Verset à verset Double colonne
1 Et Anne pria et dit : Mon cœur s’est réjoui en l’Éternel, Ma corne a été élevée par l’Éternel ; Ma bouche est ouverte contre mes ennemis, Car je me suis réjouie de ton secours.Pria et dit. Ce chant est une prière, une prière de louange. Anne commence par la grâce qui lui a été accordée à elle-même et l’humiliation dont a été frappée son ennemie (verset 1). De là elle s’élève à la contemplation du caractère de l’Éternel (versets 2 et 3) ; puis elle décrit son œuvre de justice au sein de l’humanité, par laquelle il relève les faibles et abaisse les oppresseurs (versets 4 à 8), et, jetant les regards dans l’avenir, elle voit cette œuvre se déployer avec puissance jusqu’à l’anéantissement de tout ce qui résiste à Dieu ici-bas et au jugement universel qui sera exercé par celui auquel Dieu confiera cet acte suprême (versets 9 à 10).
On a de tout temps remarqué l’analogie de cet hymne avec celui de marie (Luc 1.46-55). Les trois premiers versets de ce dernier répondent à notre verset 1 ; les versets 49 et 50 aux versets 2 et 3, les versets 51 à 53 aux versets 4 à 8 et les versets 54 et 55 aux versets 9 et 10. Seulement dans le cantique de Marie tout est plus doux, plus calme, plus solennel ; l’idée de la miséricorde de Dieu envers les faibles et envers Israël y domine sur celle de la justice, qui préside au cantique d’Anne.
Cette ressemblance entre ces deux hymnes s’explique aisément, car chaque jeune fille israélite connaissait par cœur les anciens cantiques nationaux.
Corne : Jérémie 48.25 ; Michée 4.13, notes.
Contre mes ennemis. À la joie d’Anne se mêle le souvenir amer des longues humiliations dont elle avait été victime.
Anne fait ressortir, verset 2, trois traits du caractère de l’Éternel :
Paroles hautaines. Allusion aux sarcasmes de Péninna et en même temps avertissement à l’adresse de tous ceux qui, comme elle, se glorifient de leurs avantages et oublient que l’oreille de Dieu entend tout et qu’il met à néant tout ce qui est fait sans lui.
Du caractère de Dieu ainsi décrit, Anne conclut à la loi d’après laquelle il gouverne l’humanité et dont elle-même vient de faire l’expérience. Elle montre, par une série d’exemples, comment Dieu intervient pour transformer du tout au tout les situations.
Sept. Hyperbole due à l’exubérance de sa joie ; voir 1 Samuel 2.21.
Les colonnes de la terre. Dieu a le pouvoir de tout transformer, parce que les colonnes sur lesquelles repose la terre sont en sa main et que c’est lui qui sur elles a posé le monde.
L’homme ne l’emportera pas… Les vraies victoires ne s’obtiennent pas par la force humaine, mais par la foi en la vertu de Dieu.
Il tonnera. La voix du tonnerre est toujours envisagée comme un signe et un prélude du jugement divin. Ce jugement universel est prédit dans les mots suivants.
Il donnera puissance à son roi. Par ce roi on doit entendre non tel ou tel roi d’Israël, mais la royauté personnifiée dans tous les individus qui en seront successivement revêtus et finalement dans celui qui réalisera le jugement universel qui vient d’être annoncé, c’est-à-dire le Messie ; comparez 1 Samuel 2.35. La plupart des interprètes, plaçant la composition de ce cantique dans une époque postérieure à l’établissement de la royauté, rapportent ces derniers mots au roi régnant à ce moment-là dont un chantre israélite aurait célébré une victoire. Mais cette application ne convient pas aux traits tout à fait individuels qui se trouvent dans les versets 1, 3 et 5. Il faudrait plutôt supposer que les derniers mots du cantique ont été ajoutés plus tard, lorsque cette poésie, devenue populaire, était chantée à l’époque des rois.
Son oint. On oignait d’huile les rois aussi bien que les sacrificateurs.
Pervers : Deutéronome 13.13, note. Double péché : ils empiétaient sur le droit des Israélites (versets 13 et 14) et sur le droit de l’Éternel (versets 15 et 16).
