Verset à verset Double colonne
Le schisme qui s’accomplit sous le fils de Salomon dura deux siècles et demi (975 à 722 avant Jésus-Christ). Pendant ce temps, douze rois, tous de la famille de David, selon la promesse de l’Éternel, régnèrent sur Juda, tandis que dix-neuf rois, de neuf dynasties différentes, séparées deux fois par des périodes d’anarchie, se succédèrent dans le royaume des dix tribus. Le malheur de ce peuple fut qu’au schisme politique voulu de Dieu vint s’ajouter le schisme religieux, par l’idolâtrie qu’introduisit dès le commencement Jéroboam et qui prit depuis le temps d’Achab un caractère plus impie encore.
Une ligne passant à la hauteur de Béthel marquait la limite des deux royaumes, qui fut d’ailleurs souvent modifiée : les deux États, étant à peu près d’égale puissance, consumèrent fréquemment leurs forces dans des luttes fratricides. Celui d’Israël, dépourvu de la royauté légitime et du culte légal, tomba le premier devant les ennemis extérieurs ; celui de Juda, qui avait conservé la dynastie et le culte institués de Dieu et qui possédait ainsi une force morale plus considérable, survécut à peu près d’un siècle et demi à la chute de l’autre.
Première période : depuis le schisme jusqu’aux règnes de Josaphat, en Juda et d’Achab, en Israël (de 975 à 918 environ). Pendant cette période, il y a guerre incessante entre les deux royaumes ; trois rois se succèdent en Juda, tandis que le trône d’Israël est occupé par six rois appartenant à quatre familles différentes, dont chacune détrône et détruit la précédente. Juda reste attaché au culte de l’Éternel ; Israël se livre au culte du veau d’or ; ce culte était censé s’adresser à l’Éternel, mais il fraya la voie à une idolâtrie plus grossière.
Cet événement d’une gravité exceptionnelle ne s’explique pas seulement par la réponse hautaine de Roboam aux réclamations du peuple. Cette réponse en fut l’occasion et le prétexte ; mais dès longtemps régnait entre Juda et Éphraïm, la plus puissante des tribus du nord, une rivalité profonde qui avait éclaté plus d’une fois (Juges 8.1 ; Juges 12.1 et suivants ; 2 Samuel 2.9 ; 2 Samuel 19.42 et suivants) et qui s’était récemment accrue. La suprématie de Juda s’était accentuée par l’élévation de Jérusalem au rang de capitale et par la construction du temple et avait soulevé davantage la jalousie d’Éphraïm. Sans doute, la scission est présentée comme un dessein de Dieu (1 Rois 11.11 ; 1 Rois 11.31 ; 1 Rois 12.15 ; 1 Rois 12.24) ; comme telle, elle devait servir à humilier Israël, qui s’était enorgueilli sous le règne glorieux de Salomon (1 Rois 11.39). Mais, dans l’intention divine, le schisme devait rester de nature purement politique ; la rupture religieuse, introduite par Jéroboam, lui donna un caractère absolument condamnable.
Roboam se rendit à Sichem. Sur Sichem, située dans le territoire d’Éphraïm, entre les monts Ébal et Garizim, comparez Josué 24.1. Il y avait déjà dans le choix de cette ville un symptôme grave de révolte dont Roboam aurait dû tenir compte.
Tout Israël était venu : tout le peuple des dix tribus, représenté par ses principaux chefs. L’opposition des deux dénominations : Juda et Israël, se trouve déjà Josué 11.21 ; 1 Samuel 11.8 (note).
Pour le faire roi. Le droit de reconnaître et d’installer dans sa charge le roi choisi par l’Éternel appartenait au peuple et celui-ci l’avait exercé à l’égard des trois rois précédents (1 Samuel 11.15 ; 2 Samuel 2.4 ; 2 Samuel 5.3).
Reçut la nouvelle : non celle de l’assemblée de Sichem, ce qui forcerait d’assigner à cette assemblée une bien longue durée, mais celle de la mort de Salomon ; comparez 2 Chroniques 10.2. L’ancien conspirateur ne fut pas plus tôt au fait de l’état des choses, qu’il rentra dans son pays et se rendit à Tséréda (1 Rois 11.26), bourg probablement rapproché de Sichem, où les Israélites le firent chercher. On le chargea de prendre la direction des négociations avec Roboam.
