Verset à verset Double colonne
L’ange qui proclame sa ruine
Jean le voit descendre du ciel dans une gloire éclatante. Sa voix puissante publie que Babylone est devenue un repaire de démons dans le désert, parce qu’elle a entraîné les nations à l’idolâtrie et à la corruption et qu’elle a enrichi les marchands par son luxe (1-3).
Invitation aux chrétiens à sortir de Babylone
Le Seigneur ordonne à son peuple de sortir d’elle, afin de n’avoir part ni à ses péchés, ni à son châtiment. Elle recevra au double le salaire de ses iniquités ; dans la mesure où elle a vécu dans le luxe et s’est glorifiée avec assurance, elle sera dans le tourment et le deuil, car Dieu, qui l’a jugée, est puissant (4-8).
Lamentations de la terre et joie du ciel à son sujet
Les rois, complices de ses fornications, pleurent, à distance, sur sa ruine soudaine. Les marchands mènent deuil, car personne n’achète plus leurs denrées précieuses, que l’auteur énumère. Les navigateurs, à la vue de l’embrasement de la grande ville, jettent de la poussière sur leur tête. Le ciel est invité à se réjouir ; les saints de même, car Dieu leur a fait justice (9-20).
La destruction totale de Babylone est annoncée par une action symbolique, puis décrite et motivée
Un ange jette une grande meule dans la mer, en disant : Ainsi disparaîtra Babylone. On n’entendra plus chez elle ni le bruit des fêtes, ni celui du travail, ni la voix de l’amour ; parce que ses marchands sont devenus des princes, que toutes les nations ont été séduites par ses enchantements et qu’on a trouvé chez elle le sang des prophètes, des saints et de toutes les victimes du monde entier (21-24).
Tout dans l’apparition de cet ange, qui descend du ciel et qui a une grande puissance, dénote un ange d’un ordre supérieur. En lui resplendît la sainteté et la majesté de Dieu : toute la terre fut illuminée de sa gloire (comparer Ézéchiel 43.2).
Ainsi tous les habitants de la terre furent rendus attentifs à son apparition et ils entendirent tous la nouvelle que l’ange cria d’une voir forte. La chute de Babylone avait déjà été publiée à Apocalypse 14.8 (comparer Ésaïe 21.9). Son sort est dépeint dans des termes semblables à ceux dans lesquels les prophètes avaient annoncé la ruine de la Babylone des bords de l’Euphrate (Ésaïe 13.19-22 ; Ésaïe 34.11-14 ; Jérémie 50.39).
Elle est devenue une habitation de démons (c’est ainsi que les Septante traduisent le mot : « boucs », dans Ésaïe 13.21), une prison de tout esprit impur, car c’est contre son gré que l’esprit impur séjourne dans les lieux déserts (comparer Matthieu 12.43).
Toutes les nations ont bu du vin…est la leçon adoptée par la plupart des éditeurs bien que Codex Sinaiticus, A, C, Q portent : sont tombées par l’effet du vin…
Aux deux griefs déjà mentionnés Apocalypse 14.8 et Apocalypse 17.2 (voir les notes), en est ajouté un troisième : les marchands de la terre se sont enrichis de la puissance de son faste qui faisait la fortune de ces trafiquants chargés de pourvoir à ses exigences multiples et insatiables. Comparer Ézéchiel 27.3-25.
Cette autre voix est la voix de Christ (Apocalypse 10.4 ; Apocalypse 14.13). Les paroles qu’il prononce vont jusqu’au verset 8 inclusivement.
Il invite son peuple (2.14) à sortir de Rome, de même que précédemment il ordonnait à ses disciples de sortir de Jérusalem vouée à la destruction (Apocalypse 12.6, note ; Matthieu 24.16 suivants ; comparez Jérémie 51.6 ; Jérémie 51.45 ; Genèse 19.12-15).
Ils doivent sortir de la ville maudite, non seulement pour n’être pas englobés dans sa ruine, mais de peur qu’ils n’en viennent à participer à ses péchés (2 Corinthiens 6.17).
Ses péchés se sont accumulés jusqu’au ciel (Esdras 9.6) et Dieu s’est souvenu (Apocalypse 16.19) de ses iniquités.
Il y a littéralement en grec : « ses péchés ont été collés jusqu’au ciel ».
Holtzmann estime que cette expression présente l’image de péchés inscrits sur un livre, dont les feuillets de papyrus, collés les uns aux autres, forment un rouleau qui s’étend jusqu’au ciel.
L’ordre des versets 6 et 7 (comparez Ésaïe 40.2 ; Jérémie 50.29 ; Psaumes 137.8) n’est pas donné aux chrétiens au peuple de Christ, qui a quitté la ville (verset 4), mais aux exécuteurs des jugements de Dieu, à la bête et aux rois ses alliés (Apocalypse 17.16 ; Apocalypse 17.17).
Tous les majuscules portent : (verset 6) comme elle a payé ; le texte reçu (minuscules) : comme elle vous a payé.
Ce langage plein d’assurance est déjà prêté à Babylone dans Ésaïe 47.7-9.
Il est puissant le Seigneur Dieu qui l’a jugée, est la leçon de C, Q. majuscules, versions. Codex Sinaiticus porte : « il est puissant le Dieu, le Seigneur qui l’a jugée ». A et la Vulgate omettent le mot : Seigneur et portent simplement : Dieu qui l’a jugée est puissant.
