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Actes 23
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

1 Paul fixant ses regards sur le sanhédrin, dit : Hommes frères, c’est en toute bonne conscience que je me suis conduit devant Dieu jusqu’à ce jour.

Paul se trouve pour la première fois devant le sanhédrin, où avaient comparu son Maître et plus tard les autres apôtres. Il porte sur cette assemblée un regard ferme et sans crainte, attestant sa bonne conscience (1 Timothée 1.5-19 ; Hébreux 13.18 ; 1 Pierre 3.16).

Et c’est devant Dieu, ou pour Dieu, à son service, qu’il s’est conduit, en suivant toujours les inspirations de cette bonne conscience (Actes 24.16).

Le verbe que nous traduisons par se conduire désigne d’ordinaire la conduite d’un citoyen dans l’État ou dans la cité. Paul l’applique à l’activité qu’il a déployée comme apôtre dans la cité de Dieu, qui est l’Église (comparer Philippiens 1.27).

Par cette entrée en matière, il réfutait déjà les fausses accusations portées contre lui (Actes 21.28) et il lui eût été facile d’en démontrer la fausseté, s’il n’avait été brusquement interrompu (Actes 24.14-16 ; Philippiens 3.6).

On s’étonne de voir l’apôtre prendre la parole dans cette séance du sanhédrin, sans y avoir été invité par le président. Il faut supposer que Luc, pressé d’en venir aux faits principaux, a passé sous silence les formalités de l’ouverture de la séance, qui lui importaient assez peu.

Paul ne salue pas les membres du sanhédrin du titre respectueux de « pères » (Actes 7.2 ; Actes 22.1) il n’emploie pas la formule solennelle par laquelle Pierre ouvre son discours (Actes 4.9).

On en a conclu qu’il n’attendait pas de jugement équitable de cette assemblée, ou qu’il ne voulait pas, en présence du tribun, paraître dans une attitude trop humble. Son assurance et la brusquerie de son début ont probablement provoqué l’ordre d’Ananias (voir la note suivante).

2 Mais le souverain sacrificateur Ananias commanda à ceux qui étaient près de lui de le frapper sur la bouche.

Ananias, que l’historien Josèphe dépeint comme un homme ambitieux, cupide et cruel (Antiquités Juives, XX, 9, 2-4), avait été élevé à la dignité de souverain sacrificateur par Hérode, prince de Chalcis, vers l’an 47.

Quatre ans plus tard, il avait été envoyé à Rome, lié de chaînes, par Quadratus, gouverneur de Syrie, pour répondre de violences commises par des zélotes envers des Samaritains (Josèphe, Antiquités Juives, XX, 6, 2). Il fut acquitté et réinstallé dans sa charge. Déposé vers la fin du gouvernement de Félix, il garda une grande influence, due à ses richesses.

Dès les premiers temps de la guerre des Juifs contre les Romains, Ananias périt, assassiné par des sicaires (Josèphe, Guerre des Juifs II, 17, 9).

Tel fut l’homme qui se trouvait alors à la tête de la théocratie juive.

Irrité de l’assurance avec laquelle Paul, ancien pharisien, devenu apostat, en appelait à sa bonne conscience, malgré les accusations portées contre lui, Ananias commanda à ceux qui étaient près de lui, probablement des huissiers (Marc 14.65 ; Jean 18.22), de le frapper sur la bouche. Il voulait non seulement l’outrager, mais le punir des paroles que cette bouche venait de prononcer.

Que dut penser le tribun militaire, présent à la séance (verset 10), lui qui n’avait pas osé frapper un citoyen romain (Actes 22.26 et suivants) ?

3 Alors Paul lui dit : Dieu te frappera, muraille blanchie ! Toi aussi, tu sièges pour me juger selon la loi, et, transgressant la loi, tu ordonnes qu’on me frappe ?

Quand on compare les paroles de Paul avec la conduite de Jésus (Jean 18.23), on trouve celle-ci plus calme et plus exempte de toute vivacité de tempérament. Mais il ne faut pas exagérer la différence.

Les mots sévères : Dieu te frappera, ne sont ni une imprécation ni un vœu, mais bien l’annonce prophétique du juste jugement de Dieu.