Ton père nous a chargés d’un joug pesant. Le joug placé sur la tête des bœufs et des vaches est ici le symbole des travaux de corvée et en général des charges imposées par Salomon à son peuple. D’autre part, le peuple paraît oublier la prospérité inouïe et la paix ininterrompue dont il avait joui sous Salomon.
Les vieillards : les anciens ministres de Salomon (1 Rois 4.2-6) ; ils avaient accompagné le roi à Sichem.
En suivant ce conseil, Roboam n’aurait probablement pas empêché la scission, mais il aurait ôté aux tribus mécontentes le prétexte de leur révolte et ce ne serait pas lui qui on aurait eu la responsabilité.
Les jeunes gens qui avaient grandi avec lui : les nouveaux conseillers dont le roi s’était entouré et qui avaient été les compagnons de sa jeunesse. Roboam, bien qu’âgé de quarante-et-un ans, était encore considéré comme un jeune homme (2 Chroniques 13.7).
Plus gros que le corps de mon père ; locution populaire : Ma puissance est, comparativement à celle de mon père, ce que le milieu du corps est au petit doigt. Si mon père a pu vous réduire à l’obéissance, combien ne le puis-je pas davantage !
Application de la sentence précédente : au lieu du simple fouet (dont on se servait pour punir les esclaves), moi je me servirai du fouet armé de pointes (instrument de supplice destiné aux criminels ; Deutéronome 25.3). Ce fouet était aussi appelé scorpion par les Romains, parce que les lanières étaient pourvues de pointes recourbées, analogues au dard du scorpion.
C’était une dispensation de l’Éternel. Cet aveuglement de Roboam, analogue à celui de Pharaon (Exode 4.21), fut le moyen par lequel s’accomplit la menace faite à Salomon (1 Rois 11.12).
Ce cri séditieux avait déjà servi de mot de ralliement aux Éphraïmites, lors de la révolte de Séba (2 Samuel 20.1).
Quelle part avons-nous avec David ? Quel motif avons-nous de rester attachés à cette maison royale ?
Nous n’avons point d’héritage… Nous n’avons pas avec le fils d’Isaï le lien d’une descendance commune.
Pourvois à ta maison : occupe-toi désormais des gens de ta tribu. La véritable cause du schisme, l’antipathie du peuple du nord pour la maison de David et la tribu de Juda, perce à chaque mot de ce cri des tribus.
Fils d’Israël : il s’agit ici des membres des dix tribus établis sur le territoire de Juda (voir 1 Rois 11.32 et 2 Chroniques 15.2).
Adoram : probablement le même personnage qu’Adoniram, 1 Rois 4.6 ; 2 Samuel 20.24, à moins que ce ne fût son fils. Cet homme, préposé aux corvées et impôts, paraissait à Roboam le mieux qualifié pour négocier avec les rebelles. Mais son apparition ne fit qu’augmenter leur irritation.
Jusqu’à ce jour : comme 1 Rois 8.8 ; 1 Rois 9.21.
Cette proclamation d’un nouveau roi consommait le schisme.
Ils l’envoyèrent appeler : à Tséréda où sans doute, après l’échec des négociations, il s’était retiré par prudence.
À l’assemblée. Il s’agit d’une nouvelle assemblée des tribus, à Sichem, pour choisir un roi.
Que la seule tribu de Juda. Voir à 1 Rois 11.32. En réalité, il restait à Roboam, outre la tribu de Juda, les territoires de Siméon et de Benjamin, quelques villes de Dan et la suzeraineté sur Édom.
Cent quatre-vingt mille hommes. Ce chiffre n’est pas exagéré, d’après le résultat du recensement, 2 Samuel 24.9.
Sémaïa. Ce prophète n’appartenait pas, comme Ahija, à la tribu d’Éphraïm, mais vraisemblablement à celle de Juda et demeurait à Jérusalem (2 Chroniques 12.5, 2 Chroniques 12.15).
Et au reste du peuple : aux Israélites établis dans le territoire de Juda et qui naturellement avaient aussi dû prendre les armes (verset 17).
