Ne m’abandonne pas au temps de ma vieillesse
Bien que ce psaume ne soit pas, comme le précédent, un fragment d’un autre psaume, nous y trouvons de nombreuses réminiscences de cantiques plus anciens. Le psalmiste, surtout dans la première strophe, reproduit librement et comme exprimant ses propres pensées, les paroles que peut-être il a jadis chantées avec le peuple. L’auteur, un vieillard dans une position élevée (versets 18, 21), a derrière lui une vie agitée, mais remplie de délivrances merveilleuses (verset 7). Exposé à de nouvelles luttes, à l’âge ou les forces commencent à lui faire défaut, il a besoin plus que jamais du secours de Dieu. Le nous, qu’il emploie au verset 20, montre que sa cause est celle de son peuple ou du moins d’un groupe de fidèles. Les Septante donnent au psaume la suscription suivante : De David (ou plutôt : À David ; ils désignent par là l’auteur présumé). Puis ils ajoutent la notice suivante : Des fils de Jonadab et des premiers captifs, indiquant par là, semble-t-il, les hommes auxquels appartenait plus spécialement ce cantique. On ne comprend guère la mention de David, dont le langage vif et imagé ne se retrouve pas dans ce cantique ; elle est d’ailleurs contredite par la seconde indication, concernant les fils de Jonadab, indication qui ne peut avoir été inventée et doit reposer sur une ancienne tradition. Jonadab était le père des Récabites que Jérémie donne en exemple au peuple (Jérémie 35.1). Le psaume remonterait donc à l’époque de ce prophète et des premières déportations à Babylone. Certains exégètes partant de cette donnée, l’attribuent, ainsi que le Psaume 69, avec lequel il offre plus d’une ressemblance, à Jérémie lui-même. Il se peut qu’il ait été conservé dans la famille des Récabites jusqu’au retour de la captivité.
Il se compose de quatre strophes, de six versets chacune. Le psalmiste est rempli du désir de louer Dieu, mais les dangers qui l’entourent, semblent de nature à faire croire qu’il n’a plus aucun sujet de louange. Cependant, de strophe en strophe, la certitude de la délivrance s’accentue ; elle finit par triompher de toute crainte.
L’Éternel, refuge du fidèle (1-6)
Comme pour s’encourager à prier, le psalmiste s’approprie les requêtes d’autres hommes de Dieu. Le commencement de la strophe (versets 1 à 3) est emprunté au Psaume 31, la fin (verset 6) au Psaume 22.
Où je puisse aller continuellement, aussi souvent que l’on va dans sa propre maison. Au lieu de ces mots, qui sont propres à notre psalmiste, les Septante conservent ici le texte du Psaumes 31.3
: un lieu fort, où je puisse me sauver.
Tu as donné l’ordre que je fusse sauvé : parole précieuse pour le fidèle qui se l’applique ! Comparez Psaumes 78.12.
Seigneur Éternel. Nom significatif, l’objet de l’espérance, du croyant n’est rien moins que le Maître de l’univers, l’Être qui seul existe par lui-même.
J’ai reposé, littéralement : j’ai été déposé, expression qui fait ressortir toute la passivité de l’enfant. À ce moment de la naissance, où l’être humain n’a pas encore conscience de lui-même il est confié, sans le savoir, à un appui inébranlable.
Le sujet de mes louanges. Dès que la connaissance est venue, l’âme pieuse a trouvé dans les bienfaits reçus d’innombrables sujets de louange.
Prière (7-12)
Je suis comme un prodige. Les événements de sa vie, épreuves et délivrances, dépassent la mesure des phénomènes ordinaires et naturels. Mais le secret de la conservation d’un homme si fortement éprouvé est dans le fait que Dieu a toujours été son refuge.
Ne me rejette pas… C’est à cette requête qu’aboutit tout ce qui précède.
Prière et louange (13-18)
Qu’ils soient confus… Qu’ils le soient par le fait même de ton intervention (verset 12), puisqu’au lieu d’avoir affaire à un homme impuissant, ils se trouveront en face de Dieu.
Je n’en connais pas les bornes. C’est pourquoi la louange pourra recommencer sans cesse.
La tienne seule. À côté de la justice de Dieu, aucune autre justice, n’est digne d’être mentionnée (Psaumes 115.1 ; Éphésiens 2.8).
Tu m’as enseigné à reconnaître les signes de ton intervention dans ma vie et dans le monde.
Louange triomphante (19-24)
Ta justice atteint jusqu’au ciel… C’est peut-être ici une réminiscence de Psaumes 36.6.
Après nous avoir fait voir… Le psalmiste ne regarde pas seulement à ses expériences personnelles. Au reste tout le psaume est pénétré de la pensée qu’un lien intime unit le fidèle à l’ensemble des croyants et que ses épreuves doivent faire éclater aux yeux de tous la gloire de Dieu. Comparez Psaumes 22.24-31.
Remonter des abîmes de la terre. Cette image, destinée à représenter la plus extrême détresse, suivie de la plus grande des délivrances, trouve un accomplissement littéral dans la résurrection du Sauveur et dans celle qui, par lui, sera la part des rachetés. Comparez Psaumes 68.21.
Tu accroîtras ma grandeur. Les délivrances divines ne rétablissent pas seulement le fidèle ou le peuple de Dieu en son ancien état, elles l’élèvent plus haut ; mais le fidèle à son tour ne voit dans cette haute position qu’une occasion plus riche de louer Dieu avec tous les moyens mis à sa portée (versets 22 à 24).