Verset à verset Double colonne
Ce groupe comprend une exhortation au roi de Juda Jérémie 22.1-9 ; et trois sentences sur Sallum (Joachaz), versets 10 et 12 ; sur Jéhojakim, versets 13 à 19 ; sur Conia (Jéchonias ou Jéhojachin), versets 20 à 30 ; il se termine par l’annonce de l’avènement d’un roi juste, digne fils de David, Jérémie 23.1-8. Comparez Ézéchiel chapitre 34, un discours analogue adressé aux mauvais pasteurs d’Israël
Le morceau Jérémie 22.1-19 date du commencement du règne de Jéhojakim (voir verset 10) et le morceau versets 20 à 30 du court règne de Jéhojachin. Le peuple était encore sous l’impression toute fraîche de la perte de Josias et les : regrets dont ce pieux roi était l’objet étaient augmentés par les injustices et les cruautés dont se rendait coupable son fils Jéhojakim, qui avait succédé à son frère Joachaz.
Comparez Jérémie 17.19-20.
Descends, c’est-à-dire du temple, qui occupait le sommet de la colline de Sion ; comparez Jérémie 36.12 ; Jérémie 26.10, ici, comme au chapitre 7, le prophète doit parler dans un lieu officiel ; là, c’était devant le temple ; ici, devant le palais royal.
Faites droit. Comparez Jérémie 21.11-12. Le prophète se contente de signaler les abus les plus criants. Jean-Baptiste fera de même, Luc 3.11-15.
Il entrera. Comparez Jérémie 17.25. Une belle promesse était attachée à la réalisation de conditions si élémentaires. Ce retour au bien eût pu être encore, même à la onzième heure, le gage d’une amélioration plus complète et prévenir le châtiment de l’exil. Comparez Jérémie 21.12 (note).
Je jure par moi-même. Dieu emploie ici le serment pour confirmer, non, comme d’ordinaire, la promesse (verset 4), mais la menace (verset 5), parce que la ruine paraissait à ces hommes aveuglés bien plus improbable que la délivrance.
Par une figure hardie, le prophète, après s’être adressé à ceux qui habitent la maison royale, interpelle tout à coup cette maison elle-même.
Un Galaad. Les montagnes de Galaad, surtout dans le voisinage du torrent de Jabbok, étaient et sont encore couvertes des plus belles forêts de chênes.
Le sommet du Liban. Salomon avait, bâti, dans l’enceinte de ses palais, une maison, sans doute plus merveilleuse encore que tout le reste, qui s’appelait la maison du parc du Liban (1 Rois 7.2). Le prophète fait allusion aux jardins et aux parcs magnifiques qui entouraient le palais nouvellement bâti par Jéhojakim. Ces parcs royaux, véritables forêts de cèdres, allaient être changés en désert.
Je sacre, littéralement : je sanctifie. Comparez Jérémie 6.4. Nous avons déjà dit que toute entreprise guerrière, chez les Gentils comme en Israël, était inaugurée par la religion. Ici, c’est le Dieu d’Israël lui-même qui préside à ces apprêts et qui envoie à leur propre insu les dévastateurs.
Avec ses outils : ses haches ; l’image précédente continue (Ésaïe 13.3).
Tes cèdres de choix, transportés à grands frais du Liban dans les jardins du roi.
Comparez Deutéronome 29.23 et suivants et 1 Rois 9.8-9. Cette prédiction s’est accomplie à la lettre. C’est le propos que toutes les nations chrétiennes ont tenu jusqu’à aujourd’hui.
Celui qui est mort : Josias, qui avait été tué, à la bataille de Méguiddo, 2 Chroniques 35.23-24. Le deuil du roi Josias est resté typique en Israël (Zacharie 12.11). Les expressions de notre texte font supposer que cette catastrophe était encore récente. Il y a une émotion profonde dans ces mots : Ne pleurez pas celui qui est mort. Le prophète veut dire que chacun devrait désirer d’être mort à sa place. Le pieux roi Josias avait reçu de Dieu cette dernière grâce, de mourir en roi et avant la catastrophe.
Celui qui s’en est allé : Joachaz, fils de Josias, qui, d’abord proclamé roi par le peuple après la mort de son père, avait été emmené en Égypte. Voir introduction. Comparez 2 Chroniques 36.2 ; 2 Chroniques 36.5.
Sallum, le premier nom de Joachaz, d’après 1 Chroniques 3.15. Mais le malheur du jeune exilé sera bien dépassé par celui du roi actuellement régnant.
Tout en rançonnant ses sujets pour s’acquitter du tribut que Pharaon Néco lui avait imposé (2 Rois 23.33), Jéhojakim insultait à la misère publique en se faisant construire des demeures fastueuses qu’il ne payait même pas.
Son prochain : expression frappante, surtout dans l’antiquité et dans le despotique Orient, mais tout à fait conforme à l’esprit de la législation mosaïque (Deutéronome 17.11-20). L’Ancien Testament voit déjà des prochains là où l’antiquité païenne ne voyait que des sujets et des esclaves.
Ne lui paie pas son ouvrage. La loi mosaïque était plus humaine que nos mœurs envers les travailleurs ; car elle ordonnait non seulement qu’ils fussent payés, mais qu’ils le fussent chaque soir. Voir Lévitique 19.13 ; Deutéronome 24.14-15.