De semblables déclarations se trouvent à chaque page dans les discours des prophètes, des apôtres et du Sauveur lui-même.

Quant à l’épithète de muraille blanchie appliquée à Ananias (comparez Matthieu 23.27), l’apôtre l’explique et la Justifie immédiatement, en prouvant l’hypocrisie du grand prêtre par le contraste criant qu’il y avait entre sa prétention de siéger pour juger selon la loi, au moment même où il transgressait la loi (comparer verset 5, note).

4 Et ceux qui étaient près lui dirent : Tu injuries le souverain sacrificateur de Dieu ?

Souverain sacrificateur de Dieu ; ce mot devait faire ressortir la sainteté de la charge que Paul paraissait ne pas respecter. Mais quel contraste avec le caractère de l’homme !

5 Et Paul dit : Je ne savais pas, frères, qu’il fût souverain sacrificateur ; car il est écrit : Tu ne parleras point mal contre un chef de ton peuple.

La réponse de Paul est, au premier abord, difficile à comprendre. Aussi a-t-elle tourmenté les interprètes, qui, à leur tour, l’ont tourmentée par des explications fausses.

La plupart estiment impossible de prendre à la lettre ce mot : Je ne savais pas et d’admettre que Paul ignorait que celui qui venait d’ordonner de le frapper fût le souverain sacrificateur.

Comment le disciple de Gamaliel, l’ancien délégué du sanhédrin à Damas, aurait-il ignoré la dignité dont était revêtu le président de cette assemblée ?

Mais alors que signifie ce mot : Je ne savais pas ?

Les théologiens de l’école de Tubingue n’hésitent pas à voir dans ces paroles un mensonge. Seulement, pour ne pas l’attribuer à l’apôtre Paul, ils le placent sous la plume de l’historien des Actes, qui n’aurait consigné ici, comme ailleurs, qu’un récit de son invention.

Selon d’autres (Bengel, Olshausen, Neander), ces mots signifieraient : Je ne considérais pas, en sorte que l’apôtre s’excuserait en désavouant ses paroles.

Paul embarrassé, se repentant de sa passion, ne cherche qu’une excuse.
— Neander

Mais quel rôle on fait jouer à cet apôtre de Jésus-Christ, qui représente ici pour la dernière fois au milieu de son peuple la sainte cause de l’Évangile !

Nous nous attendions à voir ici un apôtre, revêtu de la puissance du Saint-Esprit, dans la dignité sacrée d’un prophète de Dieu et l’on nous montre un Paul descendant, en présence du sanhédrin juif et du tribun romain, jusqu’à la passion, au désaveu de ses paroles, à l’embarras, au mensonge !
— Baumgarten

On comprend donc que d’autres exégètes, Augustin, Calvin, Meyer, Stier, Ebrard, n’aient vu dans ce mot de Paul : Je ne savais pas, qu’une sévère ironie à l’adresse de cet Ananias en qui il était impossible de reconnaître un souverain sacrificateur.

S’il l’était en vérité, Paul aurait respecté à son égard le précepte de l’Écriture qu’il cite avec vénération (Exode 22.28). Mais il n’est pas même nécessaire d’admettre l’ironie pour interpréter dans ce sens la parole de l’apôtre.

Comme Baumgarten, nous le traduisons ainsi, avec tout le sérieux qu’y mettait Paul : « Je ne savais pas qu’il fût pontife, car, par sa violence, il se montre, non pas un pontife, mais un tyran ». C’est là, au fond, la pensée de Jésus, qui ne reconnaissait pas pour des serviteurs de Dieu ceux qui, alors, « s’étaient assis sur la chaire de Moïse » (Matthieu 23.2).

Il faut remarquer que le mot souverain sacrificateur est sans article, parce qu’il est considéré comme un simple attribut et un attribut que Paul ne veut pas reconnaître à un tel homme. Aussi aucune réclamation ne s’élève plus dans une assemblée où Ananias était haï et Paul peut profiter de ce silence pour porter sa défense sur un autre point.

