Nous trouvons déjà dans l’ancienne histoire d’Israël les chariots employés comme moyens de transport pour les vases du tabernacle (Nombres 7.3), pour l’arche (1 Samuel 6.7-8 ; 2 Samuel 6.3), pour fouler le grain (Amos 2.43), ou pour conduire des princes et des rois : dans ce dernier cas, c’étaient plutôt des équipages d’apparat (1 Samuel 8.41 ; 2 Samuel 15.1), que des voitures de voyage ; on en trouve cependant (Genèse 45.19 ; 1 Rois 12.18 ; 22.35 ; 2 Rois 9.27 ; Actes 8.28). La Palestine étant peu propre, à cause de ses montagnes, à la circulation des chars, les Israélites préféraient les montures aux attelages, et se servaient ordinairement d’ânes, de chevaux et de mulets ; les chariots n’apparaissent que rarement dans leur histoire, et presque toujours dans des occasions solennelles ou dans des moments extraordinaires ; ils formaient presque un apanage des riches.
Les chariots dont l’Écriture parle le plus souvent sont les chariots de guerre ; ils étaient de deux sortes, ceux qui servaient aux princes et aux généraux, et ceux que l’on envoyait, armés de fer, pour briser les rangs des ennemis, et ravager leurs armées ; on trouve même des chariots armés de faux, que le roi de Syrie amenait contre la Judée. Les auteurs profanes, Diodore de Sicile, Quinte-Curce, Xénophon, racontent combien étaient effroyables dans leurs effets, ces machines roulantes, hérissées de piques et de lances de tous les cotés ; au timon, des piques avec des pointes de fer qui regardaient en avant ; au joug des chevaux, deux pointes longues de trois coudées ; et partout des crocs de fer. Quelquefois on mettait encore sur ces chariots plusieurs hommes bien armés, qui combattaient à coups de dards et de flèches. L’essieu était plus long que celui des chars ordinaires, et les roues plus larges et plus fortes, pour pouvoir résister à l’effort du mouvement, et afin que le chariot fût moins sujet à verser, au milieu des heurts et des chocs que sa forme irrégulière pouvait lui faire rencontrer. Le siège du cocher était une espèce de petite tour de bois bien solide, à hauteur d’appui, et le cocher s’y tenait, armé de toutes pièces et couvert de fer.
Les plus anciens chariots de guerre dont on ait connaissance sont ceux de Pharaon, qui furent submergés dans la mer Rouge. Nous en voyons encore dans l’armée des Cananéens (Josué 11.4), dans celle des habitants de la vallée que la tribu de Juda ne put déposséder (Juges 1.19), dans celle de Siséra (Juges 4.3), chez les Philistins qui, dans leur guerre contre Saül, ne comptèrent pas moins de 30000 chariots attelés et 6000 chevaux de cavalerie (1 Samuel 13.5), et, enfin, dans l’armée de Hadarhéser, à qui David prit mille chariots, dont il conserva cent pour son usage ; mais il ne paraît pas que ni lui, ni aucun autre roi hébreu, se soient jamais servis de chariots pour la guerre, et nous ne voyons aucune expédition dans laquelle Salomon ait employé un seul des 1400 chariots et des 12000 chevaux qu’il possédait (1 Rois 10.26) ; aussi l’inégalité du terrain en eût-elle rendu l’usage fort inutile et fort embarrassant.
Quant aux chars que montaient les rois et les généraux dans les batailles, on n’en connaît pas bien la forme ; mais on peut croire qu’à l’exception des accessoires meurtriers, elle se rapprochait assez de celle des autres chariots de guerre par la longueur de l’essieu et le peu de hauteur des roues ; ils étaient ordinairement suivis d’un autre chariot vide, afin que s’il arrivait un accident au premier, la course et les travaux du roi ne fussent pas interrompus (2 Chroniques 35.24 ; cf. Genèse 41.43).
C’est dans un chariot de feu que le prophète Élie fut enlevé de la terre (2 Rois 2.11), et le prophète Élisée, voulant fortifier la foi de son serviteur (ce n’était plus Guéhasi) contre les entreprises du roi de Syrie, lui fit voir la montagne pleine de chevaux et de chariots de feu, l’armée de l’Éternel, qui entouraient Élisée. Soit que l’Écriture ait voulu descendre aux formes humaines pour expliquer la présence et la force divines, soit que les choses du ciel ne diffèrent des choses humaines que par leur perfection et par leur sainteté consumante, soit enfin que, dans un moment donné, l’armée céleste ait revêtu l’apparence des armées terrestres, mais pour se montrer en même temps une armée foudroyante, nous devons admettre les faits tels qu’ils nous sont racontés, sans nous arrêter à des considérations ou à des hypothèses plus ou moins légères ou frivoles, sur la nature de ces chariots, ou plutôt sur la question de savoir s’ils ont été réels ou s’ils n’ont été qu’apparents. Il y a des chariots de feu dans l’armée qui veille autour des rachetés de Jésus. Et le paganisme qui, souvent, n’est qu’une grossière défiguration de la vérité, avait aussi consacré à ses divinités des chars et des chevaux ; Hérodote, Xénophon et Quinte-Curce parlent des chariots blancs, traînés par de magnifiques chevaux de la même couleur et couronnés de guirlandes, que les Perses consacraient au soleil dans leurs cérémonies solennelles. Le roi Josias fit brûler des chariots que ses prédécesseurs avaient voué au culte de cet astre (2 Rois 23.11).
L’Écriture parle encore d’une autre espèce de chariots, ceux des aires, dont on se servait pour briser la paille ou pour séparer le grain de l’épi (voir Ésaïe 25.10 ; 28.27 ; 41.15 ; Amos 1.3 ; 2.13). Ils étaient portés sur des roues fort basses, garnies de fer, qu’on roulait sur la paille ; d’autres fois même c’étaient de simples rouleaux de bois armés de crocs, des espèces de herses (2 Samuel 12.31), que l’on faisait passer sur les gerbes ; cf. Virgile ; Géorg. 1, 163.164.(Dans ce passage de Virgile trahea est un chariot sans roues, et tribula une espèce de chariot armé de dents de toutes parts). Ces chariots champêtres ont une fois, et à la honte d’un grand roi, été employés à broyer des ennemis vaincus : David s’étant emparé de Rabba, ville de Hammon, en prit les habitants et les mit sous des scies et sous des herses de fer, etc., (2 Samuel 12.31). Ces scies n’étaient probablement pas autre chose que les chariots à roues, appelés scies par les Septante et par saint Jérôme (plaustrum habens rostra serrantia), et les herses étaient les traîneaux sans roues, l’autre espèce de char à battre le blé (Amos 1.3), dit que les Israélites de Galaad ont éprouvé un traitement semblable de la part du roi de Damas, et l’on sait que les anciens Germains, les Carthaginois et les Romains avaient imaginé de faire mourir les hommes sous des claies chargées de pierres.