Quatrième fils de Jacob et de Léa. Son nom signifie en hébreu : louange de l’Éternel (Genèse 29.35, J ; Genèse 35.23, P). Dans Genèse 49.8, Jacob reprend ce thème de la « louange ». Une chose est certaine : la destinée du clan de Juda surpasse en grandeur celle de ses autres frères, car toute la littérature postexilique, macchabéenne, voire chrétienne du Ier siècle, retient son nom, de même que les vieilles traditions des documents E et J mettent en relief son ascendant : comparez Genèse 37.22 ; Genèse 37.26 ; Genèse 42.37 ; Genèse 43.3 ; Genèse 44.16 ; Genèse 46.28. Dans l’histoire de Joseph (voir ce mot), Ruben et Juda prennent alternativement la parole, lors de la transaction relative à la vente de leur frère. Juda est placé sur le même pied que les premiers-nés de la famille de Jacob ; il jouit d’une considération évidente au moment des délibérations. Il faut noter cependant que Juda est présenté dans un jour très défavorable par Genèse 38, où s’affirme la crudité des mœurs antiques ; toutefois, si l’on voit derrière la scène le reflet de la vie d’un clan, il est aisé d’y découvrir un aperçu de l’influence désastreuse des Cananéens sur des nomades passant à l’état sédentaire. La législation du Deutéronome, tout en apportant un adoucissement dans la pratique ancestrale du lévirat (Deutéronome 25.5), n’atténue en rien le récit de Genèse 38. L’allusion aux Cananéens est confirmée par 1 Chroniques 1.3 qui mentionne des infiltrations de ce peuple au sein du clan de Juda, et cela, presque au lendemain de la conquête ; des pertes subies justifient, semble-t-il, la tentative de réparer ce que la mort a détruit.
Les Calébites et les Jérahméélites représentent ces éléments étrangers à Juda, qui allient leurs forces à celles des vainqueurs affaiblis, tout en occupant une situation indépendante dans la famille adoptive (voir 1 Samuel 27.10 ; 1 Chroniques 2.9 ; 1 Chroniques 2.18 ; 1 Chroniques 2.25). D’après Nombres 13.6, Caleb représente Juda dans la composition de la colonne d’espions envoyée en exploration au pays de Canaan ; le même nom figure Nombres 32.12 ; Josué 14.6 ; Josué 14.14. Othniel, le juge, est cité en qualité de parent de Caleb (Juges 4.9) ; il le devint à la suite d’un acte de bravoure accompli lors de la prise de Débir ; ce haut fait attira sur lui l’attention de la fille du chef et l’idylle se termina par le mariage (Josué 15.17). Le document P, dans Genèse 36.16 ; Genèse 36.42, rapporte l’admission d’alliés issus d’Édom ; Juges 1.19 confirme ce fait : la résistance cananéenne, secondée par un excellent matériel de guerre, infligea de graves pertes à Juda. En résumé : l’existence de Juda, en tant que groupe ethnique, est due à l’apport d’éléments non-israélites ; outre ces renseignements se rapportant à Caleb et à ses alliés, Juges 1.16 parle des fils du Kénien, beau-père de Juda, qui unirent leur sort à celui des descendants de Juda. Dans le cantique de Débora aucun hommage n’est octroyé à Juda, mais à Jaël femme de Héber le Kénien ; le nom de ce dernier clan associé appuie les observations qui précèdent (Juges 4.11 ; Juges 4.17 ; Juges 5.24). D’après les chiffres de recensements, fortement sujets à caution, dans les passages sacerdotaux, la population de la tribu représentait environ les 12 ou 13% d’Israël, non compris Lévi (Nombres 1.27 ; Nombres 26.22) ; c’est la tribu donnée pour la plus nombreuse.
La destinée ultérieure de cette tribu est liée à l’histoire du royaume de Juda (voir Israël). Le choix de Jérusalem comme capitale de David groupa autour d’elle l’ensemble des tribus éparses ; après le schisme c’est la cité sainte qui maintiendra l’existence de Juda, jusqu’en 586 ; au retour de l’exil, c’est Juda qui sauvera la nation d’une ruine complète. Le nom national d’Israël, accaparé par le royaume du nord epuis longtemps détruit, fait place au nom de la tribu qui désormais représente le peuple : Juda, les Judéens, les Juifs (voir ce mot). La piété de ce clan servit de berceau à une nombreuse lignée de prophètes.
Dans deux passages du Nouveau Testament (Matthieu 2.6; Luc 1.39), le pays de Juda mentionné représente une petite portion de l’ancienne tribu de ce nom, la région d’Hébron et Bethléhem ; mais, pour le second texte, voir aussi Juta. La tribu elle-même est citée dans Hébreux 7.14 ; Apocalypse 5.5 ; Apocalypse 7.5. Voir Tribus d’Israël.
P. W.
Numérisation : Yves Petrakian