La plupart des maisons de l’Orient, où l’on vit presque constamment en plein air, sont petites et n’ont que peu de fenêtres ; Jéhojakim voulait en ceci encore se distinguer de ses sujets et peut-être aussi imiter l’architecture des grands palais de Ninive.
De plus, comme ces monarques étrangers qui, à leur avènement, se bâtissaient chacun leur palais, Jéhojakim ne se contentait plus, comme ses prédécesseurs, des palais élevés par Salomon ; il prétendait rivaliser avec ce grand roi par des constructions nouvelles.
La manie de bâtir, qui a été le faible de grands monarques, ne suffit pas pour faire un grand roi d’un petit
Ton père : Josias, qui a surpassé Salomon lui-même en véritable grandeur, ne s’est pas trouvé bien malheureux en accomplissant fidèlement son devoir journalier.
N’est-ce pas là me connaître ? Peut-être allusion à ce que Jéhojakim prétendait rivaliser avec Salomon en sagesse aussi bien qu’en magnificence.
Ne visent qu’à la rapine… Un bon roi ne pense au sang innocent que pour le venger, à l’oppression et aux pillages qui se commettent dans son pays, que pour les punir et les réparer. Jéhojakim ne pensait qu’à donner l’exemple do tous les crimes.
Hélas, mon frère,… ma sœur ! Formules ordinaires des lamentations, citées ici pour faire tableau. Comparez 1 Rois 13.30.
Il sera enterré comme… Cette prédiction est répétée Jérémie 36.30-31. Les livres des Rois et des Chroniques ne nous disent point où et comment elle s’est accomplie. La mort de Jéhojakim est mentionnée 2 Rois 24.6 en ces termes : il s’endormit avec ses pères. Cette expression peut s’appliquer aussi à une mort tragique, comme c’est le cas pour celle d’Achab, 1 Rois 22.40. D’après 2 Chroniques 36.6, Jéhojakim, aurait été emmené à Babylone par Nébucadnetsar.
Le Liban : la frontière d’Israël au nord ; Basan le hauran actuel, au nord-est ; Abarim chaîne à laquelle appartient la montagne de Nébo, d’où Moïse contempla la Terre promise ; située au sud-est.
Le peuple de Jérusalem et de Juda, représenté sous la figure d’une femme en détresse, est invité à aller s’assurer sur ces sommets qu’aucun de ses anciens alliés (tous tes amants) ne vient à son secours.
Je t’ai parlé. Comparez Jérémie 2.1-7.
Comparez Jérémie 2.1-7. Littéralement : paîtra ceux qui te paissent : comme tes pasteurs (tes rois) t’ont menée à ta perte, le châtiment les emportera pour les conduire à la leur.
Habites au Liban. Jérusalem a, pour ainsi dire, transporté le Liban dans les jardins de ses palais. Les particuliers riches avaient imité le luxe des rois.
Ton aire : Comparez verset 14.
Conia : Jéojachin, fils de Jéhojakim, qui monta sur le trône, d’après 2 Rois 24.8, à l’âge de 18 ans. Il n’est appelé Conia que par Jérémie (ici et Jérémie 37.1). Conia est probablement une abréviation familière de Jéchonia le nom qu’il portait avant son avènement au trône. Comparez 1 Chroniques 3.16.
Serait un anneau : l’anneau qui sert à sceller les ordres du roi, c’est le seul objet dont on ne se sépare jamais (Cantique 8.6). Conia fût-il semblable au plus précieux des ornements, il ne serait point épargné ; combien moins après avoir suivi dès sa jeunesse les errements de son père 2 Rois 24.9 ; 2 Chroniques 36.9.
Ta mère : elle s’appelait Néhustha (2 Rois 24.8) ; elle fut emmenée avec son fils à Babylone. Comparez Jérémie 13.18 (note) et 2 Rois 24.12 ; 2 Rois 24.15.
Ils n’y reviendront pas : prophétie littéralement accomplie ; comparez 2 Rois 25.27-30.
Vase brisé : comparez chapitre 19.
Le prophète se transporte au moment où la déportation sera un fait accompli et s’étonne avec douleur et sympathie du contraste entre la noblesse de ce fils de David et sa destinée.
Inscrivez-le comme stérile. Cela ne signifie pas qu’il n’aura pas d’enfant, puisqu’il est dit ensuite que nul de ses enfants ne réussira… ; mais que, s’il a des enfants, ce sera, quant à lui, comme s’il n’en avait pas, parce que nul d’entre eux ne dominera sur Juda. Et en effet, la ligne directe des successeurs de David par Salomon a fini avec Jéhojachin. Zorobabel, qui, au retour de la captivité, fut le chef de Juda et de qui est issu Jésus-Christ, descendait de David, non par Salomon, mais par Nathan, frère obscur de ce monarque. C’est ce que nous apprenons par la généalogie de Jésus dans saint Luc (Luc 3.27-31). Une telle donnée n’a pas été inventée à plaisir ; une généalogie fabriquée eût plutôt cherché à faire de Jésus un rejeton de la famille royale. Cette substitution renferme la condamnation de Jéhojachin et de ses pères, jusqu’à Salomon lui-même, mais tout en maintenant la promesse faite à David. Quant à l’accord de la donnée de Luc avec celle de Matthieu 1.12, empruntée sans doute à 1 Chroniques 3.16-17, voir à ce dernier passage.