Verset à verset Double colonne
1 Jéthro, sacrificateur de Madian, beau-père de Moïse, apprit tout ce que Dieu avait fait pour Moïse et pour Israël son peuple : que l’Éternel avait fait sortir Israël d’Égypte.Cette arrivée eut-elle lieu pendant que le peuple était encore campé à Réphidim ou seulement après son arrivée à Sinaï ? Au premier coup d’œil la seconde alternative paraît la seule possible ; car, au verset 5, Israël est déjà campé en la montagne de Dieu et il paraît bien difficile de placer dans le court séjour qu’il fit à Réphidim tous les événements racontés dans ce chapitre : l’arrivée de Jéthro, son sacrifice, l’assemblée du peuple autour du tribunal de Moïse, le conseil de Jéthro et l’exécution de ce conseil par la nomination des juges. Il faut dans ce cas admettre dans le récit une anticipation ; l’auteur aurait placé ici le récit de la visite de Jéthro, pour ne pas interrompre plus tard celui de la législation sinaïtique, qui commence au chapitre 19 et se prolonge jusqu’au chapitre 10 des Nombres.
Cependant on peut opposer à ces raisons les raisons suivantes :
Nous croyons donc devoir en rester à l’ordre des faits, tels qu’ils sont rapportés ici (voir encore à 19.4-2), excepté en ce qui concerne la nomination des juges (versets 21-26) qui peut fort bien être mentionnée en cet endroit par anticipation, pour constater l’exécution subséquente de la mesure proposée par Jéthro.
Sur Nombres 11.16 et Deutéronome 1.13-18, voir à ces passages.
Sur Jéthro, voir à Exode 3.1, note.
Il y a un contraste remarquable entre la conduite des Amalékites et celle de Jéthro, chef de la tribu madianite des Kéniens (Juges 4.11). Les uns sont les premiers des Gentils qui entrent en hostilité avec Israël et son Dieu ; Jéthro et son peuple, qu’il représente, sont au contraire les premiers qui viennent rendre hommage à l’Éternel et à son peuple. Le bruit des merveilles accomplies en Égypte par l’Éternel, le libérateur d’Israël, était parvenu jusqu’à lui et il avait cru en ce Dieu (verset 10).
Voir à Exode 4.26, note. Il n’y a aucune raison de se défier de la réalité de ce renvoi mentionné ici par le récit sacré. Moïse savait en partant de la terre de Madian pour l’Égypte qu’il reviendrait à Sinaï ; il en avait pour garant la promesse de Dieu Exode 3.12. Il avait donc pu juger plus prudent de renvoyer sa femme et ses enfants chez son père jusqu’à ce moment.
Guersom, voir à Exode 2.22
Éliézer : Dieu est secours. Sa circoncision a été racontée Exode 4.25
Arraché à l’épée de Pharaon : par la réussite de sa fuite au désert de Madian, Exode 2.15
La montagne de Dieu : voir l’introduction à ce chapitre.
Se prosterna et l’embrassa. Si glorieux que fût son rôle actuel, Moïse rend hommage à la dignité de Jéthro, sacrificateur et chef de la tribu qui l’a reçu dans son sein. Le baiser est la forme ordinaire de salutation en Orient. Hérodote dit des Perses : Quand ils se rencontrent, vous pouvez juger s’ils sont égaux en rang, car, dans ce cas, au lieu de se parler, ils s’embrassent sur les lèvres ; autrement ils s’embrassent sur la joue.
Vous a tirés : vous désigne peut-être Moïse et Aaron seulement ; car le peuple est nommé ensuite.
Jéthro proclame la supériorité de l’Éternel sur les autres divinités, mais il ne professe pas le néant de celles-ci.
Car il a été grand… Il y a dans cette seconde moitié du verset une forte ellipse qui permet de l’entendre diversement. On pourrait traduire : C’est par leur propre fureur contre Israël que les Égyptiens ont été détruits.
Mais notre sens paraît confirmé par l’allusion faite à ce passage, Néhémie 9.10.