Un sacrifice. Ce sont ici des sacrifices d’actions de grâces, les seuls dont les particuliers mangeassent une partie de la victime. Le sacrificateur n’avait droit qu’à la poitrine et à la cuisse droite (Lévitique 7.31-35). Outre cette portion d’honneur, fixée par la loi, les fils d’Éli réclamaient et au besoin prenaient encore autre chose.
Cuve, marmite, chaudière, pot. Cette multiplicité de termes s’explique par le fait que les victimes étaient de grosseurs différentes.
Un second abus, encore plus grave que le premier (versets 13 et 14). Le droit de Dieu était clair (Lévitique 7.25). Et cependant, avant qu’on eût prélevé les parties grasses destinées à être consumées sur l’autel, les fils d’Éli réclamaient déjà les morceaux qui leur revenaient ; ils les exigeaient crus, par conséquent avec les parties grasses attenantes : Nous sommes fatigués de viandes bouillies nous voulons manger de la viande rôtie ; pour cela il nous faut de la graisse.
Que si l’homme… Le simple Israélite défendait contre les sacrificateurs le droit de Dieu et les prescriptions de la loi.
Conclusion : ils discréditaient les sacrifices et la loi elle-même aux yeux du peuple. Ceci suppose évidemment des usages religieux et cérémoniaux bien établis dès longtemps et connus du peuple.
Servait : aidait au service du sanctuaire se rendant utile au vieil Eli.
Ephod (Exode 28.6) : un vêtement analogue pour la forme à celui du souverain sacrificateur, mais fait en simple étoffe blanche (de lin). Cette pièce de vêtement lui était probablement fournie par le sanctuaire, tandis que la robe (verset 19) était confectionnée par sa mère. Voir Exode 28.31, où ce mot est rendu par surplis. Samuel portait ce costume de forme sacerdotale en vertu de sa consécration absolue au Seigneur.
Don. Cette expression se rapporte aux paroles d’Anne, 1 Samuel 1.28. L’enfant n’appartenait plus à ses parents, mais à Dieu. Aussi Éli demande-t-il pour eux une compensation au sacrifice qu’ils avaient fait. Et c’est en vertu de ce vœu du souverain sacrificateur qu’eut lieu l’augmentation de la famille d’Anne.
Qui s’assemblaient… Comparez Exode 38.8. L’immoralité accompagnait, comme souvent, l’incrédulité.
On fait pécher, au lieu de : Vous faites pécher. Il est trop lâche pour employer la forme directe.
Lorsqu’un homme pèche contre un autre homme, il y a une autorité qui intervient entre les deux et donne à chacun son droit. Cette autorité, c’est Dieu ou tel juge qui est son représentant sur la terre (Exode 21.6, note). Il est des péchés qui s’adressent directement à l’homme et seulement indirectement à Dieu comme représentant du bien absolu ; mais il en est d’autres qui atteignent directement la personne divine, comme la profanation de son sanctuaire, ou l’appropriation de ce qui lui revient sur les sacrifices, ou la profanation du sabbat, etc. Dieu dans ce cas-ci se trouve être à la fois l’offensé et le juge. Nul ne saurait arrêter son bras, en s’interposant, comme arbitre, entre lui et le coupable.
Mais ils n’obéirent point… L’avertissement paternel n’aurait pu agir sur eux qu’au moyen d’une action puissante et décisive de l’Esprit de Dieu. Mais cette action n’eut pas lieu, parce que déjà la mesure était pleine et que Dieu avait résolu leur perte.
Voulait les faire mourir : comparez Exode 4.21. Quel contraste entre cette réprimande si faible et l’énergique intervention qu’aurait dû provoquer de la part du souverain sacrificateur une pareille conduite !
Comparez Luc 1.80 ; Luc 2.40, Luc 2.52. L’enfance de Samuel est un type de celles de Jean-Baptiste et de Jésus. Par son caractère normal, elle contraste vivement avec les désordres des fils d’Eli.
Un homme de Dieu. Le premier prophète dont il soit fait mention depuis Moïse (Juges 2.1 et Juges 13.6 il s’agit d’un ange).
