Verset à verset Double colonne
1 Et l’Éternel parla à Moïse en disant :Un sacerdoce régulier a été constitué par la Loi. Mais le peuple élu est tout entier une nation sainte, un royaume de sacrificateurs (Exode 19.6) ; et, du sein de cette consécration générale, peut surgir à chaque moment un sacerdoce spontané qui aura sa place légitime à côté de la sacrificature organisée ; c’est là le naziréat. Nous ne devons donc pas nous étonner de rencontrer dans l’ordonnance qui le concerne de singuliers points de contact avec le règlement relatif au grand sacrificateur. Il ne paraît pas, du reste, que ce fût là une institution toute nouvelle, il en est parlé au verset 2 comme de quelque chose de connu et d’usité et nous trouverons dans ce qui suit des traces de sa haute antiquité. Comme à l’égard des holocaustes, des oblations et des sacrifices d’actions de grâces, la loi ne fait que réglementer et régulariser un usage plus ancien, remontant jusqu’à un temps évidemment rapproché de la vie nomade.
Homme ou femme. Les femmes pouvaient aussi faire ce vœu, sans doute en tenant compte de la restriction générale indiquée Nombres 30.6 et suivants.
Naziréat. Le mot de nazir vient d’une, racine qui signifie se séparer, s’abstenir, non parce que celui qui faisait ce vœu s’abstenait de certaines choses, mais parce qu’il se séparait du reste de son peuple pour se consacrer spécialement à l’Éternel. Il ne s’astreignait ni à une vie ascétique comme les anachorètes, ni à un service régulier dans le temple, mais il consacrait à Dieu, d’une manière spéciale et pendant un temps donné, sa vie et ses forces, sans que nous sachions autre chose du mode de cette consécration que les trois points qui vont être relevés.
De vin et de cervoise, c’est-à-dire de toute boisson enivrante (voir Lévitique 10.9, note).
Vinaigre : boisson rafraîchissante. Ruth 2.14
Aucun produit de la vigne… Les mots que nous traduisons par pépin et peau de raisin ne se retrouvent pas ailleurs ; d’autres les entendent : depuis le verjus jusqu’aux vrilles de la vigne ; d’autres : depuis le verjus jusqu’au raisin mûr. Cette première obligation du naziréen allait donc beaucoup plus loin que celle imposée aux sacrificateurs qui ne devaient s’abstenir que de boissons fermentées, et cela, seulement durant le temps de leurs fonctions (Lévitique 10.9) ; le naziréen devait éviter, en outre, tout ce qui provenait de la vigne lors même que le danger d’enivrement n’existerait pas (raisin, moût, vinaigre, etc.), tandis qu’il ne lui était point interdit de manger du miel, des dattes ou de telle autre matière qui servait à préparer la cervoise. Cette exclusion spéciale et rigoureuse de la vigne ne s’explique donc pas suffisamment si on y voit une condamnation des jouissances sensuelles en général (voyez les gâteaux de raisin Osée 3.1) ; elle semble provenir du temps où les Israélites menaient encore la vie nomade ; car pour les nomades, la culture de la vigne est le symbole de la vie sédentaire et de ses dangers. C’est une tradition analogue que nous trouvons chez les Récabites, qui ne cultivaient point la vigne, ni les champs et vivaient sous des tentes (Jérémie 35.6-10), puis chez les Nabatéens et les Mahométans ; chez les Romains eux-mêmes, le prêtre de Jupiter, le flamen dialis, ne devait ni toucher un cep, ni suivre un chemin ombragé d’une treille. Le naziréen était donc, censé, revenir à la simplicité et à la pureté des mœurs patriarcales.