Comme hommage à Jéhova, Jéthro offre un holocauste ; puis il y ajoute des sacrifices d’actions de grâces en vue d’un repas sacré auquel il invite les représentants d’Israël. Manger ensemble a été de tout temps un signe d’alliance et de bonne amitié. Comparez Genèse 31.46
Aaron ayant coopéré avec Moïse à la délivrance jouissait déjà d’une considération particulière.
Sur les Anciens, voir Exode 3.16 ; Exode 4.29, etc. Cette charge existant déjà en Égypte, s’était maintenue depuis la sortie.
Pourquoi Moïse n’est-il pas nommé ? Sa présence s’entend-elle d’elle-même ? C’est peu probable ; le narrateur ne redoute pas les détails. Était-il retenu par les soins du gouvernement du peuple ? Ou lui répugnait-il de prendre part à un sacrifice qui était offert à Jéhova, non en sa qualité de Dieu unique, mais seulement en qualité de premier des dieux ?
Pour consulter Dieu : pour connaître la décision de Dieu sur chaque cas litigieux. Étant en relation particulière avec Dieu, Moïse était envisagé comme l’organe de la justice et de la sagesse divines.
Et je leur fais connaître… Moïse profitait de chaque cas particulier pour graver dans le cœur du peuple les règles générales du droit et de l’équité, dont il puisait lui-même la connaissance auprès de son Dieu.
Et le peuple… On peut entendre ces mots dans ce sens : Une fois que tu auras succombé, c’en sera bientôt fait du peuple dont l’existence dépend de la tienne.
Mais la plupart comprennent ainsi : Obligé d’attendre si longtemps une décision, les gens se fatigueront et finiront par se faire justice à eux-mêmes, ce qui conduira à une dissolution générale.
Il est très convenable que Moïse communique au peuple les règles générales pour l’administration de la justice, telles que Dieu lui-même les lui enseigne.
Mais quant à l’application de ces principes aux cas particuliers, il doit s’en décharger sur des juges choisis dans ce but et revêtus d’une compétence plus ou moins grande.
Chefs de milliers… Une telle institution est parfaitement conforme à l’organisation patriarcale des tribus nomades, qui sont réunies par clans ou groupes de familles, par groupes de clans, etc.
Il est probable que les chiffres 10, 50, 100, 1000 devaient correspondre autant que possible à ces divisions naturelles. C’est ce qui ressort de Deutéronome 1.13, où est décrite la manière dont Moïse procéda pour instituer les juges. En arabe une dizaine signifie une famille et le nom de milliers était chez les Juifs celui des branches de la tribu (Nombres 1.16 ; Michée 5.1).
On peut conclure de la distinction que Moïse établit au verset 22, entre les affaires qui doivent lui revenir et celles qui seront de la compétence des juges inférieurs, que c’était de l’importance des affaires que résultait le degré plus ou moins élevé du tribunal auquel elles étaient soumises. Le juge de l’ordre plus élevé fonctionnait sans doute aussi en cas d’appel de la sentence rendue par le juge d’ordre inférieur.
Et que Dieu te donne des ordres. Jéthro n’a donné qu’un conseil ; pour que ce conseil devienne un ordre, il faut que, présenté à Dieu par Moïse, Dieu le ratifie.
Viendra en paix en son lieu. Plusieurs entendent par ce lieu la terre de Canaan où le peuple arrivera heureusement. Mais ce sens ne convient ni à la bouche dans laquelle ce mot est placé, ni au contexte. Le sens est déterminé par le verset 14. Le peuple ne sera plus obligé d’attendre là tout le jour ; l’affaire promptement réglée, chacun pourra retourner en paix dans sa tente.
Pour l’exécution de cette mesure, voir Deutéronome 1.13 et suivants. Moïse remit le choix des juges au peuple lui-même et ce fut lui qui les installa ; comparez Actes 6.3-6, la nomination des diacres par l’Église et leur installation par les apôtres. Cet acte ne put être accompli que pendant l’année passée au Sinaï. Nous voyons par Nombres 31.14 l’existence d’une organisation militaire semblable en Israël.
Après avoir donné ce conseil salutaire, Jéthro repartit pour le Midi, où il habitait (Exode 3.1, note), tandis que Moïse se remettait en marche pour le Sinaï.