Mentionnons enfin l’explication d’après laquelle Paul ne se serait pas rendu compte d’où partait l’ordre de le frapper et l’aurait attribué à un membre quelconque du sanhédrin (Chrysostome, Zöckler, Blass).

Son ignorance est mise par quelques-uns sur le compte de sa mauvaise vue. « Il n’est pas si facile, dit M. Barde, même à une vue exercée, de discerner, une assemblée d’une cinquantaine de membres, d’où vient de partir une interjection. Et c’est à peu près impossible à une vue mauvaise comme l’était celle de Paul ».

Plusieurs préféreront recourir à cette supposition, assez vraisemblable en elle-même, parce qu’elle permet de laisser aux mots : Je ne savais pas, leur sens premier et naturel.

On peut invoquer en sa faveur le début de l’apostrophe de Paul : Toi aussi ; l’apôtre paraît prendre Ananias pour un juge quelconque.

D’autre part, on peut lui opposer la réponse de Paul : Je ne savais pas qu’il fut souverain sacrificateur.

Si l’apôtre avait ignoré de qui provenait l’ordre de le frapper, il aurait dit plutôt : Je ne savais pas que le souverain sacrificateur avait parlé.

Malgré cette difficulté, nous tenons la dernière explication pour préférable.

6 Or Paul sachant qu’une partie du conseil étaient des sadducéens, et l’autre des pharisiens, s’écria au milieu du sanhédrin : Hommes frères, je suis pharisien, fils de pharisiens ; c’est au sujet de l’espérance et de la résurrection des morts que je suis mis en jugement.

Dans un tel moment et dans une telle assemblée, Paul vit clairement qu’il ne pouvait pas reprendre le discours commencé et dans lequel il se proposait de faire son apologie (verset 1).

Aussi, avec une grande présence d’esprit, il porte la lutte sur un point qui pouvait intéresser à la sainte cause qu’il détendait toute la partie du conseil qui n’avait pas abandonné les grands principes de la révélation.

C’était le parti des pharisiens, opposé à celui des sadducéens.

Il s’écrie dans le sanhédrin, de manière que ses paroles soient entendues de tous : Je suis pharisien, fils de pharisiens.

On a prétendu qu’il ne pouvait, sans trahir la vérité, se déclarer pharisien, fils de pharisien. Mais partout et toujours il se fait gloire d’appartenir, comme Juif, à ce parti, retenant soigneusement ce qu’il avait de vrai, tout en en combattant les erreurs (Actes 24.15 ; Philippiens 3.5).

Et, en considérant les grandes doctrines qu’il va invoquer, l’espérance, la résurrection, il pouvait se déclarer, avec une joyeuse conviction, pour les pharisiens, qui soutenaient ces vérités, contre les sadducéens, qui les niaient (verset 8).

Mais c’est précisément ici qu’on peut reprocher à l’apôtre de ne pas tenir un compte exact des faits.

Est-ce bien au sujet de l’espérance de son peuple, de la résurrection des morts qu’il avait été mis en jugement ?

À prendre les choses rigoureusement à la lettre, non. Paul, en effet, était accusé (Actes 21.28) d’enseigner d’une manière contraire à la loi et la principale cause de l’animosité de ses persécuteurs était qu’il se prétendait chargé par Dieu d’annoncer aux païens l’Évangile de son royaume (Actes 22.21-22).

Voici ce qu’on peut dire pour défendre la conduite de l’apôtre en cette circonstance.

En prêchant la grâce, il établissait la loi ; en proclamant l’universalité du salut et en se consacrant à publier ce salut parmi les nations, il ne faisait qu’accomplir les prophéties de l’Ancien Testament.

Ainsi le fondement de sa doctrine et l’objet de ce travail dont ses adversaires lui faisaient un crime, était bien (Romains 3.31) l’espérance d’Israël, c’est-à-dire (tel est le sens du et) la résurrection des morts. Ne pouvant, dans une telle assemblée, entamer une discussion dogmatique, il nomme le grand sujet de la prédication qu’il faisait entendre partout et en toute occasion (Actes 17.32 ; Actes 24.15-21 ; Actes 26.23 ; 1 Corinthiens 15.12).

