Verset à verset Double colonne
1 Et Jephthé, le Galaadite, était un vaillant guerrier, et il était fils d’une courtisane, et Galaad avait engendré Jephthé.Galaad : un membre de la famille de Galaad, fils de Manassé, qui portait le nom de son ancêtre (Nombres 26.29).
La femme… : sa femme légitime.
Tu n’auras pas d’héritage. Les enfants illégitimes n’avaient pas de droit à l’héritage des parents ; on se contentait de leur faire des présents ; comparez Genèse 21.10 ; Genèse 25.6. Ceci se passait sans doute après la mort du père. Personne ne prit la défense du jeune homme.
Pays de Tob : contrée au nord-est de la Pérée, à la frontière de la Syrie, peu éloignée du pays de Galaad (2 Samuel 10.6).
Des excursions… de pillage, suivant l’usage des Bédouins.
Ces versets renouent avec Juges 10.17-18. Cette députation partait probablement de l’assemblée mentionnée Juges 10.18.
Commandant. Le mot hébreu désigne une dignité militaire.
Les Anciens avaient consenti à l’expulsion de Jephthé de la maison paternelle par ses frères.
À cause de cela : désireux de te rendre justice et de réparer cette offense.
Notre chef : autre terme que celui du verset 6. Ils lui offrent maintenant de devenir, après la victoire, leur chef civil et politique.
Tous les habitants de Galaad : des deux tribus et demie à l’est du Jourdain. Sur le sens élastique du nom géographique de Galaad, voir Nombres 32.1, note. Les Juges ne sont jamais présentés comme chefs de la nation tout entière. Chacun d’eux n’agit que pour les tribus qui se groupent volontairement autour de lui.
Jephthé veut quelque chose de plus assuré que cette simple promesse. Les Anciens ajoutent à la promesse le serment.
Le peuple… : par l’intermédiaire de ses représentants.
Jephthé répéta… : Il répéta ses conditions dans l’assemblée où furent ratifiés avec serment les engagements pris au pays de Tob.
Moi : Jephthé, comme représentant du peuple de Galaad.
Lorsque les Israélites s’emparèrent d’une partie du territoire des Ammonites et des Moabites, à l’est du Jourdain, ils ne le conquirent pas directement sur eux, mais sur les Amorrhéens (Cananéens) qui avaient conquis les premiers ces contrées sur les enfants d’Ammon et de Moab ; comparez Josué 13.25, où est assignée à la tribu de Gad toute une portion du pays des Ammonites (la moitié du pays des Ammonites entre l’Arnon au sud et le Jabbok supérieur au nord) qu’avaient conquise auparavant les Amorrhéens ; voir Nombres 21.27 et Deutéronome 2.19 ; Deutéronome 2.37, notes.
Jephthé rappelle ici tout ce qui s’est passé dans les relations entre Israël, d’une part et les peuples d’Édom, de Moab et d’Ammon, qui étaient les parents des Israélites et qu’il fallait épargner, d’autre part. Après le refus d’Édom et de Moab (l’envoi de messagers au roi de Moab est omis dans les Nombres) de laisser passer Israël sur leur territoire, il tourna par le désert à droite de leur pays et ne fit la guerre qu’à Sihon, roi des Amorrhéens, qu’il vainquit et sur lequel il conquit le territoire appartenant jadis aux Moabites et aux Ammonites. Les Moabites n’ont jamais réclamé ; les Ammonites pas davantage, pendant trois siècles. Et tout à coup, ils revendiquent maintenant ce territoire que l’Éternel a donné à son peuple ! Ce n’est pas Israël qui est l’agresseur, c’est Ammon : Dieu en est témoin et il jugera !
À Kadès : Nombres 20.1.
Frontière de Moab : du côté du territoire des Amorrhéens.
Voir Nombres 21.21-25.
Camos est proprement le nom de la principale divinité des Moabites (Nombres 21.29), mais sans doute s’applique aussi au dieu des Ammonites, qui plus ordinairement s’appelle Moloch ou Milcom.
Balak n’a pas réclamé au point de vue du droit, puisque le pays conquis ne lui appartenait plus ; et il n’a pas osé non plus employer les armes, parce que le refus de Balaam de maudire Israël lui enlevait toute espérance de victoire.
Rempli d’une force surnaturelle par l’Esprit de l’Éternel, Jephthé parcourt Galaad (ici Gad et Ruben), puis Manassé, appelant aux armes tout le peuple et le réunissant à Mitspa (Juges 10.17).
Et Jephthé fit un vœu. Les vœux étaient expressément autorisés par la foi (Lévitique 27.2).
