Verset à verset Double colonne
L’espérance du royaume messianique, si admirablement développée déjà dans le Psaume 85 et rappelée dans le Psaume 86, remplit entièrement celui-ci. Dans sa concision presque énigmatique, il célèbre Jérusalem comme la métropole de la terre entière ; il montre les pays les plus puissants recevant, par l’appel de Dieu, droit de bourgeoisie dans la ville du Très-Haut et l’Éternel les inscrivant lui-même dans le registre de ses sujets. Nous ignorons la date de la composition de ce psaume. Quelle qu’elle soit, la pensée qui s’exprime ici, sous une forme si originale et avec un accent si joyeux, contraste fortement avec la position qui fut celle du peuple de l’Éternel au milieu des grandes nations du monde. Même les espérances que faisaient concevoir les règnes de David et de Salomon ne sauraient expliquer les choses glorieuses (verset 3) qui sont dites ici de Sion. D’ailleurs, à cette époque, Babylone, mentionnée verset 4, semble n’avoir pas été en relation avec Israël. Seule l’inspiration prophétique peut dépasser, comme le fait notre psaume, la réalité présente. Ce psaume porte au plus haut degré l’empreinte de l’esprit prophétique. Il semble être tout entier un écho vibrant d’Ésaïe 44.5 : Celui-ci dira : Moi je suis à l’Éternel ! Celui-là se réclamera du nom de Jacob ; un autre prendra sur sa main la marque de l’Éternel.
Cette prophétie s’accomplit spirituellement dans l’ère actuelle, où, dès la Pentecôte, des hommes de toutes les nations naissent dans l’Église à une vie nouvelle. Après la brève déclaration du verset 1, que l’on peut presque envisager comme un titre, vient une première strophe, qui n’est encore qu’une sorte d’introduction (versets 2 et 3). La seconde strophe renferme la pensée propre du psaume (versets 4 et 6). Un dernier verset, qui est comme un cri de joie, forme la conclusion (verset 7).
Ce verset est un premier trait de pinceau, qui reste incomplet ; le second stiche, qui devrait compléter le premier, fait défaut ; le psalmiste semble laisser deviner la vision qui remplit son esprit.
Il l’a fondée…, littéralement : sa fondation sur les saintes montagnes. D’après le suffixe hébreu, le mot sa désigne une fondation qui appartient à Dieu. Voilà pourquoi nous traduisons : Il l’a fondée et non : Elle est fondée.
Les saintes montagnes : les collines sur lesquelles est bâtie Jérusalem. Elles étaient saintes avant même que la ville fût construite, à cause du choix que Dieu avait, fait d’elles, pour y placer un jour son sanctuaire (comparez Genèse 22.11 ; Michée 4.1 ; Ésaïe 2.2-4).
Plus que toutes les demeures de Jacob. Ce n’est pas rabaisser ces dernières que de parler ainsi, car il suffit de les nommer, pour rappeler combien Dieu les aime, mais c’est faire ressortir l’extraordinaire élévation de Sion, qui a été l’objet d’une préférence plus signalée encore.
Des choses glorieuses sont dites, sont prononcées à ton sujet, comme un oracle divin. L’auteur a sans doute en vue la déclaration prophétique qui va suivre et qui vient s’ajouter à d’autres paroles des psalmistes ou des prophètes (Psaumes 46.5-6 ; Psaumes 48.2-3).
L’Égypte. Le mot hébreu employé ici est Rahab, qui signifie : vanité, arrogance. C’est le nom par lequel Ésaïe désigne ironiquement l’Égypte, par allusion aux vaines promesses de secours qu’elle avait données à Juda contre les Assyriens (Ésaïe 30.7). Ici, l’ironie est absente, Rahab est employé comme nom propre habituel.
L’Égypte et Babylone : les deux puissances au pouvoir desquelles Israël a été le plus complètement livré. La mention de Babylone à côté de l’Égypte a donné lieu de penser que notre psaume date du retour de l’exil. Il y a ici une probabilité qui ne saurait pourtant être une certitude.
Parmi ceux qui me connaissent. Il ne s’agit pas ici d’une simple connaissance intellectuelle, mais de celle qui lie l’homme à Dieu (Psaumes 9.11 ; Psaumes 36.11).
Les Philistins : le peuple guerrier, ennemi séculaire de Juda.
Tyr, orgueilleuse de sa richesse.
L’Éthiopie, la rivale de l’Égypte. Comparez Ésaïe 18.1.
Celui-ci est né là. Dieu donne à chacun de ces peuples droit de cité à Jérusalem, comme s’il y avait pris naissance. Mais il y a plus encore. L’importance donnée à cette parole, qui est répétée verset 5 et verset 6, montre surtout si on la rapproche du verset final du psaume, qu’une ère nouvelle, une véritable naissance date pour l’humanité de la relation qui s’établit entre elle et Sion. C’est l’accomplissement de l’antique promesse, Genèse 12.3. Comparez Ésaïe 60.4.
Et de Sion il est dit… La faveur divine accordée à l’Égypte, Babylone, etc., est maintenant présentée sous une autre face, comme un enrichissement accordé à Sion.
Chacun d’eux : chacun de ces peuples a été incorporé séparément à Israël et doit à cette incorporation une vie nouvelle.
Le Très-Haut lui-même, à l’exclusion de tout autre appui, la fait subsister. Jadis Sion a compté tantôt sur l’un, tantôt sur l’autre des peuples mentionnés ; cela a été à son détriment. Maintenant qu’ils sont tous devenus ses fils, elle n’en continue pas moins à subsister par la seule puissance du Très-Haut.
L’Éternel compte… Ce n’est pas la politique, ni l’orgueil humain qui agit ici (comparez 2 Samuel 24.1, le dénombrement de David) ; l’Éternel lui-même enregistre, selon sa grâce souveraine, les nouveaux membres de son peuple. L’image d’un livre, où Dieu inscrit ceux qui lui appartiennent, apparaît déjà dans l’intercession de Moïse (Exode 32.32). Comparez Psaumes 69.29 ; Ésaïe 4.3.
Sainte et universelle allégresse. Le psaume, après avoir commencé par une parole inachevée (verset 1), se termine de même par un vers auquel on ne peut donner en français un sens quelque peu clair qu’en ajoutant les deux verbes qui manquent à l’hébreu. La traduction littérale serait : Et chantant, comme dansant, toutes mes sources en toi. Aussi a-t-on proposé de nombreuses modifications du texte, à partir des Septante, qui traduisent : Tous ceux qui se réjouissent habitent chez toi. Nous en restons à l’interprétation habituelle. Le psalmiste voit en esprit, comme résultat des déclarations divines qui précèdent, un tableau, qu’il ne fait qu’indiquer d’un trait. On chante, on danse ; ce sont des cortèges religieux dans le genre de ceux que décrit Psaumes 68.26 des danses semblables à celles de David devant l’arche (2 Samuel 6.16). Et le refrain que répètent chanteurs et danseurs rappelle, sous une image expressive, ce qu’est devenue Sion pour tous les peuples de la terre : la source de la vraie connaissance, de la vie et de la prospérité. Ésaïe emploie une image analogue, lorsqu’il dit : Vous puiserez des eaux avec allégresse aux sources du salut (Ésaïe 12.3).