Verset à verset Double colonne
C’est ici la complainte d’un Israélite dont la souffrance se confond avec celle de son peuple. Sion est en ruines (versets 14 et 15), Juda est exilé (verset 11). Après l’exposé de la triste situation du suppliant (versets 1 à 12), le langage de la foi se fait entendre. L’Éternel demeure à perpétuité ; donc son peuple ne saurait périr ; par son relèvement, Dieu se glorifiera aux yeux de toutes les nations (versets 13 à 23). Les derniers versets du psaume résument à la fois la complainte et la consolation de l’exilé (versets 21 à 29). Ce psaume fait de nombreux emprunts à d’autres psaumes ou à des livres prophétiques, spécialement à la seconde partie d’Ésaïe.
Prière d’un affligé. Cette suscription n’a pas, comme d’autres, pour but de faire connaître l’origine du psaume, mais bien plutôt d’indiquer dès l’entrée dans quelle situation d’esprit ce cantique peut être lu avec profit.
Frappé, comme l’est une plante par les rayons brûlants du soleil. La même expression est employée Psaumes 121.6.
Les os s’attachent à ma chair. Trait analogue à celui de Psaumes 22.18 : Je compterais tous mes os. La chair ne dissimule plus les os ; elle semble faire un avec eux tant ils sont saillants. Cet état d’épuisement, provoqué par le manque complet de nourriture (verset 5), est encore augmenté par le travail intérieur de l’âme du psalmiste (à force de gémir).
Du désert,… des lieux désolés. L’exil où il se trouve transporté est, pour le psalmiste, comparable aux solitudes désolées où retentissent les cris lugubres du pélican et du chat-huant. Lui-même, frappé avec son peuple des jugements divins, se compare à ces animaux, qui hantent des lieux déserts et maudits.
Comme un passereau solitaire. Pendant que tout repose et qu’il veille seul, il se sent aussi impuissant qu’un petit oiseau qui n’a plus ni asile (sur un toit), ni compagnons.
Follement animés. Traduction littérale : Mes insensés jurent par moi. Comparez Ésaïe 65.15 ; Jérémie 29.22.
Car je mange la cendre. Le genre de vie si misérable auquel je suis réduit semble justifier l’attitude méprisante de mes ennemis.
La cendre au lieu de pain : allusion à la coutume de s’asseoir sur la cendre et de s’en couvrir la tête, en signe de grande affliction (Job 2.8 ; Ézéchiel 27.30) ; cette cendre, qu’il respire, lui tient lieu de nourriture.
Car tu m’as emporté, enlevé de terre, comme par un vent violent. Cette image, employée déjà Job 30.22, est appliquée ici au déporté, enlevé à sa patrie pour être jeté au loin, dans le pays de l’exil. La triste position du psalmiste est celle de milliers de ses compatriotes.
Comme l’ombre qui s’allonge, à mesure que le soleil baisse et que s’avance la nuit. La pensée complètement exprimée serait : Ma vie s’en va, comme la clarté du jour, quand l’ombre s’allonge.
Quel que soit l’abaissement d’Israël, l’Éternel demeure le Maître du monde ; de là, pour son peuple, la certitude d’un salut dans lequel Dieu se glorifiera aux yeux de toutes les nations.
Mais toi : forte opposition avec le moi du verset précédent.
Tu trônes ou : tu sièges ; expression fréquemment employée pour désigner la position de l’Éternel, comme maître du monde et comme juge (Psaumes 9.8 ; Psaumes 29.10 ; Lamentations 5.19).
Et ta mémoire d’âge en âge : tu ne laisses pas périr la mémoire de ton nom ; chaque âge aura de quoi en perpétuer le souvenir (Exode 3.15).
Le temps fixé est là. Il n’y a plus à tarder, puisque la détresse est à son comble. Plusieurs entendent par ce temps fixé la fin des soixante-dix années d’exil annoncées par Jérémie 25.11 ; mais une allusion positive à cette prophétie serait, nous semble-t-il, plus clairement indiquée.
À ses pierres, qui sont encore là, gisantes et dispersées (Néhémie 2.13-14). Cette parole revient actuellement d’elle-même à la mémoire du voyageur qui voit les Juifs, à Jérusalem, pleurer près du mur des lamentations. L’exilé prête ici une âme aux pierres et à la poussière de Jérusalem et il souffre avec elles de leur état d’abandon.
Toutes les nations craindront. Magnifique résultat de la délivrance de Sion.
La prière des délaissés, littéralement : du dépouillé mis à nu, sans force ni ressources d’aucune sorte.
Leur supplication. Le mot leur montre bien que le délaissé qui parle ici n’est que le représentant d’un grand nombre de malheureux semblables à lui.
Cela sera écrit : pour que la connaissance s’en perpétue d’âge en âge.
Le peuple qui sera créé, expression énergique, propre à faire sentir que, pour relever le peuple de son anéantissement présent, il ne faut rien moins qu’un acte de la toute-puissance créatrice.
Ceux qui étaient voués à la mort, hébreu : les fils de la mort, ceux qui semblaient nés d’elle et pour elle (Psaumes 79.11).
Quand les peuples se rassembleront… Le salut d’Israël, véritable résurrection des fils de la mort, sera pour tous les peuples le signal de l’affranchissement de l’idolâtrie. Le même résultat est annoncé Psaumes 22.28-32, comme fruit des souffrance et de l’élévation du Messie et Romains 11.12, Romains 11.15, comme conséquence de la conversion finale d’Israël.
La plainte du psalmiste s’est déjà changée en chant de triomphe ; s’il revient maintenant à sa triste situation (verset 24), ce n’est que pour affirmer avec d’autant plus de force la puissance immuable de l’Éternel.
Il a abattu ma force, ou, d’après une autre leçon : sa force, celle du peuple d’Israël. Même si l’on admet le texte habituellement reçu : ma force, il faut supposer, d’après tout l’ensemble du psaume, que le psalmiste s’identifie avec son peuple et parle en son nom.
Au milieu de mes jours. Ne m’enlève pas prématurément, alors que, soit comme peuple, soit, comme individu, le but de mon existence n’est point atteint.
Tes années durent d’âge en âge et il en sera de même de celles du peuple qui peut appeler Dieu son Dieu.
La terre… les cieux… Ce qu’il y a de plus stable dans la création, ce qui existe dès le commencement des temps, vieillira et sera changé ; mais pour toi, pas de changement. Comparez Ésaïe 51.16 ; Ésaïe 65.17. Quel gage pour Israël de sa propre durée au travers même de toutes les vicissitudes de ce monde ou de l’univers !
Comme un vêtement. Comparez Ésaïe 51.6 ; Ésaïe 50.9.
Les versets 26 à 28 sont cités par l’auteur de l’épître aux Hébreux, qui les applique au Fils éternel, Dieu manifesté, le Jéhova de la nouvelle alliance (Hébreux 1.10-12).
Mais toi, tu restes le même. L’expression hébraïque est d’une éloquente concision : Mais toi, te voilà ! C’est ici, semble-t-il, une réminiscence d’Ésaïe 43.10 : Afin que vous compreniez que c’est moi !
Une demeure, dans la terre promise au peuple de Dieu.