C’est par ma volonté que ceci est arrivé. Sémaïa, d’accord avec Ahija, déclare que le schisme est voulu de Dieu et que par conséquent toute tentative d’y mettre fin est inutile. Il importait que cet événement fût envisagé comme une humiliation et un châtiment.
Ils écoutèrent la parole de l’Éternel. La leçon que Roboam et son peuple venaient de recevoir avait porté des fruits.
Le premier soin de Jéroboam fut de fortifier ses deux frontières de l’ouest et de l’est et de choisir Sichem pour sa résidence ; plus tard, il s’établit à Thirtsa (1 Rois 14.17). Ces deux villes étaient fort anciennes ; bâtir signifie ici fortifier (1 Rois 9.17).
Pénuel : voir Genèse 32.30 et Juges 8.8. Il fallait garantir le territoire situé au-delà du Jourdain. Ce pays fut en effet un perpétuel sujet de querelles entre les deux royaumes rivaux.
Jéroboam dit en son cœur… Ayant pourvu à la sûreté extérieure de son royaume, il songe à consolider son règne au-dedans. La coutume des pèlerinages à Jérusalem, à l’occasion des grandes fêtes religieuses, pouvait facilement rapprocher son peuple de celui de Juda (2 Chroniques 11.16). Pour conjurer ce danger, Jéroboam aurait dû s’en rapporter à Diou et à sa promesse (1 Rois 11.37-38).
Ayant pris conseil : avec lui-même.
Veaux d’or : figures de jeunes taureaux, symboles de la puissance créatrice de Dieu ; d’après 2 Rois 17.16, elles étaient de fonte d’airain recouverte d’or plaqué.
Assez longtemps. Le roi dissimule les véritables motifs de son action sous une apparente sollicitude pour le bien de son peuple.
Voici ton Dieu… comparez Exode 32.4, Exode 32.8. En parlant ainsi, Jéroboam voulait sans doute ôter à ses nouvelles institutions religieuses le caractère d’une innovation.
Ton Dieu, non : tes dieux. C’était l’Éternel que les veaux d’or devaient représenter. Jéroboam maintenait l’unité de Dieu et respectait le premier commandement de la loi, mais il transgressait le second, en introduisant l’adoration de l’Éternel sous des images (Exode 20.4).
À Béthel : à la frontière sud, comme Dan à la frontière nord, afin d’épargner au peuple un trop grand déplacement.
Une cause de péché : une pierre d’achoppement qui persista pendant des siècles ; aussi Jéroboam devint-il le type du roi apostat, comme David le type du roi fidèle (1 Rois 15.26 ; 1 Rois 15.30 ; 1 Rois 16.2 ; 1 Rois 22.53, etc.).
Des maisons de hauts-lieux (voir 1 Rois 3.2). Ces maisons abritaient les veaux d’or, comme le temple abritait l’arche.
Et il établit sacrificateurs… Cette innovation, non moins grave que les précédentes, enlevait aux sacrificateurs, descendants de Lévi, les fonctions du culte que leur avait conférées Moïse (Nombres 16.1-50). Elle fut motivée par le refus de-ceux-ci de prêter leur concours aux cérémonies du nouveau culte et eut pour conséquence leur émigration dans le royaume de Juda (2 Chroniques 11.13).
Et Jéroboam institua une fête. C’était la fête qui correspondait à celle des Tabernacles (voir 1 Rois 8.2). Il la maintint au quinzième jour du mois, mais il la transporta du septième au huitième mois. Tout en conservant les apparences extérieures de la légalité, il la violait, de manière à rendre la séparation des deux peuples aussi complète que possible. Peut-être profita-t-il dans ce but du fait que les récoltes se terminaient un peu plus tard dans les tribus du nord que dans celle de Juda.
Il offrit des sacrifices sur l’autel : tels que ceux qui étaient prescrits pour la fête des Tabernacles (Nombres 29.12-13).
Il fit ainsi à Béthel. Il installa à Béthel les sacrificateurs des hauts-lieux (aussi bien ceux qui devaient fonctionner à Dan que ceux destinés à Béthel).
Jéroboam était monté sur les degrés de l’autel.