Les cheveux. La seconde obligation du naziréen consiste à laisser croître librement sa chevelure ; il ne s’agit pas d’un simple signe extérieur qui se laisse reconnaître cette chevelure touffue est appelée, verset 7, la consécration du naziréen ; et le mot employé ici est le même que celui qui désigne le diadème du souverain sacrificateur, portant les mots : Consécration à l’Éternel Exode 28.36 ; Exode 29.6. Les cheveux croissant librement sont l’image de la plénitude de la vie naturelle qui doit être consacrée à Dieu sans que l’homme la mutile ou la déforme comparez les pierres de l’autel qui ne doivent point être taillées, Exode 20.25 ; les bêtes consacrées qui ne doivent point avoir porté le joug. Nombres 19.2 ; Deutéronome 21.3 etc.
La consécration du naziréen n’a pas pour but de comprimer la vie naturelle, comme chez les ascètes, mais de la développer dans toute sa richesse pour la consacrer au service de Dieu. L’exemple de Samson est l’illustration de cette loi : la chevelure du naziréen est sa couronne glorieuse que rien ne doit profaner.
Cette troisième obligation est en rapport étroit avec la précédente : la plénitude de vie, réclamée du naziréen, est incompatible avec le contact de la mort ; cette prescription, plus sévère que celle imposée au simple sacrificateur Lévitique 21.2 est identique à celle qui concerne le souverain sacrificateur (Lévitique 21.11).
Il porte sur sa tête. La chevelure est pour lui ce qu’est pour le souverain sacrificateur l’huile de l’onction à savoir une sorte de diadème (nézer).
Voyez Lévitique 21.12. Comme la femme et les enfants ne sont pas mentionnés, on peut en conclure que la loi ne suppose pas le naziréen marié. Ou bien faut-il admettre que pour lui, comme pour le grand sacrificateur, la défense était absolue et s’étendait même à ces cas ?
Par une souillure de ce genre le vœu de naziréat était rompu et tout était à recommencer.
Sa tête consacrée… Cette tête qui avait été consacrée avec sa chevelure, doit être rasée en vue d’un renouvellement complet de la consécration.
Le septième jour. C’était sept jours que durait ce genre de souillure (Lévitique 13.26) ; comparez l’ordonnance positive Nombres 19.11, etc.
Le huitième jour… La purification réclamée de tout Israélite et qui se termine le septième jour, ne suffit pas pour le naziréen ; il doit y ajouter un sacrifice pour le péché, accompagné d’un holocauste, à cause de la transgression involontaire qu’il a commise ; car sa consécration spéciale à Dieu augmente la gravité de la transgression.
Pour son péché. Le mot de péché est appliqué ici à une souillure involontaire et purement rituelle.
Il consacrera sa tête ce jour-là : recommençant ainsi son vœu de naziréat, sans que le temps pendant lequel il l’avait déjà observé entre en ligne de compte.
Sacrifice de réparation. Le sacrifice pour le péché ne suffisait pas. Il fallait encore une réparation, sans doute pour le retard apporté par cette interruption à l’accomplissement du vœu (Lévitique 5.15). Mais comme le tout était involontaire et de peu de gravité, le bélier réclamé par la loi est remplacé par un agneau d’un an comme pour le lépreux indigent (Lévitique 14.21).
Voici la loi. Le terme de thora, règle, loi, n’est employé qu’à ce moment où il s’agit de la prescription rituelle ; car jusqu’ici il n’était question que d’actes purement personnels.
Son offrande consistera en trois sacrifices : un holocauste comme acte d’adoration, un sacrifice pour le péché, à cause des transgressions qu’il a pu commettre pendant la durée de son vœu ou pour répondre au sentiment général de sa culpabilité et un sacrifice d’actions de grâces, pour remercier Dieu de ce temps de consécration toute particulière qui lui a été accordé.
Ointes d’huile. Tout ce qui précède appartenait de droit au sacrifice d’actions de grâces (Lévitique 7.12).
Et en outre… Ce qui suit appartient à l’holocauste et au sacrifice pour le péché (Nombres 15.3).