Ton père : Aaron. Le choix que l’Éternel avait fait d’Aaron, ressort du rôle qu’il a joué à côté de Moïse et des communications directes que l’Éternel a eues avec lui, par exemple : Exode 12.1, Exode 12.43. Le prophète rappelle à Eli, comme le plus grand des bienfaits divins, la libre élection d’Aaron et de ses descendants comme sacrificateurs.
Début du verset : le côté honorable de cette charge ; fin du verset : Les avantages matériels qui y sont attachés.
Le péché d’Éli aggravé par ces grâces.
Pourquoi avez-vous foulé…? Le péché des fils est imputé au père qui ne l’a pas réprimé.
Et pourquoi as-tu honoré. Reproche terrible, propre à faire sentir à Éli toute la gravité de sa faiblesse.
En vous engraissant. Comparez 1 Samuel 4.18 : vieux et pesant.
Du meilleur : allusion au verset 15.
D’Israël mon peuple : qui, comme tel, devait avoir part à ma table.
La sentence : mort de Hophni et de Phinées en un même jour (verset 34) ; cette mort sera le signal de la déchéance de toute la famille d’Eli, objet du déplaisir de l’Éternel ; au lieu de s’éteindre simplement, elle offrira à Israël le spectacle d’une race rejetée et dont pourtant la misère ne peut finir. L’Éternel retirera Israël de son humiliation actuelle, mais sans que le sacerdoce soit l’organe de cette bénédiction ; il sera au contraire abaissé profondément. Et quand enfin Dieu le relèvera aussi, ce sera pour le confier à une autre famille avec laquelle les descendants d’Éli n’auront plus que d’humiliantes relations de mendicité.
Il est difficile de constater dans l’histoire les faits répondant à cette prophétie. Elle peut se rapporter à la substitution de Samuel à Éli et à ses fils, ou bien à la substitution de la branche aînée (celle d’Éléazar) à la cadette (celle d’Ithamar), qui avait passé avant la première, nous ne savons à quelle occasion et pour quel motif ; comparez 1 Rois 2.35. Plusieurs ont vu ici l’annonce de l’abolition du sacerdoce aaronitique par l’avènement du Messie.
J’avais déclaré : Nombres 25.13. Les promesses faites à Phinées, fils d’Éléazar et représentant de la famille d’Aaron, sont considérées ici comme valables pour Éli ; comparez aussi Exode 29.9, promesse faite à toute la famille d’Aaron.
Loin de moi cela ! Devant l’infidélité humaine, il n’y a pas de promesse qui tienne. L’Éternel trouve, pour accomplir sa parole, quelque autre moyen imprévu.
Les jours viennent : formule, usitée dans la bouche des prophètes (2 Rois 20.17 ; Amos 4.2 ; Amos 8.11, etc.).
Le bras, symbole de la force. Il n’y aura plus dans ta race de force vitale suffisante pour produire des hommes capables d’atteindre la vieillesse. Cet état misérable de ta descendance contrastera avec l’abondance dont jouira tout le peuple.
La maison de ton père. S’il s’agit de la maison d’Aaron en général, on doit penser à la substitution de Samuel à Eli, ou au remplacement d’Aaron et de sa famille par le sacerdoce du Messie. Mais si l’on applique cette menace à la substitution de Tsadok à la famille d’Eli, le terme la maison de ton père, doit être pris dans le sens restreint de la maison d’Ithamar.
La demeure même de l’Éternel tombera, par la perte de l’arche, dans l’état d’abaissement qu’aura amené la conduite des sacrificateurs.
Jamais de vieillard. C’est comme un refrain (verset 31).
Éli est supposé voir, du sein d’une autre existence, mourir ses descendants dans la force de l’âge. Sa race est menacée, non de destruction totale (je ne retrancherai pas), mais d’une condition d’existence misérable.
Ce verset ne peut s’appliquer ni à Samuel (une maison stable), ni au Messie (devant mon oint, le roi théocratique), il faut y voir la promesse du rétablissement de la sacrificature entière et stable durant l’époque des Rois telle qu’elle a fonctionné dans le Tabernacle restauré et dans le temple depuis David et Salomon.
La branche infidèle du sacerdoce mendiera quelque petit office dans le service du temple.