Mais ces explications ne satisfont pas en tout point. On peut trouver que Paul n’avait pas le droit de se proclamer pharisien, sans ajouter aucune réserve et qu’il a fait preuve de trop d’habileté en se disant mis en cause pour la doctrine de la résurrection.

Si l’étude impartiale du texte, dirons-nous avec M. Barde, ne nous amène pas à une intelligence satisfaisante de la conduite de l’apôtre dans cette circonstance, mieux vaut l’avouer loyalement. Paul n’a prétendu nulle part à l’infaillibilité.

Mais nous ajouterons, avec le même auteur, cette réflexion équitable : « Nous connaissons trop peu une foule de circonstances de ce procès pour porter un jugement définitif », M. Weiss prétend d’ailleurs, en se fondant sur l’imparfait (en grec participe présent) : comme il disait cela (verset 7), que Luc nous a conservé seulement, au verset 6, une parole résumant la harangue de Paul et que celui-ci a pu expliquer en quel sens il se réclamait du parti pharisien.

7 Et comme il disait cela, il s’éleva une altercation entre les pharisiens et les sadducéens ; et l’assemblée se divisa. 8 Car les sadducéens disent qu’il n’y a point de résurrection, ni d’ange ni d’esprit ; tandis que les pharisiens admettent l’un et l’autre.

Voir, sur les sectes des pharisiens et des sadducéens, Matthieu 3.7, 1re note.

Ces derniers niaient la vie à venir, le monde des esprits, l’existence des anges, à plus forte raison la résurrection.

Les pharisiens, au contraire, admettaient l’un et l’autre, c’est-à-dire la résurrection et le monde invisible, peuplé des esprits glorifiés et des anges de Dieu.

Donc Paul se sentait infiniment plus rapproché des pharisiens que des saducéens et il devait désirer faire sentir aux premiers ces points de contact entre eux et lui et ainsi les intéresser à sa cause et à celle de l’Évangile.

C’est ce qui légitimerait son procédé, qui divisa ces deux partis.

9 Et il se fit une grande clameur. Et quelques scribes du parti des pharisiens s’étant levés, disputaient violemment, en disant : Nous ne trouvons aucun mal en cet homme ; mais si un esprit ou un ange lui a parlé ?…

Quelques-uns des scribes, ou docteurs de la loi, du parti pharisien, prennent la parole au milieu du bruit, pour proclamer l’innocence de Paul ; ils admettent même la possibilité qu’il ait eu des révélations du ciel. Ils ne l’affirment pas, mais laissent la question en suspens, en ces termes prudents : mais si un esprit ou un ange lui a parlé ?…qu’avons-nous à dire ? Nous achevons ainsi la phrase suspendue (Jean 6.62 ; Romains 9.22).

Le texte reçu la complète par ces mots, qui se lisent dans quelques majuscules et la plupart des minuscules, mais qui sont empruntés à Actes 5.39 : ne combattons pas contre Dieu.

Il n’y a pas de doute, quoi qu’en dise Meyer, que cette parole des scribes ne soit une allusion aux récits que Paul avait faits la veille (Actes 22.6 ; Actes 22.17-18) et dans lesquels les sadducéens ne pouvaient voir que des impostures.

10 Et comme une grande agitation se produisait, le tribun, craignant que Paul ne fût mis en pièces par eux, ordonna que la troupe descendit pour l’enlever du milieu d’eux et le conduire dans la forteresse.

Le tribun de la cohorte, présent à cette séance du sanhédrin, dont il attendait plus de lumière sur son mystérieux prisonnier (Actes 22.30), voyant le tumulte augmenter autour de lui, craignit pour sa vie, dont il était responsable, et, pour la seconde fois (Actes 22.24), il le mit en sûreté dans la forteresse.

C’est de là que la troupe dut descendre pour l’enlever du milieu du sanhédrin.

11 Mais la nuit suivante, le Seigneur lui apparut et dit : Prends courage ; car, comme tu as rendu témoignage à Jérusalem de ce qui me concerne, il faut aussi que tu rendes témoignage à Rome.

Paul, dans les dangers et les souffrances qu’il endurait alors et qui l’attendaient dans sa longue captivité, avait grand besoin de ce courage que le Seigneur lui inspire.

