Verset à verset Double colonne
Israël est depuis longtemps rétabli ; déjà le règne de Dieu est réalisé dans son sein. Il jouit d’une prospérité, parfaite et de la plus entière sécurité. Tout à coup une invasion de peuples lointains et barbares menace son existence. Gog, roi du pays de Magog, fond sur la Terre Sainte avec une armée innombrable, composée des peuples les plus divers. C’est la dernière attaque du paganisme contre le peuple de Dieu. Mais à son arrivée dans le pays qu’il se propose de piller, cet ennemi est subitement anéanti par un jugement de Dieu qui de là s’étend même jusqu’aux contrées d’où Gog est parti. Pendant sept ans Israël brûle les armes des envahisseurs et pendant sept mois il ensevelit leurs cadavres, que les oiseaux de proie et les bêtes des champs lui disputent durant ce temps. Ainsi Dieu glorifiera définitivement son nom aux yeux de tous les survivants d’entre les Gentils, qui sauront dorénavant qu’il est l’Éternel et aux yeux des Juifs, qu’il ne privera plus jamais de sa grâce.
Tel est le contenu de ces deux chapitres qui décrivent la chute finale du paganisme sur la terre. Déjà les anciens prophètes, surtout Joël, Michée, Sophonie, après avoir décrit le jugement d’Israël dont les païens seront les exécuteurs, avaient annoncé celui qu’auraient à subir les païens de la part de Dieu lui-même. C’est cette dernière idée qui est mise en scène de la manière la plus dramatique dans cette prophétie. Plusieurs traits (sept ans, sept mois) nous forcent à lui attribuer un caractère symbolique et un sens spirituel ; néanmoins il est manifeste que le prophète parle de l’événement qu’il décrit comme d’un fait vraiment historique. Avant cette dernière lutte de l’humanité contre l’Éternel, le règne de Dieu ne peut obtenir sa constitution définitive. Cet édifice éternel ne s’élèvera que sur les ruines de tous les éléments résistants dans la race humaine. Peut-être la terrible invasion des Scythes dans toute l’Asie occidentale, qui avait eu lieu un demi-siècle avant cette prophétie (comparez Jérémie 4.5, note), a-t-elle suggéré au prophète quelques traits de ce tableau.
On sait que Jean place cette invasion de Gog et Magog à la suite du règne de mille ans (Apocalypse 20.7-10), avant l’apparition du ciel nouveau et de la nouvelle terre (Apocalypse 21.1-5) ; elle occupe une place analogue dans Ézéchiel ; comparez les chapitres 40 à 48 qui suivent.
Dans les 17 premiers versets, le prophète décrit la mise sur pied et l’arrivée de l’armée de Gog ; dans les versets 18 à 22, sa destruction.
Gog, au pays de Magog. On trouve, Genèse 10.2, parmi les noms des sept fils de Japheth celui de Magog ; il est placé entre Gomer et Madaï. Ce dernier nom désigne sans aucun doute les Mèdes, au sud de la mer Caspienne. On est assez d’accord aujourd’hui pour reconnaître dans Gomer les Cimmériens, dont les demeures paraissent avoir été situées au nord de la mer Noire et sur les bords de la mer d’Asow. Il est probable que Magog occupait une position intermédiaire, mais beaucoup plus septentrionale (verset 45), ainsi sur les bords de la mer Caspienne et vers les vastes steppes de l’Oural. Quant au nom de Gog, ou bien Ézéchiel l’a formé lui-même en le tirant de celui de Magog, dont il aurait retranché la syllabe Ma, indiquant la contrée, ou bien il l’avait reçu de la légende populaire, comme celui des souverains de ce peuple éloigné. Ces deux noms, Gog et Magog, ne reparaissent dans la Bible que Apocalypse 20.8 (sauf 1 Chroniques 5.4 où Gog est le nom d’un descendant de Ruben) ; ils semblent être dans l’Apocalypse deux noms de peuple.
Prince souverain de Mésec et de Tubal. Le mot traduit par souverain est rosch : tête. Ce pourrait être aussi le nom d’un peuple : prince de Rosch, Mésec et Tubal, comme beaucoup traduisent ; mais les anciens ne mentionnent nulle part un pays de Rosch. Au dixième siècle seulement les écrivains byzantins parlent d’un peuple de Ross, habitant soit le Taurus septentrional, soit les rives du Volga et que l’on pourrait identifier avec les Russes, quoique ceux-ci paraissent n’être venus qu’au neuvième siècle de la Scandinavie. La traduction que nous avons suivie et qui se justifie pleinement, ne permet aucun rapprochement de ce genre. Nous avons déjà indiqué où se trouvaient Tubal et Mésec ; le premier à l’angle sud-est de la mer Noire, le second plus à l’est dans la vallée située entre l’Arménie et le Caucase (Ézéchiel 27.13 ; Ézéchiel 32.26). Notre traduction suppose que le roi de Magog avait étendu son pouvoir vers le sud, jusque sur ces deux peuples.