À la sentence prononcée du haut du ciel (versets 2-8), répondent des lamentations sur la terre.
Les rois de la terre ne sont évidemment pas les dix rois chargés de la destruction de Babylone (Apocalypse 17.12 ; Apocalypse 17.16-17), mais les autres rois qui se sont laissé séduire par elle et ont suivi l’exemple de son idolâtrie et de sa corruption (Apocalypse 17.2 ; Apocalypse 17.4, notes). Les « princes de la mer » se lamentent de même sur Tyr dans Ézéchiel 26.16-18.
La complainte des marchands (comparez verset 3, note) a son parallèle dans Ézéchiel 27.
Ces produits divers, qui affluaient à Rome de tous les pays du monde, sont énumérés pour faire ressortir, d’une part, le luxe et les délices de la grande ville (versets 3, 7 et 14), et, d’autre part, les pertes faites par les marchands qui s’enrichissaient de leur trafic et ne savent plus à qui vendre leurs marchandises (verset 11).
Le bois de senteur (verset 12) était le bois odoriférant du cèdre blanc.
Le cinnamome (verset 13) est une sorte d’aromate.
L’amome désigne une plante qui croit en Asie et dont on tirait un parfum précieux. L’authenticité des mots : et de l’amome est garantie par Codex Sinaiticus, A, C, minuscules, versions.
Les corps et les âmes d’hommes sont, d’après la plupart des interprètes, une double désignation des esclaves. La seconde se trouve aussi dans Ézéchiel 27.13. La première s’appliquerait plus spécialement soit à des gladiateurs soit à des prostituées. Mais il est plus probable que les corps désignent les conducteurs des chars, parce que ce mot est, en grec, au même cas que les mots chevaux et chars.
Ce verset, avec le discours direct à l’adresse de Babylone, interrompt manifestement la description du désastre subi par les marchands.
Le verset 15 se rattache étroitement au verset 13. On conjecture que verset 14 se trouvait originairement après ces mots du verset 23 « la voix de l’époux et de l’épouse ne sera plus entendue chez toi ».
Comparer Apocalypse 18.11 ; Apocalypse 18.12 ; Apocalypse 17.4.
Troisième classe d’hommes qui tiraient leur profit de Babylone et qui se lamentent sur sa ruine. Ils figurent aussi dans Ézéchiel 27.26 et suivants.
Le texte ne porte pas : « ceux qui naviguent vers ce lieu » (Rome), comme ont la plupart de nos versions, mais, « vers un lieu », vers un port déterminé, qui est le but de leurs voyages ou le port d’attache de leur navire. Actes 27.2 explique cette expression.
Il y a une ironie amère dans leur exclamation (verset 18), qui est proprement une parole d’admiration (Apocalypse 13.4). Babylone n’a pas sa pareille dans sa ruine présente, comme dans sa splendeur passée.
Jeter de la poussière sur sa tête, c’était manifester sa douleur et son deuil (Ézéchiel 27.30) sur l’embrasement de Babylone, comparez Apocalypse 18.9 ; Ésaïe 34.10.
Grec : Car Dieu a jugé tirant d’elle votre jugement ; il a accompli sur elle le jugement par lequel justice vous est rendue.
Au lieu de : les saints et les apôtres, C, minuscules, le texte reçu portent : les saints apôtres.
Quel contraste entre les lamentations qui précèdent et la joie à laquelle sont invités les habitants du ciel (comparez Apocalypse 12.12) et les saints, les chrétiens en général, et, en particulier, les apôtres et les prophètes (de la nouvelle Alliance), dont Rome a répandu le sang abondamment (Apocalypse 16.8 ; Apocalypse 17.6).
La joie qu’ils éprouvent de la chute de Babylone se confond avec l’adoration des voies de Dieu, qui fait triompher sa justice et sa sainteté, voilées jusque-là par les désordres que crée le péché (comparer Apocalypse 19.1-5).
Action symbolique qui figure la destruction totale, définitive.
Jérémie Jérémie 51.63 ; Jérémie 51.64 ordonne à Séraja d’accomplir à Babylone une action analogue.
Comparer Ésaïe 24.8 et suivants ; Ézéchiel 26.13.
Pas plus le bruit du travail nécessaire à la vie que les accents joyeux des fêtes (Jérémie 25.10).
La lumière de la lampe qui s’éteint est un trait emprunté aussi à Jérémie 25.10. La voix de l’amour a fait place au silence de la mort (Jérémie 7.34 ; Jérémie 16.9 ; Jérémie 25.10).
Comparer Ésaïe 23.8. Par leur commerce, ils acquirent des fortunes princières.
Comparer Nahum 3.4.
C’est là le crime capital de Babylone (Apocalypse 17.6).
En répandant le sang des prophètes et des saints, qui a été trouvé en elle (Ézéchiel 24.7-9), elle a couronné et consommé toute la série des actes de violence commis sur la terre.
Le sang de tous les égorgés (grec) a été trouvé ainsi en elle et lui sera redemandé, comme la Jérusalem contemporaine du Christ a dû payer pour « tout le sang innocent répandu sur la terre depuis le sang d’Abel le juste jusqu’au sang de Zacharie, fils de Barachie » (Matthieu 23.35).