La ligne presque droite de la côte de Palestine est interrompue au nord du Carmel par un petit golfe, la baie d’Acre, où se font face deux ports : au sud Haïfa, et au Nord, sur un promontoire rocheux, une ville célèbre dans l’histoire, dont le nom a changé avec les époques : Acco, Ptolémaïs, Saint-Jean-d’Acre.
Acco n’est mentionnée qu’une fois dans l’Ancien Testament : d’après Juges 1.31 elle appartenait théoriquement à la tribu d’Asser, mais sans avoir été réellement conquise par les Israélites ; c’était donc une ville phénicienne, comme Tyr et Sidon plus au nord. Quoique offrant un bon port et une forte position militaire, la ville semble avoir occupé un rang secondaire tant qu’elle dépendit de Tyr qui tenait à la suprématie. Elle acquit plus d’importance au temps d’Alexandre, et surtout sous les souverains grecs d’Égypte : c’est, semble-t-il, en l’honneur de Ptolémée II Philadelphe (284-247) qu’elle fut nommée Ptolémaïs (ou Ptolémaïde). Elle est souvent citée dans (1 Macchabées 5.15 ; 1 Macchabées 5.22 ; 1 Macchabées 5.55 ; 1 Macchabées 10.1 ; 1 Macchabées 10.39 ; 1 Macchabées 10.56 ; 1 Macchabées 11.22 ; 1 Macchabées 12.45). De nombreux Juifs s’y étaient établis. Il s’y forma de bonne heure une Église chrétienne. Saint Paul y trouva des frères à son passage lors de son dernier retour à Jérusalem (Actes 21.7).
La période la plus brillante de l’histoire de la ville fut celle des Croisades. Le souverain du royaume chrétien de Jérusalem en fit sa résidence, et l’ordre des Chevaliers de saint Jean y eut son principal siège. De là le nom de Saint-Jean-d’Acre qui lui resta pour les Européens, tandis que les Arabes s’en tenaient au vieux nom d’Acca ou Acco. En 1790, le général Bonaparte tenta en vain de s’emparer de Saint-Jean-d’Acre, que défendait une garnison turque.
Aujourd’hui, le port, fort négligé pendant des siècles de régime mahométan, s’est ensablé et le commerce lui a préféré Haïfa. La ville elle-même est restée en assez mauvais état depuis le siège qu’elle a subi en 1840, quand le général Napier, combattant pour les Turcs, l’enleva de vive force à la garnison égyptienne. Une partie des vieux remparts a subsisté et on y jouit d’une vue merveilleuse : au sud, le Carmel se mire dans la baie ; vers l’Est, la grande plaine d’Esdrelon et, plus loin, les collines de Galilée ; au Nord, dans le lointain, les blancs sommets du Liban. Malgré l’état de son port, la ville fait un commerce relativement important de grain, moissonné dans les plaines du voisinage. C’est le meilleur blé de toute la Palestine, et le pain de Saint-Jean-d’Acre est fameux. On peut penser que cette réputation est ancienne ; elle rappelle la mention de la bénédiction de Jacob : « D’Asser vient le pain savoureux » (Genèse 49.20).
Numérisation : Yves Petrakian