Verset à verset Double colonne
Ce morceau comprend (outre le titre Ésaïe 2.1) :
Ce verset est le titre particulier du recueil chapitres 2 à 12 (voir introduction).
A reçue : hébreu a vue. Voir Ésaïe 1.1, note. Les deux discours chapitres 2 à 4 et chapitre 5 datent des premiers temps du règne d’Achaz : la prospérité acquise sous Ozias et Jotham durait encore (Ésaïe 2.7), mais la dissolution morale progressait, l’idolâtrie se répandait (Ésaïe 2.6) et un gouvernement incapable menait le peuple à sa ruine (Ésaïe 3.12).
Ce court morceau est le texte de tout le discours chapitres 2 à 4. Il se retrouve, à peu près dans les mêmes termes, dans le livre de Michée (Michée 4.1-5). On s’accorde généralement à reconnaître que ce prophète ne peut l’avoir emprunté à Ésaïe, car il est chez lui plus complet et se relie plus étroitement à ce qui précède et à ce qui suit ; chez Ésaïe, la fin du tableau est abrégée ; et ce morceau, tout en servant de point de départ au discours, fait l’effet d’un texte tiré d’ailleurs. D’autre part, Ésaïe ne peut non plus l’avoir puisé dans Michée, puisque, d’après Jérémie 26.4-8, ce dernier prononça cette prophétie sous Ézéchias, par conséquent beaucoup plus tard. Il faut donc admettre que tous deux l’ont empruntée à un prophète plus ancien, Joël peut-être, comme on l’a conjecturé (comparez verset 4 et Joël 3.10). L’expression : La bouche de l’Éternel a parlé (Michée 4.4), semble indiquer, en effet, que c’est ici une citation d’un texte antique (comparez Ésaïe 1.20 et la formule toute semblable, Ésaïe 16.13, marquant la fin d’une ancienne prophétie). En tout cas, ce devait être ici un texte connu, populaire et faisant autorité.
À la fin des jours. Les derniers jours sont pour les prophètes ceux où toutes les choses promises seront réalisées. Ce terme coïncide pour chacun d’eux avec la fin de la période dans laquelle il vit. Pour Jacob, c’est l’époque de la conquête de Canaan (Genèse 49.4) ; pour Balaam, le temps où Israël aura vaincu ses ennemis, l’époque de David (Nombres 24.14). L’horizon recule ainsi pour les voyants à mesure que les temps avancent et que les diverses phases du développement du règne de Dieu se découvrent successivement à leurs regards. Pour Ésaïe et les prophètes de la même période, la fin des temps est l’époque de la venue du Messie sur la terre (comparez Joël 2.28 ; Daniel 2.28 ; Daniel 2.44). Pour les apôtres et pour l’Église, les derniers jours désignent la période qui s’étend de la première à la seconde venue du Seigneur (1 Jean 2.18 ; 1 Pierre 4.7).
La montagne de la maison de l’Éternel. La colline du temple, Morija, est l’un des sommets de la montagne sur laquelle est bâtie la ville de Jérusalem et qui est habituellement nommée Sion dans l’Ancien Testament. Voir, sur la situation de Sion, 2 Samuel 5.7, note.
Sera établie au sommet… Jérusalem est dominée à l’est et au sud par les montagnes voisines, celle des Oliviers, par exemple. Mais elle sera alors élevée au-dessus de toutes les montagnes ; on la verra de toutes parts et elle deviendra le rendez-vous des peuples. Cette élévation, qui ne peut évidemment s’entendre dans le sens matériel, est l’image de la gloire spirituelle de Sion aux derniers jours, alors que le Dieu qu’on y adore sera devenu celui de toute la terre (voir le verset 3 qui explique le verset 2) et que le haut-lieu de l’Éternel sera élevé dans la conscience des peuples au-dessus de tous les hauts-lieux ou l’on adore les faux dieux. Tout le discours chapitres 2 à 4 a pour idée centrale l’anéantissement de toute grandeur terrestre devant le Dieu dont la gloire est le but suprême de l’histoire.