Ce qu’il lui révèle sur le témoignage qu’il aura à rendre à Rome (grec) des choses touchant moi, était tout à fait en harmonie avec la propre pensée de l’apôtre (Actes 19.21 ; Romains 15.23).

12 Mais, quand le jour fut venu, les Juifs, ayant fait un complot, firent des imprécations contre eux-mêmes, disant qu’ils ne mangeraient ni ne boiraient qu’ils n’eussent tué Paul.

Le complot ourdi contre Paul et dénoncé au tribun

  1. Le guet-apens projeté. Le lendemain matin plus de quarante Juifs s’obligent par un vœu à ne manger ni boire qu’ils n’aient tué Paul. Ils font part de leur projet au sanhédrin et lui demandent de solliciter du tribun une nouvelle comparution du prisonnier ; ils le tueront pendant qu’on l’amènera (12-13).
  2. Le neveu de Paul auprès du tribun. Le fils de la sœur de Paul entend parler du complot et vient le révéler à Paul. Celui-ci prie un des centurions de conduire le jeune homme au tribun. Le tribun le conduit à l’écart et reçoit sa communication. Il lui recommande le silence (16-22).

Le tribun prend ses mesures pour le transfert de Paul à Césarée

  1. L’escorte commandée. Deux centurions reçoivent l’ordre de tenir prêts pour neuf heures du soir des fantassins et des cavaliers dont le nombre leur est prescrit et des montures pour Paul, afin de le mener au gouverneur (23, 24).
  2. Lettre à Félix. Claude Lysias expose au gouverneur Félix l’arrestation de Paul, sa comparution devant le sanhédrin, le complot des Juifs contre lui, qui a motivé son envoi à Césarée, où le tribun a assigné ses accusateurs (23-30).
  3. Le voyage. Paul présenté à Félix. Les troupes à pied escortent Paul jusqu’à Anlipatris, d’où elles retournent à Jérusalem. Les cavaliers l’amènent à Césarée, remettent la lettre du tribun au gouverneur et lui présentent Paul. Félix la lit, s’informe de son pays d’origine, et, apprenant qu’il est de Cilicie, dit qu’il l’entendra en présence de ses accusateurs. Il ordonne de le garder dans le prétoire d’Hérode (31-35).

Complot des Juifs contre Paul, Paul est conduit à Césarée (12-35)

Grec : les Juifs s’anathématisérent, disant ne manger ni boire…c’est-à-dire qu’ils prononcèrent contre eux-mêmes la plus rigoureuse excommunication appelée en hébreu cherem (Ainsi verset 14).

Il est probable que ce complot fut tramé à l’instigation de ces mêmes Juifs d’Asie qui, l’avant-veille déjà, avaient voulu tuer Paul (Actes 21.27-31).

13 Or ils étaient plus de quarante qui avaient fait cette conjuration, 14 et, s’étant rendus vers les principaux sacrificateurs et les anciens, ils dirent : Nous avons juré, avec des imprécations contre nous-mêmes, de ne rien manger que nous n’ayons tué Paul. 15 Vous donc maintenant intervenez, avec le sanhédrin, auprès du tribun, afin qu’il le fasse amener devant vous, comme si vous vouliez vous informer plus exactement de son affaire ; et nous, avant qu’il approche, nous sommes prêts à le tuer.

Les conjurés, ne pouvant atteindre Paul s’il restait dans la forteresse, s’adressent aux membres du sanhédrin et leur demandent d’obtenir du tribun, au nom du sanhédrin, de faire paraître Paul une seconde fois devant cette assemblée, sous prétexte de s’informer plus exactement de son affaire.

Les assassins se chargent du reste, sans que les membres du sanhédrin aient à s’en mêler ; ils sont prêts à tuer l’apôtre, avant qu’il approche du sanhédrin et paraisse devant lui.