Je t’emmènerai. La suite nous dit comment (verset 18 et Ézéchiel 34.2) : l’Éternel fera qu’il entendra parler de la prospérité sans exemple de la terre d’Israël et qu’il sera enflammé du désir de la piller.
Je mettrai des crocs : il cédera à cet entraînement irrésistible.
Toi et toute ton armée. La suite montre que ce sera une armée de cavaliers.
Peut-être le nom de Perses a-t-il ici son sens ordinaire ; mais peut-être aussi se rapporte-t-il, ainsi que le nom de Cus (Éthiopiens) et de Put (Libyens), à une peuplade du nord de l’Afrique (Ézéchiel 27.10, note).
Après les peuples habitant le midi sont nommés ceux qui, comme Gog lui-même, habitent les lointaines contrées du nord, Gomer, les Cimmériens et Thogarma, l’Arménie, celui-là à l’ouest, celui-ci à l’est de Magog.
L’ordre divin donné à Gog de se mettre à la tête de son peuple et de la multitude des Gentils qui l’accompagneront.
Au bout de bien des jours. Il y aura longtemps que Dieu le réservait pour ce rôle, quand enfin l’heure de l’accomplissement sonnera (verset 17).
Tu recevras l’ordre. C’est là le sens le plus probable du mot employé ; comparez Néhémie 12.44.
La nation soustraite à l’épée : Israël arraché à la captivité.
Les mots rassemblée d’entre beaucoup de peuples, semblent faire allusion au retour d’une dispersion bien plus considérable que l’exil de septante ans que le peuple subit dans la terre de Chaldée.
Tous en sécurité : sans places fortes et sans remparts. C’est un état tout autre que celui qui a suivi le retour de l’exil.
Les actions des hommes ont une double origine. D’un côté, elles procèdent de Dieu qui veut s’en servir pour l’accomplissement de ses plans (comparez versets 4 et 7). De l’autre, elles viennent de l’homme qui a ses projets et ses intentions à lui ; à ce second point de vue, elles peuvent même parfois être attribuées simultanément à Satan, qui travaille à enflammer nos convoitises. C’est sous le second aspect que la conduite de Gog est présentée dans les versets 10 et 11 et Apocalypse 20.8 (où elle est attribuée à l’incitation de Satan). Comparez 2 Samuel 24.1 avec 1 Chroniques 21.1 et Jean 13.2 avec verset 27.
Le langage que Gog se tenait d’abord à lui-même (verset 11) semble dans ce verset se transformer en celui de Dieu qui l’engage à ne plus tarder à satisfaire sa convoitise ; car l’heure est venue où Dieu veut juger les Gentils.
Au beau milieu de la terre. Le milieu de la terre est supposé devoir être sa plus belle contrée. Ce nom revient donc à celui de joyau de la terre, qui est parfois donné à la Palestine. Géographiquement parlant, ce pays occupait une position assez centrale, puisqu’il était situé au point de rencontre des trois continents que comprenait l’ancien monde.
Qu’ont à faire ici ces peuples marchands dont il a été parlé Ézéchiel 27.20-25 (voir notes), et, quelle est l’intention de la question qu’Ézéchiel met dans leur bouche ? Nous ne pouvons nous l’expliquer, qu’en supposant que leurs caravanes et leurs flottes arrivent pour acheter le butin qu’auront fait ces pillards et aller le revendre ailleurs, comparez Joël 3.4-6, Joël 3.8, Joël 3.19 et Amos 1.6-9, ou un office semblable est attribué aux Édomites, aux Phéniciens et aux Sabéens.
Tous ses lionceaux : les marchands qui se livrent à ce trafic.
Tu le sauras. Dieu fera en sorte que Gog soit averti de l’état de prospérité et de sécurité dans lequel vit son peuple ; car c’est là l’appât au moyen duquel il le prendra.
Le but de Dieu est saint. Je me sanctifierai : Dieu veut faire enfin resplendir sa sainteté dans tout son éclat.
Avec ce verset commence la description du jugement de Gog. Dieu semble dire : Sans te nommer, c’était de toi que je parlais quand j’annonçais le dernier soulèvement et la destruction finale du paganisme sur la terre (comparez Joël 3.2-17 ; Ésaïe chapitres 24 à 27 ; Michée 4.11-12 ; Jérémie 30.23-24).
Voici l’accomplissement de ces antiques prophéties. Le jugement commence par un tremblement de terre qui ébranle la nature entière et qui met en déroute l’armée de Gog ; comparez Zacharie 14.1-6.
Les ennemis se tuent les uns les autres, comme autrefois Juges 7.22 et 2 Chroniques 20.23.
Dieu déchaîne tous ses autres fléaux : la peste, comme dans le jugement de Sanchérib, Ésaïe 37.36 ; puis un orage avec grêlons, feu et soufre, comme à Gabaon, Josué 10.11 et à Sodome, Genèse 19.24.