Comparez Zacharie 8.20-23, qui renferme un beau développement de la pensée verset 3.
Une émotion puissante parcourt le monde païen : les peuples s’envoient mutuellement des messagers pour s’exhorter l’un l’autre à se rendre à Sion, cette cité jadis méprisée. Ce pèlerinage des peuples représente leur conversion à la religion de Jéhova et l’établissement de son règne et de son culte sur la terre entière par la prédication de sa Parole. Ce que les païens chercheront en Sion, c’est un enseignement (thora : loi, signifie proprement enseignement), la lumière de la révélation de Jéhova. Il n’est pas question ici de rites à accomplir, de sacrifices à offrir ; nulle trace non plus de ce particularisme national, de ces espérances politiques, si fort ancrées dans l’esprit des Juifs. Ce passage respire le spiritualisme le plus pur et l’universalisme le plus large. Le seul privilége d’Israël est d’être le dépositaire de l’enseignement divin (Jean 4.22 ; Romains 3.2).
Les derniers mots du verset : Car la loi… n’appartiennent plus au discours des peuples ; Ésaïe lui-même explique ce qui les attire : c’est la révélation qui, de Sion, éclaire le monde. Cette prophétie s’accomplit par la prédication de l’Évangile, qui répand graduellement dans le monde païen la connaissance du vrai Dieu, du Dieu d’Israël. La révélation évangélique, bien loin d’être opposée ici à la loi, y est comprise ; car la loi, prise dans son vrai sens, renferme la promesse aussi bien que le commandement.
Jéhova, adoré par tous les peuples, devient l’arbitre et par là même le pacificateur universel. Les haines de peuple à peuple disparaissent avec les fausses religions ; soumis à un même roi, tous ne forment qu’une famille. L’art de la guerre ne s’enseigne donc plus et les armes devenues inutiles sont changées en instruments de travail. Cette image rappelle le passage où Joël, parlant d’une phase antérieure à celle-ci, décrit une transformation contraire. Nous assistons de nos jours à la réalisation de cette promesse. À mesure que l’Évangile se répand, la conscience humaine proteste de plus en plus contre la guerre et cherche à en adoucir les horreurs. Ainsi se prépare le règne de justice et de paix promis par Ésaïe (comparez Ésaïe 11.4-9).
Puisque la lumière qui éclaire Israël est destinée à se répandre dans le monde entier (versets 2 à 4), Israël devrait en profiter lui-même et craindre de se laisser devancer par les païens (verset 5). Mais, au contraire, c’est lui qui se convertit à leurs faux cultes et à leurs mœurs corrompues ; il attire ainsi sur lui le jugement de Dieu (versets 6 à 9).
Venez et marchons. L’empressement des païens (verset 3) est propre à stimuler celui d’Israël.
La lumière de l’Éternel : l’enseignement de sa loi ; y marcher, c’est écouter et pratiquer ce divin enseignement.
Car motive l’exhortation verset 5 : elle est opportune ; car Israël a laissé son Dieu et celui-ci l’a abandonné.
Pleins de l’Orient. L’Orient désigne ici, en opposition aux Philistins à l’ouest, les pays situés à l’est de Canaan (Arabie, Syrie, Assyrie, Chaldée). Israël adopte l’idolâtrie et les mœurs de ces contrées. Cette influence étrangère se faisait sentir déjà depuis le temps de Salomon, qui avait ouvert le pays au commerce de l’Orient et bâti des autels aux dieux de Moab, d’Ammon, etc (1 Rois 10.14-15 ; 1 Rois 11.5-7). Au temps d’Ésaïe, les règnes d’Ozias et de Jotham avaient été marqués par une nouvelle invasion des mœurs païennes et l’on sait ce que fit Achaz pour introduire le paganisme dans ses États. Voir introduction.
Magiciens. Comparez Ésaïe 8.19 ; 2 Rois 21.6. La Chaldée est la patrie des arts occultes, que la loi condamnait sous toutes leurs formes (Deutéronome 18.10-11) ; ils étaient pratiqués depuis longtemps chez les Philistins (1 Samuel 6.2 ; 2 Rois 1.2).