16 Mais le fils de la sœur de Paul, ayant ouï parler du guet-apens, vint, et étant entré dans la forteresse, le rapporta à Paul. 17 Et Paul ayant appelé un des centeniers, lui dit : Mène ce jeune homme vers le tribun, car il a quelque chose à lui rapporter. 18 Il le prit donc avec lui et le mena vers le tribun, et dit : Le prisonnier Paul m’a appelé et m’a prié de t’amener ce jeune homme qui a quelque chose à te dire. 19 Et le tribun le prenant par la main et s’étant retiré à l’écart, lui demandait : Qu’est-ce que tu as à me rapporter ? 20 Et il dit : Les Juifs ont résolu de te prier de faire descendre demain Paul dans le sanhédrin, sous prétexte de s’informer plus exactement de son affaire. 21 Toi donc, ne te fie pas à eux ; car plus de quarante d’entre eux lui dressent un guet-apens et se sont engagés, avec des imprécations contre eux-mêmes, à ne manger ni boire qu’ils ne l’aient tué ; et maintenant ils sont prêts, attendant ta promesse. 22 Le tribun renvoya le jeune homme, après lui avoir donné cet ordre : Ne dis à personne que tu m’as fait connaître ces choses.

Ainsi, par une direction de la providence qui veillait sur lui, l’apôtre échappa d’un danger imminent et les conjurés ne recueillirent que leur anathème.

Nous apprenons, par ce récit, que Paul avait une sœur mariée à Jérusalem et c’est du fils de cette sœur que Dieu se servit pour le sauver.

Paul, malgré l’assurance qui lui avait été donnés par le Seigneur (verset 11), averti par son neveu, ne néglige rien pour obtenir la protection du tribun militaire.

Celui-ci, qui joue un beau rôle dans toute cette histoire, reçoit le jeune homme, le prend par la main, le mène à l’écart pour l’encourager à parler, et, ayant tout appris de lui, l’invite à ne dire à personne ce qu’il vient de lui communiquer.

Ce silence était nécessaire à l’exécution de son plan. Tout concourt, sous la direction de Dieu, à conserver la vie du grand apôtre.

23 Et ayant appelé deux des centeniers, il dit : Tenez prêts, dès la troisième heure de la nuit, deux cents soldats, soixante et dix cavaliers, et deux cents archers, pour aller jusqu’à Césarée. 24 Et il leur commanda de préparer des montures, afin qu’ayant mis Paul dessus, ils le mènent sain et sauf au gouverneur Félix.

Le tribun militaire prend des précautions telles, que non seulement Paul sera conduit à Césarée sain et sauf (grec sauvé au travers), mais que toute révolte qui se produirait parmi les Juifs serait aussitôt réprimée.

Il appelle deux des centeniers (grec), certains deux des centeniers, expression qui désigne ces deux officiers comme jouissant de la confiance particulière de leur chef.

Outre les deux cents soldats d’infanterie et soixante-dix de cavalerie, il met sur pied deux cents hommes de troupes légères, dont il est difficile de déterminer l’arme, parce que le mot dont se sert Luc est inconnu dans le Nouveau Testament et dans la littérature grecque.

Nos versions traduisent par archers ; Rilliet par troupes légères.

Il fallait encore des montures pour le prisonnier et ceux à la garde desquels il était confié.

Tout ce convoi devait être prêt à partir dès la troisième heure de la nuit, c’est-à-dire neuf heures du soir.

Paul devait être livré au gouverneur Antonius Félix, affranchi de la famille impériale et frère de Pallas, le favori de Claude. Il fut procurateur de Judée, probablement de 52 à 60.

Tacite (Histoires V, 9) nous l’a fait connaître en ces termes : « Il exerça un pouvoir royal avec l’âme d’un esclave, en se livrant à toute sorte de cruautés et de débauches » (voir Actes 24.26-27).

Comparer le tableau du Gouvernement de Félix et de son émule Cumanus, dans Tacite, Annales XII, 54. D’après Josèphe (Antiquités Juives, XX, 6 ; Guerre, II, 12), Félix fut le successeur de Cumanus.