Celui qui sortira, littéralement : le sortant, expression qui ne peut guère se rapporter qu’à un être humain ; les animaux ne sortent pas de la maison. Ce vœu que l’on peut appeler inconsidéré, s’explique néanmoins, si l’on réfléchit que la vocation de Jephthé avait été purement humaine, sans aucun signe divin, comme ceux qui avaient accompagné l’appel de Gédéon. Il cherche donc à intéresser Dieu à sa victoire à quelque prix que ce soit.
Sera à l’Éternel. Cette expression n’implique pas nécessairement le sacrifice de la vie, mais peut désigner une consécration, comme celle des Gabaonites, au service de la maison de l’Éternel. Ce sont les termes suivants : et je l’offrirai en holocauste, qui ne peuvent s’entendre que d’un sacrifice proprement dit ; seulement avec une réserve possible, celle du rachat stipulé par la loi (Lévitique 27.2 et suivants) et qui consistait dans le paiement d’une somme d’argent pour le sanctuaire et dans l’offrande d’une victime. La question est de savoir si Jephthé en faisant son vœu pensait uniquement au sacrifice proprement dit ou bien aussi à cette possibilité du rachat. Dans le premier cas, il faut admettre que les passages qui, dans la loi, interdisent les sacrifices humains (Deutéronome 12.31 ; Deutéronome 18.10) ne lui étaient pas connus, ce qui n’a rien d’étonnant (même si la loi existait déjà comme loi écrite ou comme tradition orale) si l’on se rappelle le genre de vie qu’il avait mené. D’autre part, les sacrifices humains ont toujours été étrangers à la religion israélite, soit en vertu de son caractère moral, soit par suite de l’enseignement renfermé dans l’histoire du sacrifice d’Isaac. Il est frappant que dans le récit suivant la fille de Jephthé ne pleure point sur le sacrifice de sa vie, mais seulement sur celui de sa virginité ; car une fois consacrée au service de l’Éternel, elle ne pouvait plus appartenir à aucun homme. Comment d’ailleurs le sacrifice matériel se serait-il accompli ? Jephthé aurait-il conduit sa fille au sanctuaire ? Mais le souverain sacrificateur n’aurait jamais consenti à l’immoler. L’aurait-il sacrifiée en Galaad ? Mais il n’y avait là ni sanctuaire, ni autel dressé à l’Éternel et Jephthé se montre dans tout le récit franchement adorateur de Jéhova (versets 9, 11, 21, 23, 29, 30, 35, 36). Le deuil de Jephthé et de la jeune fille s’explique suffisamment dans la supposition que dès ce moment elle fut pour toujours séparée de son père et vouée dans le Tabernacle à l’un des services pour lesquels le travail des femmes était nécessaire (Exode 38.8 ; 1 Samuel 2.22). Et pourtant il est impossible de nier que les expressions : Je l’offrirai en holocauste (verset 31), et : Il accomplit à son égard le vœu qu’il avait fait (verset 39), ne soient bien difficiles à entendre dans un autre sens que celui d’un sacrifice proprement dit. Cette dernière interprétation a été généralement reçue jusqu’au moyen-âge, où les interprètes juifs ont commencé à proposer l’autre sens. Nous ne nous sentons pas en état de nous prononcer et laissons le lecteur décider lui-même en tenant compte des raisons pour et contre que nous venons de présenter.
Aroër : Nombres 32.34, note.
Minnith : au nord-est de Hesbon, dans un emplacement où se trouvent encore aujourd’hui de grandes ruines.
Vingt villes : que les Ammonites avaient reprises sur les Israélites.
Abel-Kéramim : plaine des vignes. Le voyageur Tristram a trouvé à vingt minutes de Diban (au nord-est d’Aroër) une vallée appelée Khurm-Dibon, c’est-à-dire vignoble de Dibon.
Sa fille sortait à sa rencontre : comparez Exode 15.20 ; 1 Samuel 18.6.
Déchira… : expression d’une douleur profonde (Lévitique 10.6).
J’ai ouvert la bouche. Un vœu n’était valable que lorsqu’il avait été expressément énoncé (Lévitique 27.1).
Après que l’Éternel a accompli la condition que tu lui avais posée dans ta prière, il ne te reste qu’à accomplir ton vœu.
La fille de Jephthé a hérité de l’héroïsme de son père.
Je descendrai… Mitspa est un lieu élevé au-dessus des plateaux environnants.
Et elle n’avait pas connu, ou : et elle ne connut pas ; selon l’une ou l’autre des deux explications que nous avons exposées.
Ici peuvent s’élever deux questions en sens opposés : Aurait-on célébré une fête en Israël pour un acte qui, après tout, constituait un crime théocratique ? Et d’un autre côté : Aurait-on célébré comme un événement si extraordinaire la consécration d’une jeune fille au célibat ? D’après les antiques notions israélites, plus aisément sans doute que d’après les idées modernes.