Ils donnent la main, c’est-à-dire, font alliance. On contractait alliance en se frappant dans la main. Salomon avait recherché l’alliance de l’Égypte (1 Rois 3.1) ; Asa celle de la Syrie (1 Rois 15.18) ; Achaz s’alliera aux Assyriens ; Ézéchias à l’Égypte. C’était là manquer de confiance en Dieu et, par un contact trop intime avec le paganisme, exposer le peuple aux plus graves dangers.
Description du résultat des deux règnes d’Ozias et de Jothani (2 Chroniques 26 et 27). Sous l’influence la prospérité matérielle, le niveau moral du peuple, bien loin de s’élever, a baissé. Les idoles ont envahi le pays à la suite de l’or des païens (verset 8).
L’idolâtre déshonore Dieu ; Dieu l’abaissera.
Ces deux versets sont une sorte de refrain ; on en retrouve les deux parties détachées l’une de l’autre, à la fin des deux strophes dont se compose le morceau suivant (versets 17 et 21). Peu de passages des saintes Écritures expriment d’une manière aussi saisissante que ce morceau le sentiment de la grandeur de Dieu seul et du néant des créatures devant lui.
Entre dans la roche… Les nombreuses cavernes des montagnes de Juda servirent souvent de refuge aux Israélites, en temps d’invasion étrangère : Juges 6.2 ; 1 Samuel 13.6 ; 1 Samuel 14.11. Ce fut également le cas, d’après Josèphe, pendant la guerre romaine. Comparez Apocalypse 6.15-17
L’Éternel a un jour marqué pour abattre tout ce qui s’élève ; ce jour est celui du jugement où les hommes rendront compte de l’emploi de leur vie et verront disparaître tous les objets de leur orgueil et de leur confiance (Matthieu 23.12)
En ce jour de l’Éternel, lui seul régnera. Comparez dans Joël 2 et 3 et Ésaïe 34, la description de la journée de l’Éternel jugeant les peuples. À cette expression correspond dans le Nouveau Testament celle de jour du Seigneur.
Basan : plateau élevé et bien arrosé, situé à l’est du Jourdain et limité par les monts Hauran ; on y trouve encore aujourd’hui de belles forêts. Les cèdres du Liban et les chênes de Basan étaient célèbres déjà dans l’antiquité ; car les forêts sont rares en Palestine (Zacharie 11.2 ; Ézéchiel 27.5-6).
Voyez 2 Chroniques 26.6 ; 2 Chroniques 26.9-10 ; 2 Chroniques 27.3-4
Tarsis : colonie phénicienne au sud de l’Espagne, près de l’embouchure du Guadalquivir, le Tartessos des Grecs. L’usage s’était établi de désigner par l’expression vaisseaux de Tarsis, les grands navires employés aux voyages de long cours, alors même qu’ils avaient une autre destination que l’Espagne. Ainsi Salomon et Josaphat entretenaient sur la mer Rouge des flottes qui sont appelées flottes de Tarsis (1 Rois 9.26 ; 1 Rois 10.22 ; 1 Rois 22.49 ; comparez Psaumes 48.8). La même chose dut avoir lieu après qu’Ozias eut reconquis Elath (voir introduction).
Ce qui charme les yeux : les articles de luxe qui arrivaient d’outre-mer. Il faut se rappeler que les Hébreux n’avaient, pour ainsi dire, ni art, ni industrie.
Voyez versets 20 et 21 la raison de cette disparition.
On les jettera dans les greniers et les ruines où gîtent ces animaux impurs.
Comment le mortel subsisterait-il quand Jéhova paraît et que tout s’anéantit devant lui ? Le Seigneur va enlever à son peuple tous ses soutiens et le livrer à une anarchie telle, que nul ne se sentira la force d’y remédier (2.22 à 3.7)
La vie de l’homme n’est qu’un souffle qu’il a reçu de Dieu et que chaque instant peut lui ravir (Psaumes 146.3-4).