25 Il écrivit une lettre en ces termes : 26 Claude Lysias, au très excellent gouverneur Félix, salut ! 27 Cet homme avait été saisi par les Juifs et allait être tué par eux, quand je suis survenu avec la troupe et le leur ai arraché, ayant appris qu’il était Romain. 28 Et voulant connaître le motif pour lequel ils l’accusaient, je l’ai fait descendre dans leur sanhédrin. 29 J’ai trouvé qu’il était accusé au sujet de questions de leur loi, mais qu’il n’était l’objet d’aucune imputation qui méritât la mort ou les liens. 30 Et ayant été averti qu’un guet-apens devait être dressé contre cet homme, je l’ai aussitôt envoyé auprès de toi, ayant aussi fait savoir à ses accusateurs qu’ils eussent à parler contre lui devant toi.

Le tribun militaire, Claude Lysias (Actes 22.28, note), tout païen qu’il était, montra dans toutes ces transactions un caractère bien supérieur à celui des Juifs.

Sa lettre à Félix rend un compte exact de ce qui venait de se passer, sauf un détail qui l’a fait accuser de mensonge par quelques exégètes (Reuss dit : « un effronté mensonge ») : il prétend avoir enlevé Paul (que les Juifs voulaient tuer), ayant appris qu’il était Romain (Actes 21.31-33).

Or, à ce moment, Lysias ne savait pas encore que Paul était Romain, il ne l’apprit que plus tard (Actes 22.25 et suivants). Il y a là, en effet, une inexactitude.

Mais le commandant arracha une seconde fois le prisonnier aux Juifs, craignant qu’il ne fût mis en pièces par eux (verset 10) et cette fois c’était réellement le citoyen romain qu’il protégeait.

Le texte de la lettre présente plusieurs variantes.

Au verset 29, le texte occidental porte : « Qu’il n’était accusé de rien de plus que touchant la loi de Moïse et touchant un certain Jésus ».

Au verset 30 le texte reçu ajoute : dressé par les Juifs. Codex Sinaiticus, A, ont : dressé de leur part. Ces deux manuscrits omettent : sans retard.

Le texte reçu, avec Codex Sinaiticus, etc., termine la lettre par la formule de salutation : porte-toi bien, qui manque dans B, A.

31 Les soldats donc, selon l’ordre qu’ils avaient reçu, prirent Paul et le menèrent de nuit à Antipatris. 32 Et le lendemain, ayant laissé les cavaliers s’en aller avec lui, ils s’en retournèrent à la forteresse.

Les soldats de l’infanterie, n’étant plus nécessaires à la protection du prisonnier, n’allèrent que jusqu’à Antipatris, laissant les cavaliers poursuivre jusqu’à Césarée, tandis qu’eux-mêmes retournèrent à Jérusalem.

Antipatris, située entre Lydde et Césarée, avait été fondée par Hérode le Grand, qui la nomma ainsi en l’honneur de son père Antipater.

Cette ville était éloignée de Jérusalem de 42 milles romains (63 kilomètres). On a accusé Luc d’erreur, parce qu’il paraît dire que les troupes franchirent en une nuit cette distance et retournèrent le lendemain jusqu’à leur forteresse. Mais son indication peut être entendue en ce sens, que les troupes partirent de nuit, selon l’ordre reçu et que le lendemain de leur arrivée à Antipatris, elles se remirent en route pour retourner à Jérusalem.

33 Les cavaliers étant arrivés à Césarée, et ayant remis la lettre au gouverneur, lui présentèrent aussi Paul. 34 Et quand il l’eut lue, il lui demanda de quelle province il était ; et ayant appris qu’il était de Cilicie, 35 il lui dit : Je t’entendrai quand tes accusateurs seront aussi venus. Et il ordonna qu’il fût gardé dans le prétoire d’Hérode.

Je t’entendrai signifie : je te ferai subir un interrogatoire en règle.

Il fallait, en effet, pour cela que les accusateurs se fussent présentés devant Félix, comme ils y avaient été engagés par le tribun militaire (verset 30).

Le prétoire d’Hérode était un palais bâti par Hérode le Grand et qui servait de résidence au gouverneur romain.

Le fait que Paul fut gardé dans cette demeure et non dans une prison ordinaire, peut être considéré comme une faveur. Et cette faveur, il la dut probablement, comme le pense Meyer, à la lettre de Lysias, qui déclarait ce prisonnier citoyen romain et, de plus, innocent de tout délit qui méritât la mort ou même la prison (verset 29).