La combustion est le moyen de soustraire cette chevelure à toute profanation et de la faire monter à Dieu après qu’elle a été pendant un certain temps l’ornement, de la tête du naziréen ; cet acte forme ainsi la clôture normale de cette période de consécration.
La part qui revient au sacrificateur dans tout sacrifice d’actions de grâces, à savoir la poitrine et la cuisse du bélier (Lévitique 7.34) est augmentée ici de l’épaule du bélier, d’un gâteau et d’une galette sans levain ; le naziréen restreint ainsi la part à laquelle il aurait droit lui-même, afin d’accroître celle qui est donnée au représentant de Dieu ; il montre par là qu’il est entré dans une relation plus intime avec Dieu que les autres Israélites.
Balancera : voir Lévitique 7.30.
Boire du vin. Dès ce moment, le naziréen rentrera dans les conditions ordinaires de la vie, et cela, peut-être au moment même, en prenant part à la coupe du repas d’actions de grâces…
Ses moyens. Les prestations ici indiquées sont le minimum légal ; mais le naziréen peut avoir stipulé, en formant son vœu de naziréat, des offrandes plus considérables encore ; dans ce cas, l’offrande des victimes légales ne saurait le dispenser de ces offrandes surnuméraires auxquelles il s’est librement engagé.
La loi sur le naziréat que nous venons d’étudier ne connaît qu’un vœu de durée limitée, tandis que l’histoire de l’Ancien Testament ne mentionne que des naziréens consacrés à Dieu pour leur vie tout entière, (Samson, Samuel). Il ne faut donc pas s’étonner si les formes pratiquées par ceux-ci diffèrent en quelque manière des prescriptions que nous venons de lire. La mère de Samson, en vue de son enfant, consacré d’avance, s’abstient dès avant sa naissance de celui-ci de vin, de cervoise et de tout aliment souillé (Juges 13.7).
Samson ne paraît pas avoir suivi d’autre règle que celle qui concernait la chevelure ; Samuel, consacré à Dieu, comme, Samson, dès avant sa naissance, accomplit son naziréat en vaquant au service de Dieu dans le sanctuaire ; cependant rien ne dit qu’il ne se soit pas abstenu de vin et n’ait pas laissé croître sa chevelure.
Quant aux sacrifices prescrits pour la clôture du naziréat temporaire, ils tombaient d’eux-mêmes dans le cas du naziréat à vie. Sous ces deux formes de consécration, le naziréen, sans sortir de la société environnante, se mettait complètement à disposition de Dieu pour accomplir la tâche qu’il voudrait lui confier, soit comme prophète, soit comme guerrier, au moyen de la force particulière que Dieu lui donnerait. Après le temps des Juges (Samson, Samuel) le naziréat n’est plus mentionné que dans Amos 2.12, où il en est parlé comme de l’un des organes de l’Esprit divin à côté du prophétisme. Il reparaît, sous les Maccabées et prend à ce moment une grande extension : car sous le roi Alexandre Jannée, un siècle avant notre ère, il est fait mention d’une troupe de trois cents naziréens ; Jean-Baptiste était naziréen et la tradition nous apprend qu’il en était de même de Jacques, le frère de Jésus, chef du troupeau de Jérusalem.
On n’est pas d’accord sur la nature du vœu que lit saint Paul (Actes 18.18), lorsqu’il coupa ses cheveux à Cenchrées. Peut-être commençait-il par là un temps particulier de consécration (1 Corinthiens 7.5) en vue d’un vœu relatif au voyage qu’il entreprenait. Si, en une autre occasion, il s’associe, sur le conseil de Jacques, au sacrifice de quatre naziréens qui achevaient leur temps (Actes 21.24-26), cet acte est conforme à un usage des temps postérieurs d’après lequel les Juifs aisés venaient en aide aux naziréens indigents en se chargeant d’une partie des frais de la fête de clôture. C’est là la dernière trace du naziréat que nous trouvions dans la Bible. Cette institution doit avoir été assez populaire, car elle a laissé des traces dans la langue ; voir Lévitique Nombres 25.5 ; Nombres 25.11, où les sarments de la vigne non taillés sont désignés comme naziréens. Comparez aussi Jérémie 7.29.
