Verset à verset Double colonne
1 Et Boaz monta à la porte [de la ville], et s’y assit, et voici celui qui avait le droit de rachat, dont Boaz avait parlé, vint à passer. Et Boaz lui dit : Toi, un tel, détourne-toi et assieds-toi ici. Et il se détourna et s’assit.Monta. La porte, où l’on rendait la justice, n’était pas en fait plus élevée que le reste de la ville, mais elle était dans l’idée un lieu élevé au-dessus des autres. De là l’expression constante : monter à la porte (Deutéronome 17.8 ; Deutéronome 25.7).
Toi, un tel. Il va sans dire que Boaz n’a pas interpellé son parent de cette façon, mais lui a donné son vrai nom. Le narrateur, qui ignorait ce nom ou qui n’a pas voulu l’indiquer, a employé cette expression qui, ainsi comprise, n’a rien d’irrévérencieux.
Ces dix hommes pris parmi les Anciens de la ville sont les témoins proprement dits. Mais à eux s’ajoutent en second rang les autres personnes présentes (comparez versets 9 et 11).
Noomi a vendu : de concert avec Élimélec, à leur départ pour Moab. Il n’est parlé que d’elle parce que seule elle vit encore. D’autres traduisent : Noomi met en vente, ce qui n’est pas conforme au sens grammatical.
Je veux t’en informer… Voici le sens : Je suis disposé à racheter ce champ pour le conserver à Noomi et à sa famille. Mais je ne puis le faire que si tu déclares vouloir renoncer à ton droit, qui va avant le mien.
Que si tu ne veux pas…, littéralement : Que s’il ne veut pas… Ces mots sont adressés par Boaz aux Anciens. Mais il revient immédiatement à son parent, auquel il dit : Déclare-le moi…
Je rachèterai. Il ne se propose pas, comme Boaz, de faire vivre Noomi du produit de cette terre, mais d’en jouir lui-même. Par là la proprité rentrera du moins dans le patrimoine de la famille.
De la main de Noomi : en ce sens que le fonds lui-même n’avait point pu être aliéné, puisqu’il restait invariablement la propriété de la famille et qu’Élimélec et Noomi n’avaient pu en vendre que les récoltes jusqu’au prochain jubilé.
Tu l’acquerras… de Ruth : à la personne de laquelle reste attachée, en raison de son mari défunt, la propriété du champ (au cas du moins qu’elle n’épousât pas un homme d’une famille différente, mais qu’elle s’unit à un parent de son mari).
Je ferais tort à mon héritage. En acquérant dans ces conditions, il se serait engagé à rendre le champ au fils qu’il aurait pu avoir de Ruth et il aurait ainsi diminué sa fortune de la valeur de ce champ, ce qu’il ne croyait pas pouvoir faire justement vis-à-vis de ses propres enfants.
Et c’était autrefois la coutume. On voit par ces mots que le livre de Ruth a été écrit à une époque beaucoup plus avancée, où cette coutume n’existait plus.
Et il ôta son soulier : acte symbolique par lequel il faisait passer à Boaz son droit de rachat et de possession sur le champ de Ruth (Deutéronome 25.9, note). Un usage semblable paraît avoir existé chez les Indous et les anciens Germains. Mettre le pied sur une chose, c’est en constater la prise de possession. Ce symbole n’a point le caractère déshonorant qui y est attaché dans Deutéronome 25.5-10, où il s’agit de la veuve d’un frère.
Ephratha : le district dans lequel se trouvait Bethléem. Les deux propositions parallèles de la fin de notre verset expriment donc la même pensée. La force de Boaz doit être renouvelée, afin que par ses descendants le nom de sa famille soit conservé à Bethléem.
Pérets : le chef de la branche nombreuse des fils de Juda à laquelle appartenait Boaz. Comparez Ruth 1 Chroniques 2.5 et suivants.
Et les femmes… : 1 Samuel 4.20 ; Luc 1.58.
Un libérateur. L’hébreu emploie ici le terme de goël, champion, rédempteur, défenseur. Le mot aujourd’hui, au verset 14 et le verset 15 montrent clairement qu’il s’agit, non de Boaz, mais de l’enfant qui perpétuera la race de Noomi et sera sa consolation et son soutien.
Sept fils : 1 Samuel 2.5.
Obed, serviteur. Ce nom est en rapport avec les mots précédents : Un fils est né à Noomi. Les parents et les voisins aidaient à choisir le nom d’un nouveau-né (Luc 1.59).
Ce fut le père d’Isaï, père de David. Dans cette courte indication qui termine l’histoire de Ruth, l’auteur révèle, nous n’en pouvons douter, la raison pour laquelle il l’a racontée : Ruth était une des ancêtres du plus grand roi d’Israël et il était intéressant pour tout le peuple de savoir comment elle l’était devenue. La généalogie de Pérets qui suit confirme cette manière de voir, qu’elle soit de la main de l’auteur ou un appendice postérieur.
Comparez 1 Chroniques 2.5-17.
Sur Pérets, voir Genèse 38.29 ; Genèse 46.12 ; Nombres 26.20.
Hetsron, son fils, descendit avec lui en Égypte (Genèse 46.12).
Ram : Aram dans Matthieu 1.3 et Luc 3.33.
Amminadab : beau-père d’Aaron, Exode 6.23.
Nahason vivait du temps de Moïse et est appelé prince des fils de Juda (Nombres 1.7 ; Nombres 2.3 ; Nombres 7.12). Notre généalogie ne compte que cinq membres depuis la descente en Égypte jusqu’au moment de l’Exode. C’est trop peu pour une période de 430 ans (Exode 12.40). Entre Hetsron et Amminadab l’auteur a omis, comme celui des Chroniques, plusieurs chaînons intermédiaires avant et après Ram. Cette supposition est encore plus nécessaire pour la suite de la généalogie, qui ne compte également que cinq noms de Salmon ou Salmud, fils de Nahason, à David. En effet de l’Exode jusqu’à la mort de David (1 Rois 6.1) on compte 476 ans, qui exigent au moins douze générations. Les noms qui manquent doivent être intercalés entre Salmon et Boaz, car d’après Matthieu 1.5 Salmon vivait, peu après Nahason (contemporain de Moïse), puisqu’il épousa Rahab. On peut admettre qu’entre Boaz et David la généalogie est complète. Il y a un arrangement voulu dans le choix du nombre dix pour la série des noms depuis Pérets jusqu’à David. Voir les généalogies des chapitres 5 et 11 de Genèse, qui offrent également dix membres d’Adam à Noé et de Sem à Abraham. C’est à dessein aussi que cinq noms manquent, avant la conquête de Canaan, comme cinq après. On aimait à donner aux généalogies le caractère d’un tout symétriquement arrangé. Voir à ce point de vue Matthieu chapitre 1.