Une nourriture maigre et rare était une aggravation de peine (2 Chroniques 18.26). Simhi est un exemple d’arrêts privés (1 Rois 2.37). On peut conclure de Matthieu 25.36 (cf. Jérémie 32.8), que les visites aux prisonniers étaient, en Orient, moins difficiles, moins entourées de formalités qu’elles ne le sont chez nous.