Cette formule fut probablement employée pour la première fois Lévitique 9.22 et suivants lorsque Aaron entra en fonctions ; pour ne pas interrompre le récit de l’installation, le rédacteur n’en aura pas indiqué à ce moment-là la teneur. Nous n’avons aucun renseignement sur les moments où elle devait être prononcée. Les rabbins disent que le sacrificateur bénissait le peuple chaque matin à l’issue du service. Cette cérémonie se répète aujourd’hui encore dans les synagogues à certains jours ; c’est la seule forme du culte lévitique qui se soit maintenue. Mais cette admirable formule a passé dans les liturgies de toutes les Églises chrétiennes.
La bénédiction s’adresse, comme le Décalogue, au peuple d’Israël en la personne de chacun des individus qui le composent. Elle se divise en trois membres, qui se subdivisent chacun en deux parties et présentent une certaine gradation. Le premier membre exprime l’idée de la bénédiction sous la forme la plus générale, positive et négative : Que l’Éternel te fasse du bien et te préserve de tous maux ! Dans le second membre la bénédiction se précise : La face de Dieu est sa personne elle-même se mettant en rapport avec l’homme. Le terme de faire luire indique la bienveillance du regard divin, qui enveloppe, comme une lumière descendant du ciel, celui qui en est l’objet ; comparez Psaumes 4.7 ; Psaumes 44.4 : la lumière de ta face. L’effet de ce regard de bienveillance est indiqué dans la seconde moitié du verset par le terme de faire grâce, qui indique le don du salut, spécialement le pardon des péchés. Le terme hébreu (chanan) est souvent rendu dans nos traductions par : avoir pitié de. Dans le troisième membre, la formule de bénédiction prend quelque chose de plus direct et de plus actif encore. L’expression : tourner sa face vers, indique que l’individu israélite devient l’objet particulier de l’attention et de la sollicitude divines ; de là résulte chez lui, comme l’indique le second hémistiche, le doux sentiment de la paix, de la confiance, du repos en Dieu. Fruit de la grâce, cette paix exprime en hébreu l’idée du parfait bien-être. Ainsi de la part de Dieu, bonne volonté, regard miséricordieux, sollicitude active ; pour l’homme, assistance, pardon, paix. Voilà le triple vœu que le ministre de l’Éternel est chargé, par l’Éternel lui-même de former et d’exprimer pour son peuple et chacun de ses membres.
Ces trois vœux rappellent les trois termes de la bénédiction prononcée par Paul dans les épîtres pastorales : grâce, miséricorde et paix (1 Timothée 1.1 ; 2 Timothée 1.1 ; Tite 1.1). À mesure que la révélation du nom de l’Éternel s’est développée, cette triple bénédiction s’est précisée et a revêtu la forme la plus explicite, que nous trouvons dans 2 Corinthiens 13.13 : La grâce du Seigneur Jésus-Christ, l’amour de Dieu, la communion du Saint-Esprit.
Ils mettront mon, nom sur… Ils le feront reposer sur l’assemblée en le prononçant par trois fois sur elle. Le nom de Dieu est Dieu lui-même pour autant qu’il s’est déjà fait connaître à son peuple. Toute la plénitude des grâces renfermées dans la révélation divine est ainsi appelée sur le peuple par le sacrificateur qui prononce cette bénédiction.
Et moi… Et moi de mon côté ; en conséquence de cette parole prononcée. Cette bénédiction sacerdotale ne sera pas un vœu impuissant, comme si ce n’était qu’une parole humaine. Celui qui l’a mise dans la bouche du sacrificateur saura lui donner l’efficacité.